L’association américaine de l’industrie du disque (RIAA) et ses compagnons du monde entier, parmi lesquels le SNEP et la SCPP, nous donnent souvent l’impression de considérer les internautes de la même manière qu’un éleveur de bétail. Ils souhaitent faire entrer les boeufs dans le camion les conduisant à l’abattoir culturel que sont les plateformes payantes légales actuelles. Mais ces boeufs là sont têtus, et sont entrain de renverser le camion, comme le montre une nouvelle étude.

Le groupe NPD dévoilait mercredi 13 octobre les résultats de son étude MusicWatch Digital, qui comme son nom l’indique se concentre sur le marché de la musique numérique. Paré d’un échantillon de 40.000 sondés, le groupe apporte de bien sombres perspectives aux professionnels de la musique en ligne.

En avril 2004, le nombre de consommateurs sur les plateformes américaines dites « légales » comme iTunes Music Store, MusicMatch, Napster ou RealNetworks aurait atteint un sommet de 1,3 million. « Sur les 18 mois qui ont suivi le lancement de iTunes, les services de téléchargement de musique payante ont espéré une énorme montée du nombre de consommateurs qui payent« , rappelle Russ Crupnick, vice-président du groupe NPD. « Cependant, le nombre de ceux qui le font effectivement a décliné jusqu’à environ un million d’utilisateurs par mois« , soit une baisse d’un quart en seulement quelques mois, et ce malgré la multiplication des poursuites, et des plateformes.

Pendant ce temps, selon NPD, le nombre de foyers américains dont au moins un membre utilise un service de P2P pour télécharger de la musique aurait augmenté de 4,6 à 6,7 millions pendant les 12 derniers mois.

Quelle offre payante ?

Ces données sont d’autant plus inquiétantes pour l’industrie du disque qu’elle est actuellement dans une phase où le plus important est de collecter de nouveaux consommateurs, ce qu’elle n’arrive pas du tout à faire. Cependant, doit-on s’en étonner ? Lorsque l’on regarde l’offre payante par rapport aux réseaux P2P, la légalité semble être le seul atout que l’industrie parvient à offrir. Les véritables plaies que sont les systèmes de gestion numérique des droits (DRM) obligent à passer par un logiciel propriétaire pour écouter les morceaux achetés, ils empêchent le consommateur honnête de transférer sa musique où il souhaite, et peuvent constituer une intrusion dans la vie privée des personnes. En outre, aucune des grandes plateformes actuelles ne propose au moins le choix de télécharger le morceau acheté dans un format lossless (sans perdition), alors qu’il pourrait s’agir d’un argument puissant auprès des oreilles fines. Côté catalogue, alors qu’Internet annihile les contraintes d’espace liés à la longueur des étalages et à la profondeur des bacs, il reste souvent impossible aux connaisseurs de trouver les morceaux rares qu’ils parviennent sans grande peine à télécharger sur les réseaux Peer-to-Peer.

Selon le groupe NPD, la chute des plateformes payantes légales est due à une mauvaise stratégie de promotion, trop appuyée sur des alliances évènementionelles ponctuelles dont l’effet s’estompe rapidement (on pense notamment à l’alliance entre iTunes et Pepsi). « Le truc est d’échelonner les promotions, de façon à obtenir un effet positif cumulatif sur la cible du marché« , conseille Crupnick.

Le truc est sûrement davantage de mettre les deux pieds dans le monde numérique interconnecté et d’arrêter de vouloir reproduire les barrières physiques des CD avec des DRM tout autant inefficaces qu’handicapant pour les consommateurs honnêtes. La solution viendra sûrement davantages de services à écoute illimitée, avec une offre étendue aux « back catalogues », et un vrai service de découverte et de partage culturel, et non plus simplement de consommation.

Pour y parvenir, artistes, producteurs et distributeurs devront véritablement s’allier, et user davantage leurs forces à construire ensemble le modèle économique de demain plutôt qu’à porter plainte pour pleurer celui d’hier.

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