Le ministre de l’intérieur Claude Guéant veut de nouveau faire bloquer le site CopWatch, qui avait été bloqué sur décision de justice en octobre 2011. Le site a changé d’adresse pour continuer son activité, et le ministère espère obtenir la collaboration des FAI pour bloquer cette nouvelle URL. Sinon, le ministère se dit prêt à intenter une nouvelle action. Avec une obligation de résultat plus musclée ?

Mise à jour : Comme nous l’avions indiqué, le ministère de l’intérieur va bien demander que l’ensemble des sites miroirs de CopWatch soient bloqués, et que la liste des sites à bloquer puisse être mise à jour sans avoir à passer systématiquement par le juge, sur le modèle de blocage automatisé proposé par TMG. Nos confrères de PC Inpact rapportent en effet que le ministère de l’intérieur, dont la requête est examinée aujourd’hui, demande que l’ordonnance de blocage soit étendue « à tout site nouveau diffusant un contenu identique à celui jugé illicite« . La formulation est suffisamment large pour viser non pas seulement les sites miroirs, mais aussi ceux qui reprendraient les informations communiquées par CopWatch. Un dangereux glissement.

Article du 30 janvier 2012 –

C’est reparti pour un tour. En octobre dernier, le ministre de l’intérieur avait obtenu en référé le blocage du site CopWatch Nord-Paris IDF, sans que celui-ci ait la possibilité de défendre sa légalité face aux arguments parfois contestables du gouvernement. Et pour cause : CopWatch est un site créé de manière anonyme, ce qui interdit par définition à ses créateurs toute possibilité de se présenter au tribunal pour se défendre. Le ministre Claude Guéant avait profité de cette faille pour obtenir que le site soit rendu inaccessible, plutôt que de faire identifier ses auteurs pour les poursuivre en justice, ce qui leur aurait donné la possiilité de présenter leurs arguments (voir les enseignements de l’affaire CopWatch).

Sans surprise, les sites mirroirs se sont multipliés après le jugement pour permettre aux visiteurs de continuer à visiter CopWatch, même si son URL principale était bloquée. Le ministère de l’intérieur s’en était jusque là accomodé.

Mais CopWatch, qui était resté inactif, a repris son activité ces derniers jours sous une URL différente. Le ministère de l’intérieur français a voulu nous interdire. Il a échoué. Aujourd’hui, c’est à nous de lui rendre la donne« , disait un message publié le 24 janvier dernier. « Ces derniers temps, la police nationale a subi une véritable décapitation en règle avec mises en examens, détentions, GAV et contrôles judiciaires de très hauts responsables nationaux et départementaux pour des faits très graves. Bref toute l’armada répressive que ces mêmes individus ont fait appliquer à des milliers de personnes et cela en toute impunité. Malgré cela, Guéant soutient ses troupes, il les encourage dans le vice. Voilà pourquoi, le combat que nous menons est parfaitement justifié. Nous n’aurons aucun compte à rendre et n’arrêterons jamais« , assurait-il.

Depuis, CopWatch Nord-Paris IDF a diffusé de nouvelles vidéos d’interventions policières, en nommant certains des responsables de la police impliqués, ou en dénonçant la communication du syndicat Alliance Police Nationale, « un syndicat à la botte de l’Elysée, prêt à faire le buzz sur n’importe quel fait divers« . Il ne craint pas cependant la contradiction, puisqu’il publie un jour un communiqué qui assure que « Nous NE PUBLIONS absolument PAS de coordonnées personnelles de policiers« , et renvoie le lendemain vers la publication intégrale des données personnelles de 541 policiers fuitées par des Anonymous, dont leur numéro de téléphone.
Vers un blocage automatisé des sites mirroirs ?

Ce retour de CopWatch a réveillé l’agacement des syndicats de policiers et donc de Claude Guéant. Il est « extrêmement grave de mettre cause la sécurité de policiers et de leurs familles au motif de dénonciations dont on ne sait pas sur quoi elles reposent« , a dénoncé le ministre de l’intérieur dans La Voix du Nord. « Un site qui incite à la haine à l’égard des policiers est inacceptable« , dit-il.

Cité par l’AFP, le porte-parole de la place Beauvau, Pierre-Henry Brandet, a dit avoir « pris contact avec les fournisseurs d’accès pour voir comment, sur la base de la décision rendue par la justice en octobre, nous pouvions faire bloquer l’accès à cette nouvelle adresse« . Une nouvelle action en justice devrait être nécessaire, puisque celle rendue par le tribunal des référés cite exclusivement l’ancienne adresse pour le blocage.

La solution pourrait être apportée sur un plateau par les ayants droit dans l’affaire Allostreaming. Les studios de cinéma, qui veulent faire bloquer le site (désormais fermé), ont en effet proposé à la justice que la décision de blocage soit automatiquement mise à jour par TMG, la société nantaise bien connue pour la collecte des adresses IP envoyées à l’Hadopi. TMG traquerait en effet les sites mirroirs et les changements d’URL ou d’adresses IP des sites bloqués, pour envoyer automatiquement aux FAI les nouvelles URL ou IP à bloquer.

On imagine qu’une telle solution pourrait aussi tenter le ministère de l’intérieur. D’autant qu’elle avait été imaginée en concertation avec l’Elysée.

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