Le Planetarium poétique d’un quatuor indé vient percuter notre voix lactée. Composé de l’académique Nico Muhly, du membre des Nationals Bryce Dessner, du percussionniste James McAlister et du poète, ménestrel postmoderne, Sufjan Stevens, le groupe livre sa constellation de chansons spatiales.

Présentant à trois voix un projet à huit mains, Stevens, Muhly et Dessner expliquaient hier sous l’œil de la NPR que les étoiles, en leurs mystères, évoquaient plus qu’elles ne confirment.

En cela le Planetarium du quatuor impromptu apparaît comme un album de voyages fictifs, des grandes histoires dans lesquelles se glissent mille visions, plutôt qu’un exercice de mise en musique du système solaire.

Pour Muhly, qui sort de la réserve que ses ballets imposent, il y a dans ce véritable space opera de quatre rêveurs à bord d’un disque stellaire, de nombreuses images de l’astrologie. D’avantage divinatoire que scientifique, le planétarium de ces quatre marginaux rappelle davantage les Planets de Holst, et leur mythologie orchestrale, qu’une mission de Curiosity.

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Stevens, qui revient là dans un projet collectif après le succès mitigé de son Sisyphus, a écrit l’intégralité des textes qui portent l’épique travail d’arrangements et de composition qui fait matière autour de la voix, cristalline et perçante, du petit prince de la folk. On y évoque le secret, le désir, l’angoisse et la quête d’un ordre spirituel impossible.

Innocence was never lost
Though it may have been insulted

Dans une confrontation permanente avec la grandeur de l’espace, Stevens chante la misère humaine qui, vue des étoiles, semble être un immense mess pour les fucked-up. On appelle à la rescousse la solitaire Jupiter, on pleure l’inépuisable instinct de destruction des Terriens, et on plonge, survolant des arrangements solides, dans un monde où la divination astrologique raconte nos échecs.

Originalement écrit et composé pour une tournée, le Planetarium se voit dans sa version orchestrée complété de délicates attentions minimalistes durant lesquelles on rencontre le Muhly que l’on a connu auprès de Philip Glass et Björk. Ainsi, alors que la chanson fleuve Earth, aux motifs très Stevens, perturbe la mise en orbite musicale d’une première partie patiente et perfectionniste, Black Energy, inédit, porte un dépouillement, apaisant et inspiré, durant lequel on pense à Tangerine Dream et Eno. Dessner, gros apologue de la grâce par le rock, apporte le très bon jeu de cordes qui transforme une Pluto ou Mercury en un méticuleux trip prog, loin des trombones de sa version live.

Before we arrive
Run, mission, run

Saisissant par ses explorations, son éclectisme et ses oscillation entre ambient et électro-pop baroque (Mars et sa langueur R’n’B), le Planetarium de ces quatre astrologues est à écouter, fort, en regardant fixement un ciel dans lequel n’apparaît jamais les réponses de nos angoisses. Car c’est bien de cette absence, de ce silence spatial, qu’il est question ici.

Trouver des échos dans un ciel qui n’en donne pas… Voilà tout le défi de ce Planetarium.

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Planetarium est disponible depuis ce vendredi, en LP, CD et streaming chez 4AD (Beggars France)

Sufjan Stevens, Bryce Dessner, Nico Muhly et James McAlister seront en concert à la Philarmonie pour le Off Festival ce 10 juillet, à Paris.

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