Nous recevons et constatons autour de nous, ces derniers jours, un nombre de plus en plus important de témoignages d’internautes ayant reçu un courriel d’avertissement de l’Hadopi. Il semble que la Haute Autorité est bien entrée ces derniers jours ou ces dernières semaines dans son mode de fonctionnement automatisé de la première phase de la riposte graduée, et ne limite plus (ou beaucoup moins) le nombre de saisines qu’elle traite au quotidien. La machine est lancée, au moins pour l’envoi des mails. Selon nos informations, aucun courrier recommandé n’a encore été envoyé (mise à jour : un premier témoignage de recommandé nous est parvenu). Certains ont en revanche déjà reçu deux avertissements par mail.
L’Hadopi est donc à plein régime, mais aussi en roue libre. Les abonnés qui contestent avoir piraté un contenu et qui affirment sécuriser correctement leur accès à Internet n’ont aucun moyen de contester le bienfondé de l’avertissement reçu ou même de vérifier s’il ne s’agit pas d’une erreur. La Haute Autorité refuse de communiquer le PV de constatation de l’infraction aux abonnés, au motif que l’adresse IP relevée ne serait pas une donnée personnelle de l’abonné (sic), et que le PV est une pièce d’un dossier de procédure pénale qui ne peut être délivrée au prévenu qu’en cas de poursuites.
Tant que l’Hadopi ne transmet pas de dossier au juge, ce qui n’arrivera au mieux qu’après envoi d’un recommandé et constat d’une énième récidive, les abonnés avertis ne peuvent pas contester la validité du PV. Ils restent inscrits au fichier de la Haute Autorité, sans possibilité de demander la suppression de l’inscription avant expiration du délai légal. Dans une vision paranoïaque des choses, l’Hadopi pourrait très bien demander l’identification de toutes les adresses IP qu’elle souhaite sans subir jamais aucun contrôle, tant qu’elle n’entre pas dans la dernière phase de la riposte graduée. Ubuesque.
Pourtant, nul ne sait comment sont effectués les relevés d’adresses IP qui servent à établir les PV transmis à l’Hadopi. La CNIL a donné l’autorisation aux ayants droit d’utiliser les services de TMG en notant qu’il n’y a aucun contrôle des procédures suivies, et que « la Hadopi se limitera à accepter ou refuser les constats transmis, sans possibilité de les vérifier ». Certes, l’Hadopi va faire procéder à des « audits objectifs et indépendants« , et s’est elle-même déplacée à Nantes pour visiter les locaux de TMG et observer ses méthodes. Mais il ne s’agit en aucun cas d’une certification technique du système de collecte des preuves. Le système de TMG est excessivement opaque, comme l’est la société elle-même qui selon nos constatations n’a pas déposé ses comptes sociaux depuis 2008 (ce qui constitue en principe une infraction pénale).
Or le risque d’adresses IP transmises par erreur à l’Hadopi n’est pas nul, comme le fait craindre le cas très médiatique des parents de Maxime Rouquet, le candidat du Parti Pirate. Ils ne comprennent pas comment leur adresse IP a pu arriver jusqu’à l’Hadopi, et n’ont aucun moyen de le comprendre alors qu’ils ne téléchargent pas, ne laissent personne télécharger illégalement, et protègent leur accès à Internet avec un chiffrage WPA2 réputé efficace. Aujourd’hui, Maxime Rouquet a même indiqué que ses parents (chez qui il n’habite pas…) avaient reçu un deuxième avertissement par mail, pour des faits remontant 12 heures avant le premier.
Le recours administratif n’est pas non plus possible pour faire annuler le courrier reçu abusivement, si l’on en croit le ministère de la Culture et l’Hadopi, qui partagent l’idée que le premier avertissement ne fait pas grief à l’abonné. Ce qui ne reste qu’un point de vue, tant qu’aucun recours n’aura été tenté qui permette de vérifier effectivement cette interprétation…
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