La copie privée a été au centre de nombreuses discussions parlementaires lors de l’examen du projet de loi sur le droit d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information. L’opposition, qui a tenté sans succès de préserver un droit à la copie privée sur les téléchargements, a explicitement appelé à la suppression d’une taxe aujourd’hui largement fondée sur des pratiques que la loi juge illégale et condamne par des contraventions. En France, le montant récolté au titre de la copie privée en 2005 a dépassé les 300 millions d’euros.
Selon les industriels qui vendent les supports de stockage et les lecteurs MP3 taxés, la taxe pour copie privée est un frein à la consommation. Ils ont donc formé la Copyright Levies Reform Alliance (CLRA), qui réunit la Business Software Alliance (BSA), l’European American Business Council (EABC), l’European Digital Media Association (EDiMA), l’European Information and Communications Technology and Consumer Electronics Association (EICTA), et la Recording-media Industry Association of Europe (RIAE). Cette coalition d’acronymes s’est donnée pour objectif de faire pression sur les parlements européens pour « réformer la taxe sur la copie privée », et donner ainsi le change au lobby des industries culturelles.
La CLRA a étudié l’évolution de la taxe dans neuf pays européens : Autriche, Belgique, Finlande, France, Allemagne, Italie, Pays-Bas, Espagne, et Suède. Elle estime que le montant des chèques signés par ses membres, et indirectement par les consommateurs, a triplé entre 2001 et aujourd’hui. Il serait passé de 545 million d’euros en 2001 à 1,57 milliards estimés pour 2006, et la somme pourrait monter jusqu’à 2,12 milliards en 2009. La Coalition dénonce un double paiement, entre le paiement du téléchargement sur iTunes et le paiement de la taxe pour graver le morceau acheté sur un CD vierge ou pour le transférer sur un iPod. Le discours est connu mais fait écho aux dispositions de la directive européenne sur le droit d’auteur, qui prévoit d’établir le montant de la rémunération en fonction de l’impact des DRM sur les pratiques de copie privée.
Faut-il supprimer la taxe ou supprimer les DRM ?
« Les taxes sur la copie privée sont fondamentalement injustes, aveugles et non transparentes pour les consommateurs, et elles vont contre les efforts de l’Union Européenne de rendre la Société de l’Information plus accessible« , regrette Mark MacGann, porte-parole de la CLRA et et directeur générale de l’EICTA. Il demande aux autres Etats de l’Union de prendre exemple sur le Royaume-Uni, l’Irelande, le Luxembourg, Chypre et Malte, qui n’ont pas instauré de taxe pour la copie privée dans leur système législatif.
Au premier abord, l’initiative devrait séduire les consommateurs européens qui voient la taxe comme une profonde injustice, et qui de toute façon n’aiment jamais être taxés. Mais il faut l’analyser comme une ode aux DRM, qui retireraient toute nécessité d’un système de compensation et de gestion collective, au profit d’une gestion purement personnaliste du droit d’auteur. « Un progrès pour l’humanité« , disait Christian Vanneste à l’Assemblée Nationale. Or préserver la rémunération pour copie privée, c’est aussi et surtout préserver l’idée que les consommateurs ont le droit de faire ce qu’ils veulent des œuvres qu’ils achètent, et que les auteurs reçoivent une compensation indirecte à travers les supports d’enregistrement et de stockage.
Enfin il faut ajouter que 25% des sommes collectées au titre de la copie privée sont réservées aux fonds d’aide à la création et au spectacle vivant.
Supprimer la taxe sur la copie privée est une idée qui derrière ses apparences libérales cache en réalité un profond idéologisme de contrôle des libertés individuelles.
Il faudra néanmoins choisir entre DRM et taxe pour copie privée, les deux étant absolument incompatibles dans un système judiciaire qui fait du téléchargement non autorisé une contravention.
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