Lors de l’examen du projet de loi de réforme constitutionnelle dit de « protection de la Nation », le Sénat ne s’est pas contenté d’enterrer de facto l’article 2 sur la déchéance de nationalité, qui a tant et trop fait gloser (trop, car très anecdotique). Les sénateurs ont aussi, et c’est le plus heureux, totalement réécrit l’article 1er relatif à l’état d’urgence, dont nous avions expliqué toute la perversité étonnamment négligée par la presse.
L’ambition gouvernementale était d’inscrire l’état d’urgence dans la Constitution pour avoir au maximum les mains libres dans les mesures de police qui pourraient être décrétées (lesquelles, rappelons-le, concernent aussi Internet et sont parfois déclarées tardivement contraires à la Constitution).
Le texte adopté par les députés était lacunaire, et se contentait de dire que « la loi fixe les mesures de police administrative que les autorités civiles peuvent prendre », sans fixer aucune borne. Or s’agissant d’un régime spécial prévu dans la Constitution, le risque était grand que les autres articles du texte constitutionnel censés garantir le respect des droits fondamentaux en temps normal soient neutralisés. Le gouvernement — non pas seulement l’actuel mais aussi ceux que l’avenir réserve —, aurait quasiment eu tout pouvoir de police. C’était d’ailleurs l’un des motifs d’inquiétude exprimés dans son avis par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH).
Mais le texte modifié par le Sénat à l’initiative du rapporteur Philippe Bas (LR) limite un peu les risques. En tout cas, il ne désarme plus totalement le Conseil constitutionnel. En effet, l’article 1er amendé prévoit désormais que « les mesures de police administrative pouvant être prises par les autorités civiles [pendant l’état d’urgence] sont strictement adaptées, nécessaires et proportionnées ». Et il ajoute qu’une « loi organique détermine les conditions d’application du présent article ».
En d’autres termes, le Sénat redonne au Parlement le pouvoir de décider des mesures qui pourront être prises, et donne au Conseil constitutionnel et au Conseil d’État la possibilité de les censurer si elles ne sont pas « adaptées, nécessaires et proportionnées », ce qui correspond peu ou prou aux critères généraux dégagés par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour apprécier la validité de dérogations aux droits fondamentaux.
Le pire est évité.
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