L’iPhone 11 Pro est le smartphone Apple haut de gamme pour 2019-2020. À un marché qui joue sur l’excentricité et des prix exorbitants, Apple répond par une formule maîtrisée… et difficilement égalable.

Tic toc toc. Ce n’est pas le bruit de la pluie, mais celui du cycle de renouvellement majeur des produits Apple. Le tic est un nouveau produit, le toc est une évolution. Parfois, la partition joue même tic toc toc toc (iPhone 6, 6S, 7 et 8). Quoi qu’il en soit, il existe des clients pour chaque type de produits : celles et ceux qui aiment la nouveauté radicale s’arracheront les produits tic, au risque d’essuyer les plâtres. Celles et ceux qui préfèrent les concepts peaufinés et maîtrisés privilégieront les générations toc. L’iPhone 11 Pro, itération 2019 de l’iPhone X sorti en 2017 et succession de l’iPhone XS sorti en 2018 est un toc.

À l’ère des écrans qui s’enroulent, des caméras dans tous les sens, des prix frisant les 2 000 € et des concepts de notch ambitieux est-ce que l’iPhone, si sobre et si égal à lui-même, peut encore rivaliser ?

L’élégance au service de la qualité

En réutilisant son modèle « iPhone X » côté look, Apple savait qu’il essuierait des critiques. Des détracteurs, mais aussi des marques qui ont toutes moqué l’encoche avant de la reproduire. Lors de la présentation de son Mate 30, Huawei n’a pas manqué de comparer les tailles des encoches, montrant à quel point la sienne était plus petite.

Mais voilà, s’arrêter au détail d’une reproduction d’un design sur trois ans n’a pas de sens. Dans une époque où l’on accuse à raison la tech de pousser des effets de mode pour faire racheter des produits inutiles, Apple propose ses designs de plus en plus longtemps et un suivi de ses modèles inégalé, brisant le cycle de la vanité : de face, on ne distingue pas un iPhone d’il y a 2 ans du dernier né.

Ce faisant, le constructeur raffine sa maîtrise du design industriel. Cette année, Apple a choisi le verre poli, mat, pour son dos : l’effet est ravageur et le toucher est incomparable avec ce que nous avons déjà pu avoir en main. Pour un produit qui sera souvent à cette position, c’est primordial. Les finitions sont exemplaires et rien ne dépasse dans cette structure lourde, qui transpire la qualité.

Même les trois caméras au dos, balafre redoutée, sont disposées de telle manière — un triangle équilatéral — que rien ne choque à l’œil. Le logo, redescendu pour l’occasion au centre, permet de compléter un tableau harmonieux. Les iPhone de 2019 sont beaux : qu’importe le jeu de la bordure la plus petite, de l’encoche la plus discrète ou de l’écran le plus pliable. C’est en partie à Apple que l’on doit la considération pour le design des objets technologiques et la marque le prouve encore : un bon design n’est pas fait d’absolus. Un smartphone qui s’utilise sur un écran n’a pas à être qu’un écran. Les boutons physiques, comme les bordures et leurs matériaux, peuvent avoir du sens. On ne se sent pas moins en 2019 avec un iPhone 11 Pro qu’avec un Galaxy Fold.

Le tout, en continuant à proposer un design fonctionnel qui n’oublie rien. Le smartphone est IP68 et résiste à l’immersion et à la poussière, propose une charge sans-fil par induction, ne lésine pas sur la sécurité biométrique avec la caméra TrueDepth et laisse les commandes physiques à portée de doigts.

La seule ombre au tableau apparaît quand on bascule l’appareil : un port Lightning est toujours l’unique connecteur de l’iPhone. On se souvient du tollé suscité par l’introduction de cette norme pourtant porteuse d’un renouveau qui a montré son intérêt pour l’univers de la tech : on souhaite désormais qu’elle disparaisse. Apple a adopté l’USB-C pour ses MacBook Air et MacBook Pro, puis pour ses iPad Pro. Le standard est on ne peut plus pratique et on aurait rêvé de pouvoir se balader avec un unique câble. Grand prince, Apple met pour la première fois dans la boîte de son iPhone un bloc recharge rapide 18w et un câble USB-C vers Lightning — pas besoin de s’équiper en adaptateur pour le brancher à un MacBook récent. Mais c’est définitivement un paragraphe que nous espérons écrire pour la dernière fois.

iPhone 11 Pro : un Pixel à tuer

Avant l’arrivée de Google sur le marché du smartphone, Apple n’avait que faire des critiques de celles et ceux lui reprochant de ne pas adopter les derniers gadgets à la mode : les iPhone, génération après génération, restaient les rois de la photographie mobile. Habile, car c’est aussi la caractéristique la plus recherchée par les clients d’un smartphone. Mais les ambitieux Pixel ont bouleversé l’ordre établi : un Pixel 3 ou un Pixel 3a à 399 € fait mieux, dans bien des situations, qu’un iPhone de la génération 2018.

