L’administrateur d’un site francophone proposant en accès libre des liens eDonkey vers des films, MP3, jeux, roms, logiciels et bandes dessinées vient de nous faire part d’un courrier qu’il a reçu le menaçant de poursuites judiciaires. Dans cet e-mail, le SELL (Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisir) exige le retrait immédiat de tous les liens pointant vers des jeux vidéo. Le premier sans doute d’une longue série à venir.

Voici le contenu du courrier reçu par cet administrateur :

Madame, Monsieur,

Le Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisir (ci-après désigné SELL) a été alerté sur le contenu d’un site hébergé par votre société qui porte gravement atteinte aux droits de plusieurs de ses membres.

Le SELL regroupe l’essentiel des éditeurs de logiciels de loisir exerçant une activité sur le territoire français, et son objet est  » la représentation et la défense des intérêts de la profession d’éditeur de logiciels de loisir « . A ce titre, il est notamment chargé de  » participer à la protection et à la défense des droits et intérêts collectifs et professionnels de ses membres en luttant activement contre
le piratage et la contrefaçon  » et  » d’ester en justice pour assurer, dans la mesure permise par les lois et règlements en vigueur et dans la mesure où l’intérêt général de la profession le demande, cette protection et cette défense ou en vue d’obtenir réparation d’atteintes aux intérêts collectifs et professionnels de ses membres ».

La présente notification vous est adressée en tant que contact administratif désigné dans la base de données WHOIS des Réseaux IP Européens (www.ripe.net) comme responsable de HTTP://www.*******

Au vu des informations dont il dispose au 21 Novembre 2003, le SELL a de bonnes raisons de croire que le Site Internet mentionné ci-dessus porte atteinte aux droits d’un ou plusieurs membres du SELL en permettant à ses visiteurs de télécharger via vos liens, une ou plusieurs copies non-autorisées d’un ou plusieurs jeux protégé(s) par des droits d’auteur, dont notamment des jeux P.C

Les copies non-autorisées du/desdits jeux figurant ou mis à disposition sur ce Site sont indiquées et/ou identifiables sur le Site Internet par leur titre, par des variations de leur titre ou par des reproductions d’illustrations (lesdits titres, copies, listings et/ou autres illustrations ou références aux contenus de ces jeux seront ci-après dénommés Eléments illicites). La reproduction ou la distribution
non-autorisée des Eléments illicites sur le Site Internet constitue une violation des droits exclusifs de nos membres sur les titres, contenus et illustrations desdits Eléments illicites protégés par des droits d’auteur et/ou de marque.

Comme vous le savez, de tels actes sont constitutifs de contrefaçon au sens des articles L. 335-2 à L. 335-5 et/ou L. 713-2 et L.713-3 du Code de la Propriété Intellectuelle et punis, à ce titre, de deux ans d’emprisonnement et de 150 000 Euros d’amende.

En foi de quoi, le SELL met en demeure le propriétaire du site et/ou vous-même, en tant que contact administratif désigné comme responsable des éléments hébergés sur le site http://www.*******, de prendre toutes mesures utiles afin de retirer immédiatement les Eléments illicites disponibles sur ou accessibles à partir de cette adresse.

La présente lettre est envoyée sans préjudice de tout droit ou recours
exclusivement conféré au SELL et/ou à l’un quelconque de ses membres en
application des lois nationales et européennes.

En l’absence de réponse de votre part dans un délai de 15 jours à compter de la réception de la présente lettre, le SELL ne manquera pas d’introduire une action en justice afin de mettre un terme au préjudice important subi.

Je vous prie de croire, Madame, Monsieur, à l’assurance de ma considération la meilleure.

Pascal BRISSY
S.E.L.L
Syndicat des éditeurs de logiciels de loisir.

Pour se défendre du droit d’exercice d’un droit à la copie de sauvegarde, le SELL oppose au site une décision du Tribunal de Grande Instance de Valence. Le 2 juin 1999, un juge avait en effet conclu que « la copie de sauvegarde est effectivement nécessaire pour les logiciels livrés sur des supports spécialement vulnérables, c’est-à-dire dont le contenu peut être altéré sans faute de l’utilisateur, tel un programme sur disquette. Tel n’est pas le cas du cédérom qui n’est exposé, comme tout autre bien, qu’aux dommages accidentels ou par manque de soins et non aux risques de dégradation logicielle« . En clair le SELL considère depuis cette décision largement contestable que le CD Rom est un support suffisamment fiable pour ne plus être soumis au droit de copie de sauvegarde prévu par l’article L122-6-1.II du CPI.

Il serait sans doute plus simple et convaincant de dire que la loi ne permet qu’une seule copie par original, et qu’ainsi le téléchargement d’un jeu vidéo constitue au minimum une deuxième copie de sauvegarde, après celle qui figure sur le serveur ou le disque dur de celui qui l’a réalisée. En mettant à disposition un jeu vidéo par un lien eDonkey, les sites permettent activement sa contrefaçon.

Cependant au delà de ces considérations juridiques (dont nous vous invitons à débattre sur notre forum dédié), il est plus inquiétant de voir que le SELL dans ce cas précis a écarté la proposition de l’administrateur du site incriminé, qui consistait à remplacer l’intégralité des liens illégaux par des liens pointant, comme nous le faisons sur Ratiatum, vers les versions gratuites de démonstration. Sans doute par peur de voir l’utilisateur continuer à utiliser les réseaux P2P. Mais messieurs du SELL, les utilisateurs n’en partiront jamais. Il est temps aujourd’hui de faire du Peer-to-Peer votre allié…


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