Mardi, lors des questions au gouvernement, le député UMP Franck Riester a une nouvelle fois défendu l’Hadopi dont il est membre. Il a critiqué le manque de cohérence des positions du Parti Socialiste, accentuées par la dissonance de son candidat François Hollande. Une critique immédiatement répétée par le ministre Frédéric Mitterrand.

C’est le charme des questions au gouvernement, qui se transforment souvent en pièces de théâtre. Mardi, le député Franck Riester, qui oublie de toujours de rappeler à ses collègues qu’il est membre de la Hadopi, a posé au ministre une question qui était en fait une attaque à l’encontre des Socialistes et de leur candidat François Hollande.

« Alors que la Hadopi est au travail et que les premiers résultats sont au rendez-vous, le Parti Socialiste, fidèle à sa ligne démagogique, prône la suppression de la Hadopi« , a-t-il débuté. « Pour la remplacer, les Socialistes nous ressortent la vieille utopie de la licence globale« . Le député, qui critique la proposition de Martine Aubry de légaliser les échanges de musique hors-marché contre une taxe d’1 ou 2 euros par mois, n’oublie pas cependant que ça n’est pas la position de François Hollande.

Il pointe, surtout, et à raison, la versatilité du candidat aux élections présidentielles, qui a sans cesse changé de position ou entretenu l’ambiguïté sur la loi Hadopi. Pour mémoire:

  • En novembre 2010 : il refuse l’idée d’abroger la loi Hadopi, et propose simplement d’en évaluer l’efficacité ;
  • En avril 2011 : il signe le projet socialiste, qui prévoit l’abrogation des lois pénales relatives au piratage sur Internet, c’est-à-dire la suppression des lois DADVSI et Hadopi.
  • En juin 2011 : il renouvelle son refus d’abroger l’Hadopi, et dit dans un même temps qu’il faudra faire une « révision de ce dispositif législatif », et néanmoins conserver une mission de « dissuasion » du téléchargement illégal.
  • En juillet 2011 : Il publie sur son blog un billet qui affirme la nécessité d’abroger Hadopi, et même de remplacer la Haute Autorité par « une faible redevance couplée à la réorientation de la taxe sur les Fournisseurs d’accès internet (FAI) qui permettra de dégager jusqu’à un milliard d’euros annuels pour rémunérer les droits d’auteurs » ;
  • En août 2011 : François Hollande déclare que « la loi dite Hadopi devra être entièrement revue voire abrogée« 
  • Le 3 octobre 2001 : il s’oppose à la licence globale. « On paye 2 euros et on télécharge tout ? Non, c’est une solution (trop) facile », déclare-t-il.
  • Le 5 octobre 2011 : devant un puissant lobby du cinéma français, il déclare qu’il n’abrogera pas l’Hadopi ;
  • Le 6 octobre 2011 : il efface de son blog la note de juillet dans laquelle il s’engageait à abroger l’Hadopi et à la remplacer par une contribution financière, proche de la licence globale. Pourtant, invité sur France Inter, il répète son souhait d’abroger Hadopi.
  • Le 7 octobre 2011 : Pressé de préciser sa position, face à une Martine Aubry qui moque son ambiguïté, François Hollande répète qu’il abrogera Hadopi, mais ajoute qu’une autre loi la remplacera, parce que « on ne peut quand même pas laisser l’internet sans règles« . Il ne précise pas quelles règles il souhaite instaurer.
  • Le 13 octobre 2011 : L’animateur de la campagne numérique de François Hollande, Vincent Feltesse, détaille le projet du candidat socialiste. Il propose un « pacte pour la création numérique » qui associerait avertissements, sanctions pénales pour les plus gros téléchargeurs, et un « soutien » de la filière culturelle qui devrait se traduire par une taxe. En somme, il propose une Hadopi light.

« L’indécision et l’ambigüité, voilà la ligne de conduite du nouveau candidat François Hollande », se plait à moquer Franck Riester, qui estime que François Hollande ne pouvait « nier les résultats concrets et tangibles de la Hadopi« .

En réponse à ce qui n’était pas une question, le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand en a ajouté une couche. « D’évidence, le Parti Socialiste a un problème avec le droit d’auteur« , a-t-il attaqué. « Qui pourrait prendre au sérieux les propositions d’un parti qui compte tant de fervents partisans de la licence globale, cette négation du droit d’auteur et de tout le travail effectué depuis des décennies par les sociétés d’auteurs ?« .

« Au milieu de ces palinodies répétées, de ce grand écart permanent, la seule constance c’est le principe d’ambigüité que vous pratiquez« .

Le ministre enchaîne par cette curiosité affirmation digne de la méthode Coué : « Vous ne savez même pas qu’Hadopi est en train de réussir, et que même la presse hostile est en train de s’en rendre compte« . Mais qu’est-elle en train de réussir, et quelle est cette presse hostile qui se rendrait compte d’un coup de l’efficacité de l’Hadopi ? On ne le saura pas.

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