Strayed Lights est un Dark Souls qui apaise
« La meilleure défense, c'est l'attaque », renvoie à une tactique que l'on entend souvent dans le monde du sport.
Strayed Lights est un jeu vidéo étrange. Étrange par sa proposition, étrange par sa direction artistique, étrange par sa narration. N'attendez pas de lui des explications claires sur ce qu'il faut faire. À la manière d'un Journey, il mise d'abord sur la contemplation et votre curiosité pour vous pousser à avancer, alors qu'on démarre dans la peau d'une lueur à peine née. Il s'inspire par ailleurs des Dark Souls pour proposer des combats exigeants, entre deux phases de relaxation. Aussi étonnant que cela puisse paraître, le mariage assez improbable fonctionne.
Strayed Lights, ou le Dark Souls reposant
Les premières minutes dans Strayed Lights sont assez déroutantes. On contrôle un petit personnage qui a du mal à se mouvoir, dans des environnements à la fois jolis et peu accueillants. On avance. On grandit à la vitesse de l'éclair, aussi. Jusqu'à se retrouver face à un ennemi dont la présence masque un tutoriel pour apprendre les rudiments des combats à venir. Contrairement à nombre de jeux où l'action est particulièrement présente, Strayed Lights n'enseigne pas l'art de l'attaque, mais celui de la défense.
Dans des affrontements classiques, le b.a.-ba s'articule autour des attaques qu'on peut asséner, généralement résumées en des coups faibles (mais rapides) et puissants (mais lents). Ce n'est pas le cas dans Strayed Lights, qui préfère s'en remettre à la défense, et surtout dans la parade. Avec une petite subtilité tout de même : le héros est capable de changer de couleur à l'envi -- bleu ou orange -- pour correspondre aux attaques ennemies. En parant, on absorbe de l'énergie jusqu'à atteindre la limite d'une jauge et être en mesure de déclencher une super-attaque dévastatrice. Au moment opportun, la mise en scène devient plus spectaculaire. C'est d'ailleurs surprenant, au regard de l'orientation très calme et intime du jeu.
Ce gameplay pourrait s'avérer très punitif, surtout pour celles et ceux qui préfèrent une approche offensive (il y a quand même une attaque classique, à l'efficacité moindre). Mais Strayed Lights est plus malin qu'on ne le croit. Si on pare avec la bonne couleur, on regagnera de la santé. Si on ne pare pas de la bonne couleur, ce n'est pas grave, les dégâts seront malgré tout annulés. Par conséquent, on n'est jamais pénalisé en cas de mauvais timing sur le changement de couleur. Une qualité qui permet de palier la puissance des adversaires, notamment celle des boss. En outre, les combats se permettent quelques variations sur la deuxième moitié de l'aventure (comptez entre 3 et 5 heures pour voir le bout). Grâce à elle, le gameplay, basé sur une approche pacifique, évite de faire trop de surplace.
Au-delà de ses bonnes idées de gameplay, Strayed Lights accroche par son atmosphère irrémédiablement onirique. Si on peut se sentir perdu dans un récit cryptique qui parle d'une ascension, on a vraiment envie de parcourir ces décors nimbés dans une direction artistique magnifique -- en quête de bouboules à ramasser. C'est simple, on tombe parfois en extase tellement c'est beau. Il y a une vraie poésie qui se dégage de Strayed Lights. Elle est appuyée par une bande son d'une délicatesse enivrante, signée Austin Wintory (dont le talent de composition a déjà sublimé Journey). À l'arrivée, il est difficile de ne pas succomber au charme de cette production atypique, qui sait noyer son challenge dans un nuage de coton. Dommage que ce shoot de bonheur soit trop court, la faute à des ambitions qui touchent vite leurs limites.