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La Russie va fermer les yeux sur les infractions de brevets, en riposte à l'Occident

La Russie travaille sur des ripostes aux sanctions de l'Occident, dans le cadre de la guerre en Ukraine. Moscou, en particulier, a décidé de se servir du levier des brevets.

C'est une nouvelle victime de la guerre entre l'Ukraine et la Russie, mais bien plus inattendue : le respect de la propriété industrielle. Le Washington Post rapporte dans son édition du 10 mars l'existence d'un décret russe qui rend la protection des brevets beaucoup plus caduque dans le pays. Il s'agit d'une riposte imaginée par Moscou contre les pays jugés « inamicaux ».

Il n'est pas besoin d'être grand clerc pour deviner quels sont États exposés à ce laxisme organisé dans la protection des brevets. Ce sont les entreprises basées aux États-Unis, dans l'Union européenne, au Royaume-Uni, au Canada et dans quelques autres pays (Japon, Australie, Corée du Sud, Suisse, Singapour, Taïwan).

Depuis le début de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le 24 février, de nombreux États, surtout occidentaux, ont multiplié les sanctions économiques pour tenter d'obliger le Kremlin à faire machine arrière -- sans succès jusqu'à présent. Même si la formule n'est pas assumée en Europe et en Amérique, la situation s'apparente à une guerre économique lancée contre la Russie.

L'existence de ce décret, publié le 7 mars, était évoquée dès le 5 mars par TASS, une agence de presse russe, dans une actualité titrée « Le ministère russe du développement économique discute de la suppression des restrictions sur l'utilisation de la propriété intellectuelle ». Bleeping Computer, le 7 mars, y voyait là un feu vert à une certaine forme de piratage.

Il est trop tôt pour estimer les conséquences que cette mesure aura sur les affaires des entreprises occidentales qui ont des brevets en Russie -- d'autant que le contexte est aujourd'hui incertain, avec de plus en plus de groupes qui prennent leurs distances avec le marché russe. Tout dépendra du nombre de brevets en cause par société et de leur valeur.

La Russie était déjà pointée du doigt

Si la décision de légaliser la possibilité d'enfreindre des brevets constitue de fait une escalade de plus entre l'Occident et la Russie, il faut noter que Moscou n'était pas juste avant le parangon du respect de la propriété intellectuelle -- en tout cas aux yeux de Washington. Chaque année, le représentant américain au commerce citait ce pays parmi ses principales préoccupations.

Dans le cadre de l'édition 2021 du rapport spécial 301, qui vise à évaluer la situation par pays en ce qui concerne la protection de la propriété intellectuelle, la Russie figure sur la liste de surveillance prioritaire, aux côtés de l'Arabie saoudite, de l'Argentine, du Chili, de la Chine, de l'Inde, de l'Indonésie, de l'Ukraine et du Venezuela. 

Ainsi, la dernière mise à jour du document considérait en 2021 « qu'en Russie, la protection et l'application de la propriété intellectuelle se heurtent à des difficultés telles que la persistance des infractions au droit d'auteur, la contrefaçon des marques et l'existence de procédures non transparentes ». Les autres années étaient à l'avenant, à l'image du rapport de 2016.

La Russie était déjà pointée du doigt dans des rapports rédigés par l'administration américaine. // Source : Unsplash / Montage Numerama

« Les États-Unis sont préoccupés par les rapports des parties prenantes selon lesquels l'application des droits de propriété intellectuelle reste inadéquate et les autorités russes continuent de manquer de personnel, d'expertise et de volonté politique pour lutter efficacement contre les violations de la propriété intellectuelle et les entreprises criminelles », ajoute le rapport.

De fait, la décision russe va simplement aggraver un cadre qui n'était déjà pas rose. Le Washington Post indique que les infractions survenant en Russie liées aux brevets de pays inamicaux n'entraineront pas de poursuites ni de dommages et intérêts pour les sociétés occidentales lésées. Un brevet atteignant une date d'expiration pourrait rester exploitable, sans risque pour le contrefacteur.

Concernant le droit des marques, le statu quo demeure. Mais il a d'ores et déjà été évoqué la possibilité d'assouplir aussi les règles du jeu pour que des entreprises russes continuent d'exploiter les marques occidentales, même si elles se retirent du pays. D'autres conséquences du même ordre pourraient survenir ailleurs, par exemple en ce qui concerne les appellations.

La décision russe n'arrangera pas sa situation aux yeux du représentant américain au commerce, et pourrait en outre dissuader à long terme les investisseurs de se réengager en Russie. Mais Moscou apparait dans une réflexion qui est désormais bien loin des considérations liées au vol de brevets et de respect de la propriété industrielle.