En 2019, Apple devait réagir à cet intrus qui, un comble, n’a en plus joué qu’avec des armes logicielles. La réponse a été dévoilée avec l’iPhone 11 Pro : trois capteurs 12 Mpx calibrés d’usine, chacun prévu pour un usage précis. Le grand angle de 26 mm, le téléobjectif de 52 mm et l’ultra grand-angle de 13 mm répondent à des besoins particuliers individuellement et travaillent ensemble quand il le faut. Il ne faudrait pas croire qu’Apple a simplement ajouté un capteur à l’équation : tout le logiciel de l’application Appareil Photo a été refait pour multiplier les possibilités de prises de vue et les entrailles logicielles de traitement d’image ont été revues. C’est cette expérience logicielle et matérielle qui fait l’essence de la proposition d’Apple.

Mais sait-elle répondre à Google ?

Un mot d’abord sur la position des objectifs. Apple a choisi un triangle dans cette position pour des raisons pratiques : cela permet d’avoir une transition sans glitch entre les différents objectifs et de montrer la prévisualisation de ce que sait faire l’ultra grand-angle quand on utilise le grand angle — cela déborde sous l’interface. On regrette cependant que l’objectif de 13 mm, à la limite du fisheye, ait pris la position de droite. Si vous tenez le smartphone pour prendre une photo classique et que vous passez du grand angle à l’ultra grand-angle, votre doigt apparaîtra immanquablement sur le cliché. Le mettre en haut aurait permis d’éviter ces erreurs — le souci extrême du détail d’Apple que l’on aime parfois retrouver.

En un mot comme en cent : oui, l’iPhone 11 Pro reprend la tête de la course côté photo. Les détails apportés au logiciel et le confort des trois capteurs pour prendre tous les clichés possibles en font un appareil de premier choix pour la photographie mobile. Comme toujours, c’est l’expérience complète qui prime sur les détails techniques : on aime prendre des photos à l’iPhone 11 Pro. L’interface est agréable avec sa simplicité apparente, qui cache une complexité (un logiciel de retouche photo complet) quand on veut entrer dans les détails.

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Le téléobjectif

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Le grand angle

L'ultra grand angle

L’ultra grand angle

Au quotidien, utilisatrices et utilisateurs n’auront qu’à viser et shooter pour avoir un cliché vraiment réussi. Et il faut reconnaître qu’en réfléchissant un peu ses angles, l’iPhone 11 Pro est à l’aise dans tout : architecture mise en valeur grâce au HDR intelligent, portraits magnifiques et bien découpés, avec juste ce qu’il faut de retouche pour flatter l’ego et des textures dont le Pixel 3 rêverait, macro éblouissante de netteté, finesse du bokeh sur les animaux ou les objets… avec un Pixel 3 dans la même poche, c’est l’iPhone 11 Pro qu’on se prend à sortir, quand l’iPhone XS Max avait laissé sa place.

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Zoom

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Dézoom

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Encore !

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Vous avez dit Smart HDR ?

Peut-il être pris en défaut ? Oui. Apple a promis un mode inédit avant la fin de l’année, nommé Deep Fusion et reconstituant pixel par pixel un cliché en basse luminosité — voire, dans l’obscurité totale –, pour en donner la meilleure forme possible. En attendant cela, l’iPhone 11 Pro ne réussit pas tout en faibles conditions lumineuses. Le mode portrait, par exemple, est pris en défaut dès que la lumière s’en va. De même, on trouve certaines photos de nuit bien ternes par rapport à ce que propose Google, notamment dans la restitution des fortes lumières (éclairage urbain, etc.).

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Le mode portrait est satisfaisant

Le mode portrait de l'iPhone 11 // Source : Numerama

Le mode portrait de l'iPhone 11

Source : Numerama

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Les animaux sont bien mis en évidence

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Même quand ils pioncent

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Les détails complexes (les cheveux ici) sont gérés avec finesse

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Et les algorithmes sont assez convaincants pour figer des mouvements

Apple l’a annoncé sans cacher ses ambitions : il souhaite que ses photos de nuit restent des photos de nuit. Le Pixel 3 a une tendance à surexposer les clichés nocturnes, en faisant plutôt des nuits américaines, ce qui coupe tout réalisme. Contre toute attente et en réponse à la cinématographie du Pixel 3, l’iPhone 11 Pro répond parfois de la plus belle des manières.

