Exit le budget mirobolant des premiers épisodes, Netflix a recalibré la deuxième partie de The Get Down. Le soap somptueux et dansant que nous avions découvert l’été dernier se transforme en un joyeux foutoir qui perd beaucoup de ses qualités intrinsèques et sembler errer à la recherche de son identité.

En 2016, The Get Down était la parfaite pastille estivale qui nous replongeait avec joie et ferveur dans le monde de la musique afro-américaine des années 1970.

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Misty Holloway, pastiche d’une Donna Summer au sommet de sa gloire

Plus chorégraphié qu’un ballet, chaque épisode déroulait sans accrocs une insipide histoire de jeunes gens fiévreux à l’idée de changer le monde par la musique, le tout avec l’élégance dont le réalisateur australien Baz Luhrmann est capable ainsi qu’une érudition évidente. Et malgré des grosses faiblesses d’écriture, la magie cinématographique l’emportait et nous faisait taper du pied au rythme des scratchs.

Les lacunes de l’introduction plombent la suite

Les personnages sauvés par un excellent casting manquaient malgré tout d’intérêt : creusés à la truelle, ils avaient tous un rôle très caricatural complètement assumé mais forcément annonciateur d’une faiblesse pour la série sur le long terme. Une faiblesse qui se dévoile avec cette deuxième partie où nos Get Down Brothers, représentés comme des Jackson 5 — un clin d’œil classe — s’enferment dans leur rôle sans aspérité.

https://youtu.be/Rw8nldFzpiQ

Ezekiel cultive une ambiguïté feinte sur ses véritables ambitions : Manhattan ou le Bronx ? Les deux peut-être ? Forcément, la caste new-yorkaise le rejette pour ses origines en feignant de l’accepter. Emballé, pesé, l’arc narratif n’ira pas plus loin alors qu’il tente d’ouvrir entre Mylene et Zeke — le couple star du show — un dilemme et un triangle amoureux qui s’épuisera aussi vite qu’il a débuté. Dommage.

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Idem pour Shaolin qui continue de filer son rôle de bad guy/good DJ. Lumineux aux platines, ténébreux en affaires, l’unique représentant d’un rap forgé à l’argent sale sombre dans un tableau gothique peu concluant. L’arc narratif s’essouffle avant même de s’approcher d’un dénouement.

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Les deux personnages presque sauvés par ce nouveau scénario sont Mylene et Dizee. Même si leurs évolutions étaient largement prévisibles : Mylene doit choisir entre l’Église et le disco, et Dizee entre la rue et son extrême singularité (pouvons nous dire sensibilité ?).

Mais même avec ces deux-là, l’écriture est faiblarde et ne sort pas le show de son indéniable mécanisme de soap. Le père pasteur de Mylene se dévoile en grand méchant — pas plus, pas moins, tant pis pour la nuance — et la confusion sexuelle de Dizee est gentiment effleurée lorsqu’il se représente en alien, hors du monde des hommes, proche de celui des sentiments (pour un homme). Toutefois, cette errance affective pourrait avoir beaucoup d’intérêt si elle n’était pas limitée à un effet de style — le garçon est toujours défoncé et ne parle jamais.

Disco queen !

Disco queen !

Ce travail sur l’identité de Dizee avait offert l’une des plus incroyables séquences de la partie une, lorsqu’il se retrouvait au cœur de l’émergence de la culture queer afro-américaine en se rendant dans une club pré-ballroom. Elle n’offre dans cette partie que quelques digressions peu astucieuses.

Multiplier les formats sans trouver de forme

Du côté de la réalisation, le budget a été recadré et le spectateur aura du mal à se laisser duper par les effets de style qui tentent de masquer cette réalité. Par exemple, l’introduction de scènes d’animation, façon comic de la blaxploit’, est réjouissante durant le premier épisode — le mélange de Marvel et des Jackson 5 sent le cool à plein nez. Mais il faut vite se résoudre à l’évidence : la technique n’a pas d’objectif narratif particulier à part d’éviter des reshoots et des scènes coûteuses en live action.

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Derrière ces séquences animées, on trouve la voix de Dizee qui devient le second narrateur du show — en plus de Zeke adulte en concert — mais les deux narrateurs se répètent, sans se compléter, et le point de vue de Dizee n’apporte aucune subjectivité.

Ceux qui avaient apprécié, comme nous, l’érudition de la série ne seront pas déçus de ce côté là par les nouveaux épisode : on y croise pêle-mêle Diana Ross, The Wiz — Come on, ease on down, ease on down the road ! –, Cabaret, Spike Lee, Star Wars, Rocky, les Bee Gees, Travolta, Abba, le Soul Train, et bien sûr Donna Summer (renommée ici Misty Holloway) dont le tournant I feel love est rejoué avec malice.

Mais cette foule de clins d’œil, de références qui font mouche, reste réservée aux passionnés de cette période. Or s’ils sont — je l’espère — nombreux, nous doutons qu’ils suffisent à The Get Down pour se trouver un filon fructueux.

Heureusement, le format très court de cette partie deux n’épuise pas et la bande-son garde sa force fédératrice tandis que le rap de nos personnages s’améliore grandement. Le tout lèvera de leur fauteuil les Travolta en herbes.  Moins beau que la première partie, moins spectaculaire et plus désarticulé, ce second volet déçoit toutefois sans réjouir outre mesure.

Le verdict

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6/10

The Get Down, Partie 2

Si une chose reste inchangée entre les parties une et deux de The Get Down, c'est bien son ancrage en dehors des formats, des traditions et des règles. Jouant toutes les cartes de cette richesse, la série oscille entre diverses expérimentations qui rajeunissent son sujet comme son écriture.

Mais une fois passée la beauté manifeste du projet, son élégance et ses références magiques, cette seconde partie offre une narration peu inspirée, où aucun arc ne parvient à sortir du lot tandis que les personnages se confortent dans leur rôle tout tracé. Plus soap que jamais,The Get Down est bien plus un plaisir visuel et musical qu'une série palpitante et bien menée. 

Ailleurs dans la presse

  • Les Inrocks : « Ces nouveaux chapitres de l’histoire de The Get Down ont été écrits et fabriqués dans la foulée des premiers, avec la même sueur et la même joie, cela se voit à tous les instants. »
  • IndieWire : « This kind of drama demands a strong, singular voice to tie together the many artistic forms coming together to tell this story, and Part 2 feels ever so slightly lacking in Luhrmann’s touch. »
  • Vulture : « There’s a goofily miraculous quality to moments like this [when the Get Down Brothers are performing], and even when the show got tangled in a subplot spiderweb, it still managed to produce five or six in each episode. »
Source : Montage Numerama

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