Sur Twitter, le candidat de la droite à la présidentielle de 2017 suit plusieurs comptes qui relaient des articles de désinformation ou appellent à la haine religieuse, une pratique interdite par les règles d’utilisation du réseau social.

Sur Twitter,  la règle est bien connue : suivre un compte ou retweeter un tweet n’a pas valeur de soutien ou d’approbation.

Pour autant, on peut légitimement s’interroger sur les raisons qui poussent François Fillon, ancien Premier ministre et potentiel futur président de la République, à suivre des utilisateurs qui enfreignent ouvertement les règles du réseau social en matière d’incitation à la haine ou qui propagent des articles de désinformation.

fillon-twitter

Ainsi, si le candidat conservateur investi par la droite pour l’élection présidentielle de 2017 suit majoritairement des comptes qui le soutiennent pour l’élection — qu’il s’agisse d’élus, de militants, de simples électeurs ou des différentes antennes locales de Sens commun, l’émanation de la Manif pour tous au sein des Républicains — on trouve aussi des utilisateurs étonnants parmi ses 2676 abonnements en date du 29 novembre à 17h45.

À commencer par « 1515 le retour », dont la description de profil est aussi équivoque que son pseudonyme évoquant la bataille de Marignan :

1515-profil

Si le compte semble, à première vue, être un simple fil de messages anodins — les photos des candidates à Miss France 2017, des attaques régulières contre François Hollande et son gouvernement –, on y découvre vite des photos extrêmement violentes. Qu’il s’agisse d’un homme en train de brûler devant son bourreau ou du cadavre d’une victime de lapidation étendu devant une foule nombreuse, le tout accompagné de commentaires racistes :  « On appelle ça une race ??il est temps de les éradiquer », « Une race ça ??? »

« 1515 le retour » publie aussi ouvertement des incitations à la violence contre les musulmans :

1515-tweet

Ce comportement est clairement proscrit dans les conditions d’utilisation de Twitter, au même titre que « les images excessivement violentes »  : « Conduite haineuse : vous ne devez pas directement attaquer ni menacer d’autres personnes, ni inciter à la violence envers elles sur la base des critères suivants : race, origine ethnique, nationalité, orientation sexuelle, sexe, identité sexuelle, appartenance religieuse, âge, handicap ou maladie. »

Quelques tweets plus bas, « 1515 le retour » poursuit cette fois son incitation à la haine sous la forme d’un retweet :

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Le choix de suivre un tel utilisateur est d’autant plus étonnant pour François Fillon que « 1515 le retour » affiche ouvertement son soutien à Marine Le Pen :

1515-mlp

Dans le même esprit, le candidat de la droite figure parmi les abonnés du compte « FFI 75 » (en référence aux Forces françaises intérieures, le groupement de résistance française fondé pendant la Seconde Guerre mondiale).

Sur ce fil de messages, on trouve de nombreux retweets qui relient directement la recrudescence des cas de syphillis en France à l’arrivée des migrants ou appellent à faire « repartir les envahisseurs de là d’où il viennent » avec l’aide des « patriotes »…

Comble de l’ironie, cet électeur de Marine Le Pen retweete même des attaques sur la politique menée par François Fillon en matière d’immigration :
ffi75-tweet

Simple curosité ou tentative de séduire les électeurs du parti frontiste ?

Outre ces comptes ouvertement racistes, François Fillon s’intéresse aussi à des profils particulièrement sensibles à la désinformation, comme la dénommée « louiseait ».

Cette utilisatrice de Twitter, qui soutient les « #ex-muslim» — du nom du mouvement lancé au lendemain des attentats de Paris, en 2015, par des anciens convertis à l’islam qui ont perdu leur foi et tenu à le faire savoir sous ce hashtag  — relaye de nombreux articles mensongers, quand elle ne retweete pas une association d’images entre le Coran et la photo des victimes du Bataclan prise après l’attentat du 13 novembre.

Dernier en date parmi ces fausses actualités : un article en anglais sur la prétendue explosion des violences sexuelles sous le mandat d’Angela Merkel qui relaye des énormités anti-migrants, telles que « la majorité des migrants qui viennent en Europe ont de faibles QI et il a été prouvé à quel point que ces personnes sont faciles à manipuler » ou encore « les violences sexuelles ont atteint des records inédits depuis que cette folle de Merkel a invité plus d’un million de migrants en Allemagne pour qu’ils puissent violer les citoyens et vivre sans le moindre frais ».

Dernièrement, « louiseait » partageait aussi cette statistique prétendument tirée d’une étude de l’ONU (il s’agit en réalité de l’enquête MICS4 de l’Unicef, effectuée en 2012-2013, sur les problématiques de santé en Algérie), publiée sur « L’insoumis », un site militant à « la ligne souverainiste » :

louiseait-extrait2

Enfin, François Fillon figure aussi parmi les abonnés de Krunch.fr, un compte de veille qui se présente comme un robot « de type #ONLR qui sélectionne les infos et tweets pertinents ou révélateurs. » Son hashtag fait référence à « #OnNeLâcheRien », le slogan de ralliement des partisans de la Manif pour tous utilisé pendant leur combat contre le mariage homosexuel en 2013.

Si les affinités de François Fillon avec le mouvement sont bien connues — notamment depuis qu’il est soutenu par Sens commun –, on peut s’étonner qu’il suive un compte retweetant des articles qui laissent pour le moins perplexe. Comme celui, signé d’un site de « lutte contre la pédocriminalité », qui considère le dessin animé Sausage Party comme « un film pornographique pour enfants ».

krunch-sausage-party

Krunch.fr relaye aussi, sur son site — qui se présente comme « une revue de web réactive » et ajoute en guise de défense préventive « #Sélectionner n’est pas #approuver » — des tweets comparant l’avortement à un crime :

krunch-avortement

Marine Le Pen, qui figure pourtant parmi les premières critiques de François Fillon, compte elle-même des profils similaires parmi ses abonnements.

Mise à jour : une première version de l’article affirmait que L’insoumis n’existait plus et que l’étude mentionnée n’existait pas (alors qu’il s’agissait d’une autre étude, mentionnée dans le paragraphe). Nous avons modifié ce paragraphe en conséquence. 

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