La distribution gratuite d’albums chez les grands noms de la musique est décidément dans l’ère du temps. Chaque fois, on y trouve des justifications différentes. Pour Radiohead, il s’agissait vraisemblablement de tenter le gros coup médiatique ; pour Saul Williams, d’envoyer balader ces « esclavagistes » de labels ; pour Barbara Hendricks, de récupérer le contrôle de ses disques ; pour Prince, de diffuser sa musique à autant de monde que possible ; et pour la petite dernière, Tasmin Little, de faire tomber l’image élitiste de la musique classique.
Tasmin Little est une des plus grandes violonistes britannique. Portée au nues par la BBC, elle s’est construite une solide réputation dans le milieu et a joué avec les plus grands orchestres. Pour son nouvel album, « Naked Violin », l’artiste a décidé de l’offrir en téléchargement gratuit dès la semaine prochaine sur son site. « La musique classique, pour une raison ou une autre, se traîne une réputation qui veut qu’il faudrait avoir un certain type d’éducation pour l’écouter, avoir une certaine couleur ou vivre dans un certain lieu, et j’en ai assez de tout ça » explique la violoniste.
C’est bien louable, mais en même temps, est-ce le fait de laisser son album en téléchargement gratuit y changera quelque chose ? C’est plutôt déplacer le paradigme vers un autre endroit. Il arrive souvent que l’on confonde les possibilités d’Internet (à savoir, de pouvoir s’ouvrir à beaucoup de personnes) avec leur application concrète. Wikipedia ne fait pas de chacun de nous des scientifiques chevronnés. Tasmin Little a l’air de croire un peu trop vite qu’on peut réduire au seul prix d’un disque le frein psychologique qui le réduit à un certain type de public. Mais si un genre de musique se distingue particulièrement pour ses bas prix dans le commerce, c’est bien la musique classique ; et ce n’est pas parcequ’un disque d’interprétations de Bach est vendu moins cher que le dernier album de Christophe Mae que le jeune adolescent va modifier son choix pour ce premier.
La musique classique souffre effectivement de l’image qu’elle se coltine. Les opéras, par exemple, redoublent d’efforts pour attirer les non-initiés, et pour cause, son public ne se renouvelle pas, ce qui l’amène petit à petit au déclin. Offrir la musique sur Internet va-t-il changer quelque chose à la donne ? Certains ont en tout cas l’air d’y placer quelques espoirs. Mais les pratiques sociologiques ne se résument pas aux seules possibilités techniques, et ce n’est pas parce que l’on promeut une distribution plus innovante que l’on changera pour autant la face de son public. Notons qu’à l’instar de Radiohead ou Barbara Hendricks, Tasmin Little était une habituée de chez EMI. La major traumatiserait-elle ses artistes au point de les pousser à épouser le gratuit sur Internet ?
L’album de Tasmin Little comporte trois travaux. Deux issus du domaine public (Bach et Eugene Ysaye), et l’autre non (Paul Patterson). Rappelons que domaine public ou non, l’œuvre n’est pas pour autant libre car l’artiste qui en est l’interprète a des droits dessus. |
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