Des détenus de la prison des Baumettes, à Marseille, avaient alimenté une page Facebook avec des selfies qui les montraient en possession des stupéfiants, de liasses de billets ou de téléphones portables.

La direction interrégionale de l’administration pénitentiaire a ouvert lundi une enquête administrative et judiciaire après la publication dans La Provence d’un article révélant l’existence d’une page Facebook créée avant les fêtes de Noël, baptisée « MDR o Baumettes ». Avec 4 800 « j’aime » jusqu’à sa fermeture le 31 décembre, la page montrait des prisonniers de Marseille tout sourire, fiers de se montrer avec des téléphones portables, des liasses de billets de 50 euros, du cannabis ou de la chicha, ou encore avec leur téléviseur donnant accès à Canal+ pour seulement 9 euros par mois et par cellule, ce qui est beaucoup moins cher que l’abonnement payé hors de prison.

Selon La Provence, la direction des services pénitentiaire a fait fermer la page après en avoir eu connaissance. Cependant Le Monde indique que la page aurait été fermée de lui-même par l’auteur, encore non identifié. « Selon Philippe Perron, le directeur de l’administration pénitentiaire de Marseille, la page a été publiée de « l’extérieur » de la prison, avec des clichés « remontés de l’établissement ». Son auteur, qui n’a pas encore été identifié, a retiré la page dès que « ça a commencé à se savoir »« , rapporte le quotidien.

Les syndicats de surveillants de prisons, qui voient dans cette page la preuve que l’incarcération n’est pas vécue comme une peine mais comme « un centre de vacances« , profitent également du scandale pour dénoncer la difficulté croissante qu’ils ont à faire appliquer la loi dans l’établissement. « Le problème c’est que nous ne sommes plus assez nombreux, nous le répétons depuis des années. Ils n’ont plus peur de rien, et nous, nous n’avons pas les moyens de lutter. Cette page n’a rien de valorisant pour nous, pour le travail fait chaque jour par les surveillants, mais c’est un fait, les détenus sont livrés à eux-mêmes« , déplore ainsi David Cucchietti, le secrétaire local de la CGT.

Les prisonniers prenaient eux-mêmes les photos qu’ils envoyaient à leurs contacts extérieurs. Même si théoriquement les prisons peuvent brouiller les signaux des téléphones, et son équipées de brouilleurs, en pratique le laisser-faire semble parfois vécu comme un moyen d’acheter une forme de paix sociale à l’intérieur des prisons. En 2012, Youssouf Fofana avait ainsi fait scandale en publiant sur YouTube des vidéos qu’il avait lui-même tournées depuis sa cellule. En 2008, des prisonniers de Fleury-Mérogis avaient utilisé le même média pour, cette fois, dénoncer leurs conditions de détention :

https://youtube.com/watch?v=rO6fUtmDjqY%3Frel%3D0%26controls%3D0%26showinfo%3D0

Aux Baumettes, les syndicats dénoncent en particulier l’article 57 de la loi pénitentiaire de 2009, imposé par le respect des droits de l’homme, qui dispose que « les fouilles doivent être justifiées par la présomption d’une infraction ou par les risques que le comportement des personnes détenues fait courir« . Elle interdit les « investigations corporelles internes », c’est-à-dire les fouilles anales, « sauf impératif spécialement motivé« , et oblige alors à ce qu’elles soient réalisées par un médecin extérieur à la prison. 

Ils se plaignent également qu’aucune fouille générale du centre pénitentiaire de Marseille n’ait été réalisée depuis plusieurs années, pour des raisons budgétaires, et surtout du manque d’agents de surveillance, avec actuellement une soixantaine d’agents pour 1800 détenus.

La direction de l’administration pénitentiaire de Marseille précise que des fouilles sectorielles ont permis de retrouver une partie des objets visibles sur les photographies. Selon La Provence, « les détenus reconnaissables sur la page Facebook, et qui pour la plupart travaillaient, ont perdu leurs petits jobs et ont été changés de bâtiment« .

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