En validant sans aucune réserve d’inteprétation la loi sur la surveillance internationale des communications électroniques, le Conseil constitutionnel ouvre aux services de renseignement une porte pour échapper au contrôle prévu par la loi pour le renseignement interne, y compris pour des Français en France.

La validation était attendue, mais l’on pouvait espérer mieux — naïvement au regard de sa validation de la loi Renseignement qui avait déjà montré son incapacité à prendre en compte certains enjeux démocratiques. Jeudi, le Conseil constitutionnel a validé l’ensemble de la loi sur la surveillance internationale des communications électroniques, qui vient patcher la seule partie censurée de la loi sur le renseignement de juillet 2015.

Lors de l’examen la précédente loi, les sages avaient estimé que le législateur avait failli à sa mission concernant l’encadrement de la collecte de renseignements à l’étranger, puisque la loi ne définissait « ni les conditions d’exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés […], ni celles du contrôle par la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement de la légalité des autorisations délivrées […] et de leurs conditions de mise en œuvre ».

Comme il l’avait fait l’été dernier avec la loi Renseignement, le Conseil s’est donc contenté dans sa décision de paraphraser le contenu de la loi sur la surveillance internationale des communications électroniques pour vérifier que chacun de ces points était cette fois présent, et conclure que la loi est donc conforme à la Constitution. Les juges du Palais Royal se sont refusés à tout commentaire au fond sur les mesures prévues.

Possibilité de contourner la loi sur le renseignement

Or c’est une occasion ratée pour préciser la loi, à défaut d’imposer enfin le même régime protecteur aux étrangers qu’aux Français, comme le droit international des droits de l’homme est censé l’imposer (restant avant toute institution protectrice des institutions françaises, le Conseil constitutionnel fait peu de cas du sort des étrangers, qui plus est quand ils ne sont pas en France).

[floating-quote float= »right »]Le Conseil constitutionnel n’a rien dit sur la surveillance de masse permise par la loi[/quote]

Mais quand bien même, la loi sur la surveillance internationale ne s’applique pas qu’aux étrangers de l’étranger. Loin s’en faut. La loi adoptée autorise un régime spécial très souple en formalités et en contre-fous pour la collecte de renseignements qui concernent des personnes qui communiquent « depuis l’étranger », si elles sont d’ores et déjà identifiées comme présentant une menace. Or techniquement, toute communication qui passe par Internet a des chances d’être réalisée « depuis l’étranger ».

Il est donc possible pour les services de renseignement d’exploiter cette faille pour éviter de devoir demander l’autorisation préalable à la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) avant de mettre un suspect sous surveillance, même lorsqu’il est français et situé en France. Le Conseil constitutionnel aurait pu émettre une réserve d’interprétation pour éviter cet abus, mais il ne l’a pas fait.

Surveillance de masse à l’étranger

De même, le Conseil n’a rien dit des « traitements automatisés » qui pourront être mis en œuvre sur décision du premier ministre, pour réaliser une surveillance de masse, appelée plus pudiquement « exploitation non individualisée des données de connexion interceptées ». Le texte prévoit que le chef du gouvernement peut autoriser de telles boîtes noires pendant des périodes d’un an renouvelables, sans que leur algorithme soit vérifié par la CNCTR.

« Ces mesures de surveillance ne portent pas nécessairement sur des cibles individuelles précisément identifiées, ce qui est le cas sur le territoire national. Elles portent fréquemment sur des objets collectifs (zones géographiques, organisations, groupes) », a expliqué le gouvernement au Conseil.

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