Selon Christophe Grébert et Hervé Liffran, journaliste au Canard Enchaîné, la maire de Puteaux Joëlle Ceccaldi-Raynaud a racheté tous les exemplaires du journal satirique vendu dans sa ville pour étouffer un article portant sur une affaire de pots-de-vin. Une stratégie qui ne peut plus fonctionner à l’heure de l’immédiateté de l’information et d’Internet.

Joëlle Ceccaldi-Raynaud y réfléchira certainement à deux fois avant de vouloir racheter tous les exemplaires d’un même journal. Mise en cause dans une affaire de pots-de-vin relatée par le Canard Enchaîné, la députée UMP des Hauts-de-Seine et maire de Puteaux a visiblement cru bon de faire acheter toutes les éditions de l’hebdomadaire satirique en vente en ville pour étouffer l’affaire et minimiser son impact sur les habitants de Puteaux.

Sur son blog personnel, Christophe Grébert, Putéolien et opposant notoire à la politique conduite par Joëlle Ceccaldi-Raynaud, cite les propos de Hervé Liffran, journaliste au Canard et auteur de l’article en question. « Nous avons déjà vu des villes acheter un maximum d’exemplaires, mais jamais elles n’ont cherché à empêcher le réapprovisionnement » des kiosques avec de nouvelles éditions, a-t-il expliqué à l’AFP.

« Non seulement le maire de Puteaux a fait acheter la quasi-intégralité des 600 exemplaires du Canard enchaîné mis en vente mais il fait régner un climat de peur sur les kiosquiers, certains d’entre eux refusant d’être réapprovisionnés en raison d’éventuelles représailles » a-t-il ajouté, ajoutant que des « kiosquiers ont reconnu des personnes de la mairie » venir récupérer les exemple.

« L’un d’entre eux m’a assuré qu’en cas de nouvelle livraison, il mettrait les nouveaux exemplaires sous son comptoir et les renverrait la semaine prochaine pour invendus« . Une situation inacceptable pour Christophe Grébert, qui a décidé de lancer l’opération « 1 Canard pour chaque Putéolien » dont l’objectif est de photocopier la page de l’article en question et de l’envoyer à un habitant de Puteaux sélectionné au hasard. Et d’organiser samedi, si nécessaire, une distribution de l’article dans les rues de Puteaux.

Une tactique inefficace à l’heure d’Internet

Joëlle Ceccaldi-Raynaud a néanmoins peut-être oublié que sa stratégie d’étouffement aurait pu fonctionner à une époque où Internet ne connaissait pas ce niveau de développement. Avec le net, les tentatives de censure – car il s’agit clairement d’une tentative de limiter la diffusion d’un article de presse – aboutissent souvent à l’effet inverse de celui recherché.

Le contenu ciblé se retrouve très rapidement rediffusé C’est le fameux effet Streisand, ou effet Flamby. On l’a vu avec Copwatch et ses nombreux miroirs, qui ne sont pas bloqués par les fournisseurs d’accès à Internet, mais aussi avec Wikileaks, les clés de déchiffrement AACS des disques HD DVD ou pour la célèbre séquence du film La Chute qui est régulièrement détournée pour faire passer un tout autre message.

Il s’est produit d’une certaine façon la même chose avec l’affaire des exemplaires du Canard Enchaîné rachetés par la mairie de Puteaux. Si elle avait procédé autrement ou si elle n’avait tout simplement rien fait, peut-être que l’article du quotidien satirique aurait connu une audience beaucoup plus réduite. Or, une trentaine d’articles ont depuis repris cette affaire.

Sur Google Actualités, on peut ainsi voir des sujets sur le Parisien, Europe 1, 20 Minutes, le Nouvel Observateur, Le Monde, France Soir, TF1, France 3, l’Express, La Dépêche, l’Humanité, Rue89, l’AFP, France Info, le Post, Arrêt sur Images ou encore le Figaro. Une telle tactique pouvait sans doute fonctionner avant l’avènement d’Internet, avant la diffusion des actualités en quasi-temps réel. Lorsque l’information était encore limitée.

Aujourd’hui, il est vain de penser qu’en achetant tous les exemplaires d’un journal ou d’un magazine, cela suffira à faire taire un sujet. Et si Joëlle Ceccaldi-Raynaud peut acheter des éditions d’un journal, heureusement qu’elle ne peut pas racheter Internet. L’information veut être libre.

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