Le Conseil d’Etat a rendu vendredi dernier une série de trois décisions sur la rémunération pour copie privée, qui annulent des taxes adoptées par la Commission copie privée en 2007 et 2008. La juridiction administrative confirme ainsi sa jurisprudence établie il y a deux ans, lorsqu’elle avait déjà annulé une extension de la taxe, au motif que le montant de la nouvelle rémunération avait été établi sans se soucier de savoir si les copies étaient licites ou illicites.
« La rémunération pour copie privée a pour unique objet de compenser, pour les auteurs, artistes-interprètes et producteurs, la perte de revenus engendrée par l’usage qui est fait licitement et sans qu’ils puissent s’y opposer de copies d’œuvres fixées sur des phonogrammes ou des vidéogrammes à des fins strictement privées« , rappelle le Conseil d’Etat. Dès lors, précise-t-il, « la détermination de la rémunération pour copie privée ne peut prendre en considération que les copies licites réalisées dans les conditions prévues par les articles L. 122-5 et L. 311-1 du code de la propriété intellectuelle précités, et notamment les copies réalisées à partir d’une source acquise licitement« .
Aussi, « en prenant en compte le préjudice subi du fait des copies illicites, la commission, qui a méconnu les dispositions précitées du code de la propriété intellectuelle, a entaché sa décision d’erreur de droit« , tranche le Conseil d’Etat.
Il a donc logiquement décidé d’annuler les trois décisions attaquées. Il s’agit des décisions n°8, n°9 et n°10, qui créaient respectivement des taxes sur les supports d’enregistrement amovibles (cartes mémoire, clés USB, disques dur externe), les disques dur externes multimédia, et les téléphones avec fonction baladeur. Les plaignants étaient le Syndicat de l’Industrie des Technologies de l’Information (SFIC) pour l’ensemble des procédures, auquel se sont joints l’UFC-Que Choisir et Rue du commerce pour la n°8, et le Syndicat des Industries de matériels audiovisuels électroniques (Simavelec) contre la n°10.
Reste qu’en pratique, la décision n’aura absolument aucun effet. Le Conseil d’Etat a décidé que son effet rétroactif ne débuterait qu’à compter de 2009. Or dès la première annulation prononcée en 2008 par le Conseil d’Etat, la Commission copie privée a adopté une décision n°11, qui abrogeait déjà les précédentes, pour ne plus prendre en compte les copies illicites dans le calcul du montant de la taxe. Mais sans changer les montants, grâce à la méthode du doigt mouillé (le majeur).
« La commission a, tout en ayant exclu les copies de source illicite de son appréciation, fixé les taux de rémunération pour copie privée à des niveaux identiques à ceux de la décision attaquée« , constate lui-même le Conseil d’Etat. Il note l’argument des ayants droit, qui assurent que « la prise en compte de l’utilisation des nouvelles capacités d’enregistrement et de stockage qu’offrent les techniques de compression de fichiers pour réaliser des copies licites, qui avait été sous-estimée, compense l’exclusion de la prise en compte des copies illicites« . En clair, au moment de gagner moins d’argent en n’ayant plus la possibilité de se servir de la taxe copie privée pour dédommager le piratage, la Commission a réalisé que la compression des fichiers permettait de réaliser davantage de copies, et a donc maintenu les taux… Peu importe la méthode, seul compte le résultat.
Selon la dernière décision du 14 décembre, la taxe pour copie privée devrait de nouveau augmenter, et s’étendre aux GPS et autoradios.
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