L'arrivée de Manuel Valls à la tête du Gouvernement signe-t-elle la mort du projet de loi Création préparé par la ministre de la Culture Aurélie Filippetti ?

Comme à chaque remaniement ministériel, la question du devenir des projets de loi préparés dans les cabinets se pose avec l'arrivée ce mardi à Matignon de Manuel Valls, et la composition d'une nouvelle équipe gouvernementale. A cet égard, l'avenir du projet de loi Création préparé par Aurélie Filippetti — dont on ne sait pas encore si elle reste rue de Valois — se dessine en pointillés. L'adoption du texte qui prévoit de faire pire qu'Hadopi avec le CSA était déjà un parcours semé d'embûches, et la voie ne s'est pas dégagée. Bien au contraire.

Loin d'être soudée derrière le Gouvernement, la majorité l'est moins encore depuis les résultats catastrophiques des élections municipales et la nomination à Matignon d'un homme minoritaire dans son propre camp. Or beaucoup de députés socialistes gardent en mémoire les débats sur la loi Hadopi et savent que le sujet est sensible chez une partie influente de l'électorat. Ils n'ont aucun empressement à rouvrir le dossier, qui pourrait les obliger à mettre à jour une incohérence entre leur opposition ferme d'hier à la riposte graduée, et leur éventuelle adoption d'un texte qui la préserverait en la confiant au CSA. Plus que jamais, la crainte d'une fronde parlementaire est vive.

De plus, le projet de loi Création d'Aurélie Filippetti est composé de multiples volets, dont l'un qui s'annonce déjà explosif sur l'encadrement juridique des spectacles amateurs. En début d'année, avant même que le texte soit publié (il ne l'est toujours pas), la ministre de la Culture avait dû combattre des rumeurs sur une prétendue "mise à mort" du Puy du Fou. De bonne foi ou non, il faudra de l'énergie et du courage pour expliquer l'intérêt du texte lorsqu'il sera présenté au Parlement.

Or c'est là un autre obstacle. Le calendrier parlementaire était déjà très chargé, au point que personne n'imaginait sérieusement que le projet de loi Création puisse être débattu avant la fin de cette année. Mais l'arrivée de Manuel Valls à la tête du Gouvernement promet de rendre la tâche plus ardue encore. Imitant le style de Nicolas Sarkozy, le nouveau premier ministre aura à coeur de montrer qu'il prend à bras le corps les réformes, et de multiplier les annonces sur les fronts qui sont les plus importants aux yeux des Français : la sécurité, l'emploi, le pouvoir d'achat, la fiscalité.

Manuel Valls, opposant à l'Hadopi

Dans ce contexte, le transfert de l'Hadopi au CSA pourrait paraître très secondaire au chef du Gouvernement, même s'il pourrait voir l'intérêt de confier au CSA une régulation du web, en bon partisan de la censure sans juge.

Lorsqu'il était candidat aux primaires, Manuel Valls s'était opposé très clairement à l'Hadopi et à la riposte graduée. "Je n'ai jamais tergiversé sur l'abrogation nécessaire de cette loi qui induit la répression, soldée par une sanction pénale, administrative et financière", avait-il déclaré sur son site de campagne (qui a aujourd'hui disparu). Dès 2008, M. Valls avait été parmi les premiers Socialistes à lancer un appel contre Hadopi.

Pendant les primaires, Manuel Valls s'était opposé à François Hollande en défendant un autre système, celui de la contribution créative, c'est-à-dire d'une légalisation des échanges financée par la taxation des FAI au profit des créateurs.

Néanmoins, Manuel Valls avait aussi écrit dans la même tribune que "le téléchargement illégal est répréhensible". Une manière de se laisser toujours une porte ouverte. Et quoi qu'il en soit, le premier ministre se devra d'appliquer la politique décidée par François Hollande, lequel n'a pas fait mystère de sa volonté de préserver les fondamentaux de la loi Hadopi en réalisant un simple tour de passe-passe politique.

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