Alors que la justice américaine avait refusé d’accorder un droit d’auteur au singe Naruto pour ses selfies réalisés avec l’appareil d’un photographe professionnel, l’affaire fait son retour devant les juges de la cour d’appel de San Francisco.

L’histoire, insolite, dure maintenant depuis près de 6 ans et pose une question qui n’a toujours pas été tranchée définitivement : les singes peuvent-ils prétendre au droit d’auteur ? Alors que la justice américaine avait estimé en 2016 qu’« aucune indication » n’existait concernant une possible extension de ce droit vers les animaux, l’affaire est traitée ce mercredi 12 juillet devant la cour d’appel de San Francisco.

L’affaire remonte à 2011, dans la réserve indonésienne de Tangkoko, sur l’île de Sulawesi. Un signe nommé Naruto croise la route du photographe professionnel David Slater, en plein safari photo sur ces terres océaniques. Le voyageur se fait subtiliser son appareil par le primate, qui profite de sa prise pour réaliser quelques selfies.

Le Britannique s’est ensuite permis de vendre ces clichés à l’agence Caters News Agency, avant que la Peta, une association internationale de défense des droits des animaux, ne vienne défendre l’idée que le singe était le véritable auteur des photos, et donc qu’il avait toute légitimité pour revendiquer son droit d’auteur.

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« C’est un problème pour le Congrès et le président »

Sur le papier, l’idée n’est pas absurde, les lois sur le copyright aux États-Unis stipulant que la propriété intellectuelle est garantie à celui qui a pris la photo, et non au possesseur de l’appareil. La logique serait sans faille si il s’agissait d’un humain… mais qui ne s’applique pas ici avec un animal, aux yeux de William Orrick, le premier juge fédéral en charge de l’affaire.

Celui-ci avait estimé en 2016 que les animaux ne pouvaient revendiquer une propriété intellectuelle, étant donné la non-présence d’un tel cas de figure dans la loi sur le droit d’auteur.

Visiblement non convaincue, la Peta a fait appel en s’appuyant sur une déclaration du même juge, estimant que le  : « C’est un problème pour le Congrès et le président. S’ils estiment que les animaux devraient avoir un droit de copyright, ils sont libres, selon la Constitution […] de le faire. »

Le photographe David Slater espère justement jouer sur cette forme de vide juridique, comme il l’explique dans une déclaration : « Il est incontestable que le Congrès n’a jamais clairement déclaré que les animaux […] pouvaient se présenter en vertu de la loi sur le droit d’auteur. »

Source : Domaine public

Humain ou non, l’originalité prime-t-elle ?

La Peta a avancé d’autres arguments dans un long document à destination du juge, notamment celui que « la protection prévue par la loi sur le droit d’auteur ne dépend pas de l’humanité de l’auteur, mais de l’originalité du travail lui-même. »

Un primatologue de l’Université de Notre Dame, Augustin Fuentes, a également pris la défense de Naruto, dans une lettre : « Dans ce cas-là, les données scientifiques soutiennent nécessairement l’interprétation large que Naruto a la capacité d’être un auteur et de se comporter d’une façon correspondant à la définition d’une expression artistique. »

L’association espère avec cette nouvelle procédure récupérer des dommages et intérêts sur la publication d’un livre de David Slater et l’éditeur Blurb afin d’investir dans la réserve d’origine de Naruto.


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