L'affaire avait déjà été entendue avant-même l'arrivée de François Hollande à la tête de l'Etat. Entre les deux tours de l'élection présidentielle, les équipes de celui qui portait les couleurs du Parti Socialiste avaient rencontré la direction de la Haute Autorité pour la Diffusion des Oeuvres et la Protection des Droits sur Internet (Hadopi). Il était ressorti de l'entretien qu'au moins jusqu'à la promulgation d'une nouvelle loi, l'Hadopi continuerait de fonctionner normalement, malgré le changement de majorité.
"Ni les décrets sur la négligence caractérisée ni la circulaire adressée aux parquets ne seront retirés, et des dossiers devraient donc continuer à être envoyés aux procureurs dans les prochaines semaines et les prochains mois", avions-nous écrit le 15 mai 2012.
Maintenant que le nouveau Gouvernement est effectivement en place, la consigne se confirme. Interrogé par BFM TV, le ministère de la Culture a fait savoir qu'il "exclut de donner des instructions aux procureurs sur le sujet, et notamment de leur demander de ne pas couper les accès Internet". La circulaire Hadopi du 31 août 2010, qui demande aux parquets de poursuivre sans enquêter, reste officiellement la seule directive en circulation.
Jusqu'à présent, au moins 340 dossiers ont été examinés par la Commission de Protection des Droits (CPD), et quelques dizaines ont fait l'objet d'une transmission aux parquets pour infraction de négligence caractérisée. S'il trouve le prévenu effectivement coupable de ne pas avoir suffisamment bien sécurisé son accès à internet (ce qui ne peut être vérifié qu'en fournissant soi-même les preuves de sa culpabilité), le tribunal peut infliger une peine de 1500 euros d'amende et/ou la suspension de l'accès à internet pendant un mois, avec interdiction de souscrire un abonnement chez un autre fournisseur.
Juridiquement, il est impossible pour le Gouvernement de demander officiellement aux parquets de ne pas appliquer la loi, sauf à risquer l'annulation de la circulaire qui intimerait cet ordre. Mais dans les faits, alors que les premiers dossiers ont été transmis il y a plus sept mois, à notre connaissance aucune suite n'a été donnée par les procureurs. Ce qui semble manifester d'une consigne officieuse, ou au minimum d'un manque évident d'empressement à faire un premier exemple.
Il y a quelques jours, la présidente de la Commission de protection des droits de l'Hadopi s'est elle-même interrogée sur la suite pénale à donner aux avertissements, en estimant qu'il fallait trouver une autre sanction que celle actuellement prévue.
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