Une erreur dans le texte ?

C'est le bon endroit pour nous l'indiquer !
Attention, ce formulaire ne doit servir qu'à signaler une erreur. N'hésitez pas à utiliser la page de contact pour nous contacter ou nous faire part de vos suggestions. Merci.

Etape 1

Cliquez sur les paragraphes contenant des erreurs !

Pop Your Bubble, l'algorithme qui veut percer les bulles de filtrage sur Facebook

Comment sortir des bulles de filtrage dans lesquelles nous enferment les algorithmes de Facebook en fonction de nos amis, de nos goûts et autres interactions sur le réseau social ? L'outil Pop Your Bubble propose de suivre dix membres extérieurs à cette bulle pour ouvrir les internautes aux opinions contraires.

Vous l'ignorez peut-être mais il y a de fortes chances pour que vous soyez pris, sur votre compte Facebook (mais aussi sur Google), dans une bulle de filtrage : les algorithmes du réseau social, en prenant en compte vos « j'aime », votre cercle d'amis, et d'autres critères clé, développent autour de vous un cocon qui vous conforte dans vos goûts, vos opinions politiques et vos a priori. De fait, votre fil d'actualité est donc essentiellement (voire exclusivement) constitué d'éléments issus de votre zone de confort.

Les dérives potentielles de cet enfermement numérique sont nombreuses, certains y voyant l'un des facteurs expliquant le succès massif des articles de désinformation quand d'autres vont jusqu'à affirmer que les résultats de l'élection présidentielle américaine ont été influencés par ces bulles de filtrage. L'enjeu reste de taille quand on sait que 62 % des Américains consultent l'actualité sur les réseaux sociaux.

Ce qui est sûr, c'est qu'elles n'incitent pas à l'ouverture vers les utilisateurs qui raisonnent et vivent différemment de nous. C'est en partant de ce constat que Daniel Lubetzky, à l'origine de la fondation KIND, a créé Pop Your Bubble (littéralement : « Perce ta bulle »). L'outil, qui accède à votre compte Facebook après avoir obtenu votre autorisation, utilise ces algorithmes de manière inversée.

Au terme d'une brève analyse fondée sur votre âge, votre ville, votre sexe et vos « J'aime », il vous suggère de suivre dix utilisateurs de Facebook hors votre bulle pour observer vos différences. Pop Your Bubble recourt pour ce faire à une fonctionnalité existante sur Facebook, qui permet de suivre certains utilisateurs -- comme sur Twitter -- sans devenir leur ami ni les obliger à nous suivre en retour. Leurs publications se fondent ainsi dans votre fil d'actualité, au milieu de celles partagées par vos amis censés partager la même bulle que vous.

Des profils rendus publics par des internautes volontaires

Pop Your Bubble précise bien qu'il ne s'agit pas de personnes choisies au hasard : « Les personnes que vous suivez se sont portées volontaires pour rendre leur profil public dans le cadre de l'expérience Pop Your Bubble. Avant notre lancement, nous avons contacté différents [internautes] aux quatre coins du pays pour une expérience d'ouverture à d'autres points de vue. » Et pour étendre au plus vite ce cercle vertueux, l'appli propose aux personnes qui ont brisé la bulle -- en suivant 10 personnes différentes -- d'ouvrir à leur tour leur profil au public.

Notre test de la fonctionnalité -- normalement réservée aux internautes américains -- n'est pas forcément des plus parlants puisque nous avons seulement pu nous prêter au jeu en nous glissant dans la peau d'un utilisateur new-yorkais de moins de 30 ans sans pouvoir duper l'algorithme en matière de publications « aimées », exclusivement tirées de sources françaises. Mais cette brève expérience suffit à cerner le potentiel de l'outil. Sur les 10 personnes qui nous suggérées, on trouve une majorité de femmes entre 18 et 45 ans. Elles exercent des professions aussi variées qu'hôtesse de l'air, nutritionniste, coach professionnelle... quand d'autres sont étudiantes en marketing.

Si l'algorithme manque d'originalité en matière de ratio homme/femme (à moins qu'il suggère volontairement ces dernières ou qu'elles s'avèrent tout simplement majoritaires parmi les « cobayes » volontaires), il se révèle plutôt efficace pour le reste puisqu'aucune de ces personnes ne mène une vie semblable à celle des autres, et pas seulement en raison de leur diversité géographique (Dakota du sud, Texas, Pennsylvanie...).

En effet, alors qu'on pouvait s'attendre à découvrir des publications sur l'actualité qui tranchent avec notre propre opinion, Pop Your Bubble propose simplement de suivre le quotidien de ces utilisateurs volontaires. Photos entre amis, visite de la famille pour Pâques, sortie au restaurant, ou partage d'articles engagés sur la moindre actualité... les contenus varient fortement selon les utilisatrices et illustrent de fait la ressemblance de leur quotidien avec le nôtre, malgré nos supposées différences politiques ou sociales.

Une approche expérimentale des bulles de filtrage

Pop Your Bubble gagnerait toutefois à être amélioré en s'assurant que les utilisateurs volontaires alimentent régulièrement leur fil d'actualité pour se prêter au jeu : la disparité est grande entre les membres les plus prolixes et ceux qui se contentent de changer leur photo de profil à l'occasion, ce qui permet difficilement d'appréhender leur(s) différence(s).

L'initiative mérite en tout cas d'être saluée, à l'instar de l'appli Read across the aisle, qui se base sur vos sources d'actualité préférées pour vous suggérer des médias jugés à l'opposé de ce sceptre politique, dans le même esprit d'ouverture aux opinions contraires. Dans sa lutte en demi-teinte contre la désinformation, Facebook aurait tout intérêt à s'inspirer de tels outils qui incitent à sortir de sa bulle filtrante -- de manière certes artificielle mais sans doute plus efficace, sur le long terme, que le signalement des « fake news ».

Daniel Lubetzky ne prétend pas lui-même avoir trouvé la solution miracle : « Nous avons abordé ce projet avec énormément d'humilité et n'avons aucune idée des résultats auxquels s'attendre. Mais que se passerait-il si votre fil d'actualité vous amenait au moins à prendre en compte des opinions que vous ne partagez pas, au lieu de renforcer vos croyances ? Nous pensons que la question est pertinente et mérite d'être posée. »