Mise à jour : Les chiffres de Gfk sont en fait « extrapolés » d’après une base mensuelle. La multiplication par 12 citée par le responsable du cabinet permet d’obtenir un chiffre sur l’année, basée sur les déclarations des internautes pour le mois dernier. Contrairement à ce que nous écrivions, ça n’est donc pas donc le total annuel qui était multiplié par douze. Le coefficient qui permet à Gfk d’extrapoler les résultats n’a pas été communiqué.

Nous vous révélions mercredi que dans le cadre de sa campagne de propagande en faveur de la loi Création et Internet, le ministère de la Culture a commencé une grande campagne de spam à destination des internautes. Contrairement à ce que nous écrivions, elle ne semble pas illégale. Comme nous le faisait remarquer un lecteur perspicace dans les commentaires, seuls les messages non sollicités à vocation commerciale sont condamnés par la loi. Les messages de nature politique quels qu’ils soient sont exonérés par omission. « C’est une faille connue de la LCEN qui fut critiquée au moment des débats parlementaires, qui laisse un vide juridique pour tout le spam non commercial« , nous rappelait ainsi DickJury (merci à lui).

En revanche, nous avions pointé un autre problème, non pas juridique, mais éthique. Dans son message, le ministère de la Culture affirmait sans précaution qu’en France, « 450.000 films sont piratés chaque jour« , que « plus d’un milliard de fichiers piratés sont échangés chaque année » et que « 1 nouveau talent sur 5 ne peut être produit« . D’où proviennent ces chiffres ?

Il ne s’agit pas d’études issues des services du ministère ou, mieux, d’études indépendantes, mais d’études financées puis communiquées par les lobbys culturels dans le cadre de leur propre propagande en faveur de la loi antipiratage. Le chiffre de 450.000 films piratés par jour provient de l’Association de Lutte contre le Piratage Audiovisuel (ALPA), qui rassemble les grands studios de cinéma. Celui de 1 nouveau talent sur 5 qui ne peut pas être produit provient du SNEP, qui défend les intérêts des quatre majors. Tandis que le chiffre de 1 milliard de fichiers piratés par an provient d’une étude réalisée par Gfk avec comme donneurs d’ordres les éditeurs de vidéos et les maisons de disques. Elle concluait que 833 280 000 titres de musique, et 235 200 000 titres de vidéo auraient ainsi été piratés en 2007.

Or Le Monde a interrogé Laurent Donzel, le responsable de Gfk. Ses précisions sont effarantes : « On fait appel à la mémoire de l’intéressé, et les interviewés minimisent souvent le poids réel du téléchargement. Ils ne veulent pas l’avouer. Pour compenser, on extrapole et on multiplie les résultats par douze« .

Et pourquoi pas pas par quarante, ou trois cents ? Il faut pas être timide.


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