L’Union européenne doit installer un cadre juridique et éthique applicable aux robots de façon à pouvoir accompagner et contrôler leur montée en puissance aussi bien dans le secteur économique que dans d’autres pans de la société. C’est le sens du vote que le Parlement européen a exprimé jeudi 16 février à l’occasion de l’examen d’une résolution examinée en session plénière.
La résolution, adoptée à une très large majorité (396 voix pour 123 voix contre et 85 abstentions), demande à la Commission européenne « de proposer des règles sur la robotique et l’intelligence artificielle (IA), en vue d’exploiter pleinement leur potentiel économique et de garantir un niveau standard de sûreté et de sécurité », alors que des inquiétudes existent au sujet de ces technologies.
De la question des données personnelles à la place croissante prise par les robots et l’IA dans le monde du travail, en passant par les enjeux de souveraineté et l’évolution imprévisible de ces technologies, les progrès dans ce domaine ouvrent en effet un certain nombre d’interrogations que les eurodéputés souhaitent régler au niveau communautaire avec un socle législatif commun.
D’autant qu’il y a une course contre la montre : « des normes réglementaires pour les robots sont envisagées dans plusieurs pays », relèvent les parlementaires. Si l’Union ne veut pas se voir imposer des normes venues d’ailleurs, il lui faut fixer les siennes sans tarder. Cela aura le double avantage de protéger les choix du continent tout en poussant les autres pays à s’inspirer, peut-être, des orientations européennes.
À ce sujet, la Commission européenne paraît être sur la même longueur d’onde. Lors d’un séminaire presse organisé à Bruxelles la semaine dernière, Roberto Viola, le directeur général du DG Connect (direction générale des réseaux de communication, du contenu et des technologies), indiquait qu’il serait souhaitable de protéger et diffuser les valeurs de l’Union via une norme commune.
Les eurodéputés proposent donc « un code de conduite éthique volontaire sur la robotique pour les chercheurs et les concepteurs. L’objectif est de garantir qu’ils opèrent conformément aux normes juridiques et d’éthique et que la conception et l’utilisation des robots respectent la dignité humaine ».
Garantir que les robots opèrent conformément aux normes juridiques et d’éthique et qu’ils respectent la dignité humaine
Ils demandent aussi d’étudier la possibilité de créer un statut juridique spécial pour les robots, « afin de clarifier la responsabilité en cas de dommages », et la mise en place « d’un système d’assurance obligatoire et d’un fonds supplémentaire pour garantir le dédommagement total des victimes en cas d’accidents », notamment ceux causés par les voitures autonomes.
Ces pistes de réflexion vous sont peut-être familières. Rien d’étonnant : elles figurent dans le rapport de Mady Delvaux-Stehres, députée luxembourgeoise (S&D), qui explore ces questions (faut-il faire des robots des « personnes électroniques » reconnues et assurées ? Faut-il qu’ils paient des cotisations sociales ? Doit-on leur reconnaître un droit d’auteur ?).
Par ailleurs, « les députés exhortent la Commission à envisager la création d’une agence européenne pour la robotique et l’IA, afin de fournir aux autorités publiques une expertise technique, éthique et réglementaire » et, plus généralement, ils demandent à Bruxelles « de suivre ces tendances de près ». Ce que la Commission fait déjà, dixit Roberto Viola lors du séminaire presse.
En revanche, l’éventualité d’une taxe sur la valeur produite par les robots qui servirait à financer la protection sociale alors que les emplois tenus par des humains seraient de plus en plus confiés à des machines n’a pas été retenue. La faute à l’aile droite du parlement européen, selon la rapporteure, Mady Delvaux-Stehres, qui a regretté le refus d’ouvrir un débat là-dessus.
« Bien que je me félicite que le Parlement ait adopté mon rapport sur la robotique, je suis également déçue que la coalition de droite […] ait refusé de tenir compte des éventuelles conséquences négatives sur le marché du travail. Ils ont rejeté un débat général et ouvert, et ont ainsi négligé les craintes de nos citoyens », a-t-elle déclaré à l’issue du vote de ses collègues.
La question du revenu de base a aussi été écartée par les parlementaires, alors qu’il s’agit d’une piste qui prend de plus en plus d’ampleur pour résoudre la montée en puissance de la robotique dans l’économie et donc, par conséquent, la raréfaction du travail. Ce sujet, Benoît Hamon, candidat socialiste à l’élection présidentielle, en a fait l’un de ses principaux thèmes de campagne.
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