Qui est mieux placé pour parler de droit d’auteur que des créateurs eux-mêmes ? Alors que des organisations font pression pour éviter toute modification substantielle des droits d’auteur sur Internet, la Quadrature du Net a réuni une douzaine de YouTubers français qui expriment leur volonté, en tant que créateurs, de faire évoluer le droit.

Alors que la France descend en flammes le rapport Reda, l’eurodéputée Julia Reda élue avec l’étiquette du Parti Pirate a trouvé un soutien de poids pour défendre son projet de rapport parlementaire, qui appelle à assouplir l’application du droit d’auteur sur Internet : des créateurs. La Quadrature du Net a ainsi mis en ligne lundi une vidéo qui associe une douzaine de Youtubers français parmi les plus populaires du moment (MrAntoineDaniel, Pouhiou NoéNaute, NotaBenemovies, DanyCaligula, La Tronche en Biais, Vled Tapas, Le Fossoyeur de Films , Axolot , DirtyBiology, Code MU, Fujixguru, et Cyrus North).

Tous demandent que le droit d’auteur soit revu et corrigé pour permettre l’exploitation d’extraits audiovisuels, ou d’images d’illustration, sans avoir à obtenir (et à payer) l’autorisation expresse des ayants droits. « Mes créations sont hors-la-loi« , se plaignent-ils tour à tour, en faisant valoir que leurs vidéos dont personne ne peut nier l’originalité impliquent le plus souvent des montages ou des incrustations qui empruntent à des oeuvres créées par d’autres, en toute illégalité :

https://youtube.com/watch?v=h3qk6LpZi6U%3Frel%3D0%26controls%3D0%26showinfo%3D0

Dans un communiqué qui rappelle par ailleurs que le rapport Reda est loin d’être aussi explosif et révolutionnaire qu’aiment à le décrier les organisations d’ayants droits, la Quadrature du Net attire l’attention sur cinq aspects du rapport Reda, que l’association souhaite soutenir plus particulièrement :

  1. « le fait de rendre obligatoire la liste des exceptions figurant dans l’actuelle directive européenne, pour mettre fin aux disparités entre les différentes lois nationales, qui privent trop souvent les citoyens d’un pays des facultés reconnues dans d’autres ;« 
     
  2. « l’introduction de nouvelles exceptions permettant de tirer partie des possibilités ouvertes par le numérique, qu’il s’agisse des nouvelles pratiques créatives (mashup, remix, etc.), de l’exploration de texte et de données pour les chercheurs, du prêt de livres numériques en bibliothèque ou de la liberté de panorama » ;
     
  3. « la reconnaissance et la protection du domaine public, dont l’existence est la garantie que le patrimoine culturel européen reste un vivier dans lequel les artistes pourront puiser librement pour créer à leur tour » ;
     
  4. « la préservation de la faculté de faire des liens hypertexte, condition essentielle au fonctionnement du Web et garantie d’un droit à la référence dans l’environnement numérique » ;
     
  5. « l’affirmation que ces droits d’usage positifs reconnus au bénéfice des individus ne doivent pas être entravés par des mesures techniques de protection et que l’interopérabilité doit être préservée dans toutes les hypothèses.« 

« Comment peut-on taxer d’« extrémisme » de telles propositions, alors qu’elles recoupent très largement celles d’un rapport de la rapporteure spéciale Farida Shaheed remis en janvier dernier à la commission des Droits de l’Homme de l’ONU, appelant les nations à agir par le biais des exceptions au droit d’auteur pour développer le droit à participer activement à la vie culturelle et celui d’accéder à la connaissance ?« , demande la Quadrature.

Le rapport doit être examiné le 16 avril 2015 par la Commission des affaires juridiques (JURI) du Parlement européen, avec une salve d’amendements qui chercheront à en miner la portée. Un vote en séance plénière sera ensuite organisé le 20 mai 2015, pour adopter ou rejeter l’ensemble du rapport ainsi modifié.

La directive inspirée du rapport, quant à elle, ne devrait pas voir le jour avant l’année 2016.

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