Lors du débat sur le mariage pour tous, les députés ont rejeté les amendements proposant que les sites internet qui proposent d'aider à trouver des mères porteuses soient condamnés à 5 000 euros d'amende. Les instruments juridiques existent déjà dans la loi, avec des peines plus sévères, pour condamner ces sites. Mais il ne semble y avoir aucune volonté de les mettre en oeuvre.

Dimanche, dans le cadre du débat houleux sur l'ouverture du mariage aux personnes de même sexe, l'Assemblée Nationale a rejeté les amendements proposés par différents députés UMP, qui souhaitaient condamner les sites internet qui facilitent la gestation pour autrui (GPA) à une amende de 5 000 euros. Selon le rapporteur socialiste Erwann Binet, les dispositions légales existent déjà dans le code pénal pour sanctionner les éditeurs de tels sites internet.

"On ne peut pas, d’un côté, dire qu’on ne veut pas de la GPA et, de l’autre, accepter sans rien faire que des sites Internet promeuvent cette pratique", avait défendu en séance le député Hervé Mariton. Xavier Breton, le secondant, avait lui aussi prévenu contre les "risques de marchandisation de la procréation, une dérive que l’on constate à l’étranger par l’intermédiaire de l’assistance médicale à la procréation ou la gestation pour autrui, mais vers laquelle tendent déjà, dans notre pays, certains moyens d’information, notamment des sites Internet". "Il faut prendre le mal à la racine", avait-il conseillé.

Mais c'est le député UMP Marc Le Fur qui aura eu l'argumentaire le plus dur. "Je vous invite, les uns et les autres, à aller voir ce qui est proposé sur le net, non seulement sur les sites étrangers, mais aussi sur les sites français, car c’est terriblement inquiétant", a-t-il détaillé. "On nous propose des enfants en solde : le coût normal est de 12 000 euros mais la promotion fait baisser le prix à 9 900 euros. On nous propose des enfants pour lesquels sont prévus un coût de gestation et un coût d’avortement, dans l’hypothèse où le projet parental serait interrompu ; voilà ce qui figure sur le net ! On nous propose sur le net la possibilité d’exiger un donneur aux yeux clairs et aux cheveux blonds. On nous propose sur le net des options singulières, en particulier que la personne soit de religion islamique. Des critères qui ne figurent plus dans les fichiers de police sont présents aujourd’hui sur le net ! Voilà ce que vous tolérez et que nous avons trop toléré".

5 000 euros d'amende ? "Ce n'est pas du niveau"

Mais en réponse, le rapporteur socialiste Erwann Binet s'est moqué des accents catastrophistes de l'UMP sur ce sujet. "Et vous ne punissez ces pratiques que de 5 000 euros d’amende ?", s'est-il interrogé. "Ce n'est pas du niveau".

La garde des sceaux Christiane Taubira a-t-elle aussi employé le même ton ironique pour faire remarquer que "vous soutenez que l’affaire est grave, qu’il y a péril en la demeure, que l’humanité est menacée, que l’apocalypse est à notre porte"… et "vous proposez de punir ceux qui contribuent à de tels actes de 5 000 euros d’amende ?".

"Je trouve scandaleux, incroyable que vous refusiez ces amendements sous prétexte qu’ils ne vont pas assez loin", s'étranglera Pierre Lequiller (UMP). 

Mais selon Erwann Binet, c'est surtout que la loi prévoit déjà, au moins dans ses principes, la possibilité de sanctionner de tels sites internet. "La provocation à l’abandon d’enfant est punie de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende", a-t-il rappelé en citant l'article 227-12 du code pénal. Et "l’entremise lucrative entre une personne désireuse d’adopter un enfant et un parent désireux d’abandonner son enfant est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende".

Mais dimanche, la garde des sceaux n'a pas elle-même rappelé l'existence de cet article du code pénal, et n'a donc pas fait connaître sa volonté de le faire appliquer. Signe, diront certains, que le Gouvernement souhaite tolérer la GPA réalisée à l'étranger, à défaut de l'autoriser et de l'encadrer en France.

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