Suite à la décision de la CEDH dans l'affaire The Pirate Bay, la MPAA a publié un article dans lequel l'association américaine défendant les intérêts d'Hollywood considère que les pirates ne pourront plus invoquer la liberté d'expression pour justifier des activités illicites. Mais c'est oublier certaines dérives du droit d'auteur, qui ont débouché sur des cas de censure.

La semaine dernière, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé irrecevable la plainte déposée par Peter Sunde et Fredrik Neij. Les deux hommes, respectivement ancien porte-parole et ex-administrateur du portail de liens BitTorrent, avaient engagé cette action au motif que les décisions rendues par la justice suédoise avaient bafoué leur liberté d'expression.

Dans leur arrêt, les sept juges de la CEDH ayant eu à se étudier la demande de Peter Sunde et Fredrik Neij reconnaissent que la condamnation en Suède "a porté atteinte à leur droit à la liberté d'expression". Néanmoins, les magistrats ont rappelé que celle-ci a des limites et que l'exercice de cette liberté doit en particulier trouver un équilibre avec d'autres droits tout aussi légitimes.

"L'obligation [des autorités suédoises, ndlr] de protéger le copyright, tant au regard de la loi pertinente qu'au regard de la convention [des droits de l'homme], constitue une raison valable de restreindre la liberté d'expression des requérants", a écrit la CEDH, ajoutant dans son communiqué que "les juridictions [suédoises] ont procédé à une juste mise en balance des intérêts concurrents en jeu".

Adversaire de longue date de The Pirate Bay, l'association américaine chargée de défendre les intérêts de l'industrie cinématographique aux États-Unis (MPAA) n'a évidemment pas manqué l'occasion de commenter la décision de la CEDH dans un billet de blog, signalé par Torrentfreak. Car pendant longtemps, The Pirate Bay a été la bête noire de la MPAA.

"Par le passé, nous avons constaté que la notion de liberté d'expression a été détournée par ceux qui opèrent et proposent des accès à des sites illégaux au prétexte de le faire pour le plus grand bien de la société", écrit la MPAA, se félicitant que la juridiction européenne ait mis enfin un coup d'arrêt au dévoiement du principe de la liberté d'expression, en rappelant l'existence d'autres droits.

"Et l'industrie du divertissement a trop souvent été accusée d'oppresser la liberté d'expression parce qu'elle cherchait à protéger les artistes et les créateurs qui ont investi du temps, du talent et de l'argent pour produire des films et des spectacles", poursuit le lobby américain, heureux de voir que la CEDH n'a pas été sensible aux arguments développés par Peter Sunde et Fredrik Neij.

"La distribution de contenus dont la majorité est protégée par le copyright ne peut prétendre à être l'égal du débat et de l'expression politique", poursuit la MPAA. "Le concept de liberté d'expression et ce qu'elle représente est bien trop importante pour être foulé au pied et servir d'écran de fumée pour des activités irresponsables et souvent illégales sur Internet".

Le commentaire de la MPAA oublie toutefois de noter que des abus du droit d'auteur ont eux aussi égratigné la liberté d'expression. On se souvient par exemple de l'initiative de l'Electronic Frontier Foundation, qui a mis en place en 2009 une page web dénonçant les organisations qui abusent de leurs droits d'auteur pour limiter la liberté d'expression des citoyens.

En 2009, l'organisation anti-piratage néerlandaise BREIN, très agacée par les activités d'une importante communauté Usenet, avait souhaité étendre son action au-delà du piratage des fichiers en réclamant la suppression de la moindre discussion en rapport avec le piratage en ligne, avec à la clé une astreinte de 70 000 dollars par jour en cas de refus. La communauté fut condamnée, mais uniquement pour les fichiers.

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