Il n’y a pas qu’en Europe que les pratiques d’optimisation fiscale des géants du Web commencent à chatouiller les tenants des finances publiques. Aux États-Unis, les services fiscaux américains suspectent Facebook d’avoir sous-estimé de plusieurs « milliards de dollars » la valeur de biens immatériels transférés vers l’Irlande, pour y bénéficier d’importantes réductions de son imposition, en fraude.
En conséquence, l’Internal Revenue Service (IRS) a décidé d’assigner Facebook en justice devant un tribunal de San Francisco, pour faire exécuter des demandes de communication de documents qui doivent permettre au fisc américain de confirmer ses soupçons, et d’établir la hauteur de l’éventuel redressement fiscal dont il ferait l’objet.
En l’espèce le montage financier de Facebook est plus complexe encore
Comme la plupart (sinon la totalité) des multinationales, Facebook a établi différentes entités juridiques, et transfère son chiffre d’affaires de l’une à l’autre par des jeux de contrats de prestations qui peuvent permettre, par exemple, que Facebook Irlande facture à sa maison-mère la gestion des affaires européennes du réseau social. Tout ce que Facebook Irlande facture à Facebook Inc. permet à cette dernière de limiter son bénéfice imposable. Or, l’Irlande impose les sociétés avec un taux de 12,5 % des bénéfices, alors que les USA imposent au moins à 35 %. Plus la facture irlandaise est surévaluée, plus le fisc américain est lésé.
Mais en l’espèce le montage financier est plus complexe encore. Facebook Inc. est soupçonné d’avoir sous-évalué le prix facturé à Facebook Ireland Holdings pour l’exploitation des marques et autres propriétés intellectuelles du réseau social en Europe, pour limiter son chiffre d’affaires. Mais derrière, Facebook Ireland Holdings aurait refacturé plus cher ces licences à Facebook Ireland Ltd, le véritable exploitant de Facebook en Irlande. Ainsi Facebook limiterait ses bénéfices aux USA, et les maximiserait en Irlande.
Le réseau social est aussi soupçonné de pratiquer le « double sandwich irlandais », qui lui permet en fait d’échapper même aux 12,5 % en s’appuyant sur un montage avec les Pays-Bas :
Mais le réseau social conteste évidemment toute malversation. « Facebook se conforme à toutes les règles et régulations applications dans les pays où il opère », a confié à l’agence Reuters un porte-parole du réseau social. La formule est toujours la même dans ces cas là et fut par exemple celle employée par Google France après la perquisition spectaculaire menée par le parquet financier de Paris, ou après celle menée en Espagne.
Selon le fisc, c’est le cabinet Ernst & Young qui a établi les valorisations des actifs immatériels et qui aurait sous-estimé la valeur des propriétés intellectuelles de Facebook de plusieurs milliards de dollars. Une information qui pourrait faire du cabinet comptable un complice de fraude fiscale si une faute volontaire était avérée.
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