Le plus important nœud d’échange européen, DE-CIX, engage une action juridique pour obliger l’Allemagne à clarifier le cadre légal des interceptions que lui demandent les services secrets.

Souvenez-vous, c’était en 2013.  À quelques semaines du début de l’été, les médias du monde entier commençaient à publier des informations très compromettantes sur le programme d’espionnage de masse mis en place par la NSA, sur la base des documents extraits par un certain Edward Snowden lorsqu’il était encore en poste au sein de l’une des agences de renseignement les plus plus secrètes aux États-Unis.

Parmi les très nombreux papiers diffusés à l’époque, quelques-uns ont mis en lumière l’implication de certains services étrangers dans ce tentaculaire système de surveillance électronique, dont le BND, qui est le service fédéral de renseignement outre-Rhin. Pour faire simple, il remplit peu ou prou les mêmes missions que la DGSE. Or en Allemagne, cette coopération passe difficilement.

Les services secrets vont-ils trop loin ?

La preuve : le Deutscher Commercial Internet Exchange (DE-CIX), qui s’avère être le point d’échange Internet (IXP) le plus important d’Europe en volume, a décidé de se montrer plus offensif contre l’exécutif allemand. La compagnie tient à challenger l’État sur le plan juridique afin de vérifier la validité des requêtes que lui soumet le BND. Pour ce faire, la société, sise à Francfort, a déposé plainte.

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Crédits : DE-CIX

Pour asseoir le sérieux de son action devant les tribunaux, DE-CIX s’appuie sur une forte autorité juridique, dont l’autorité n’est plus à construire, à savoir l’ancien président du tribunal constitutionnel fédéral, Hans-Jürgen Papier. Celui-ci s’est illustré avec une publication dans laquelle il conclut à l’illégalité de la surveillance mise en œuvre par la BND.

DE-CIX est un nœud stratégique dans le réseau Internet. Il peut faire face à un pic de trafic supérieur à 5 To/s de données à relayer auprès de 800 partenaires à travers le monde, qu’il s’agisse de fournisseurs d’accès à Internet, de transitaires, d’hébergeurs et autres réseaux de diffusion de contenu (CDN). Avec plus de 60 pays desservis un peu partout autour du monde et 11 implantations dans le monde (dont Marseille) DE-CIX intéresse forcément beaucoup de monde.

« Avec cette plainte, nous demandons une clarification judiciaire et, en particulier, une sécurité juridique pour nos clients et notre compagnie », écrit DE-CIX, qui ne manque pas d’insister sur le fait qu’elle a « de sérieux doutes quant à la légalité de la pratique actuelle ». L’affaire est maintenant entre les mains du tribunal administratif fédéral à Leipzig.

En 2013, une enquête du Spiegel notait que la loi autoriserait le BND à collecter et analyser jusqu’à 20 % du trafic passant par le point d’échange Internet mis en place par DE-CIX. Des centaines de milliers de courriers électroniques ont ainsi été passés en revue l’année qui a précédé la publication de ce papier. Comme nous le disions alors, quand un usager utilise Skype, envoie un mail ou visite un site, les chances que son trafic passe par DE-CIX sont élevées.

 Avec cette plainte, nous demandons une clarification et une sécurité juridiques
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