On ne saurait mettre le doigt sur ce qui génère de l’aléatoire dans la réalisation des clichés en faible luminosité, mais quand le smartphone en sort des bons, ils sont de haute volée : détails, piqué, stabilisation parfaite, texture, absence de grain… le Pixel 3 est laissé sur le bas-côté. Le « mode nuit », proposé automatiquement chez Apple, suit cette philosophie : plus d’éclairage, mais pas trop. En revanche, quand c’est mauvais, c’est très mauvais (voir ci-dessous).

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Les clichés de nuit conservent des détails

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Mais le mode nuit pousse à peine la luminosité

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Un mauvais éclairage (nocturne + une boutique éclairée en arrière-plan) pose des problèmes au mode portrait.

Il est plus difficile pour nous de tester la vidéo — c’est moins un média sur lequel nous travaillons avec aisance. Nous avons en revanche remarqué avec Louise Audry, notre réalisatrice, trois choses avec l’iPhone 11 Pro, qui filme jusqu’en 4K à 60 images par seconde.

  • En 4K30, la stabilisation est prodigieuse : dans un bus ou dans un avion, les tremblements parasites sont neutralisés. C’est très agréable.
  • Sur des applications comme la prochaine version de FilMic, il sera possible de filmer avec 2 flux en même temps — caméra avant comprise. C’est bluffant et cela permettra aux amateurs comme aux professionnels d’économiser un temps précieux.
  • La promesse d’une transition « fluide » en live entre les trois capteurs n’est pas tenue à 100 % : même si la colorimétrie est censée avoir été calibrée d’usine, on perçoit les changements minimes entre les 3 objectifs quand on passe de l’un à l’autre sans arrêter une séquence. Il vaut donc mieux changer avant de filmer de nouveau — un détail.

Le tout, affiché sur un écran à la brillance sans égal. En plein soleil, les 1 200 nits déployés pour le HDR permettent enfin d’y voir quelque chose et on en prend plein la vue à chaque moment en regardant clichés et vidéos sur cet écran OLED.

iOS 13, un plaisant coffre-fort

C’est une chose à laquelle on s’habitue trop facilement sur un iPhone et avec iOS 13, l’iPhone 11 Pro n’y échappe pas : le confort d’usage. Ce n’est que lorsqu’on essaie d’appairer un casque sans fil sur un smartphone de la concurrence et d’en faire un usage sans friction ou de transférer les données d’un appareil à l’autre qu’on remarque avec quel soin Apple a conçu son écosystème.

Déballés, il n’y a qu’à ouvrir le boîtier des AirPods et de les mettre dans ses oreilles pour qu’ils soient appairés et prêts à être utilisés avec Siri sur un iPhone. Cette simplicité d’usage, permise par une maîtrise totale du logiciel et du matériel est toujours grisante la première fois, mais des années d’usage nous font oublier à quel point iOS, en contrepartie de sa fermeture, est bien fichu. C’est la même chose quand on configure l’iPhone 11 Pro à partir d’un XS Max : poser le smartphone dessus, iOS s’occupe du reste. À titre de comparaison, il faut un câble et télécharger des applications tierces sur les 2 smartphones, sans être sûr du résultat, pour faire à peu près la même chose sur Android — testé récemment d’un Pixel 3 à un Galaxy Fold.

Et toutes ces finitions se retrouvent partout : dans ce clavier si agréable à l’usage, avec une frappe qui autorise les erreurs de position des doigts et les corrige, le menu Maison qui vous permet de contrôler vos appareils domotiques sans passer par les applications mal faites des constructeurs, la galerie photo qui offre désormais les meilleurs clichés d’une période, le mode sombre adapté à toutes les applications, les raccourcis rapides qui tombent sous les doigts, les gestes tactiles copiés par toute l’industrie, AirDrop qui transmet vos fichiers en un clic ou vous permet de copier un texte sur votre Mac et le coller sur votre iPhone, les applications natives toutes synchronisées sur iCloud (Notes, Dictaphone…), la suite bureautique gratuite ultra puissante, le menu de partage des fichiers intelligent pour la rapidité et complexe quand on veut être plus précis, etc.

Tout semble toujours au bon endroit quand on maîtrise les codes : l’iPhone s’efface pour être à notre service.

Pour les professionnels, l’iPhone est si efficace qu’il remplace l’ordinateur pour bien des tâches. Au quotidien, nous l’utilisons pour trier nos mails, animer les réseaux sociaux de Numerama, prendre les clichés de nos tests et essais de véhicules, communiquer avec nos équipes, gérer les plannings, suivre nos audiences, faire des captures d’écran vidéo de Mario Kart Tour. Tout est si simple et si bien intégré qu’on prend cela pour acquis : retourner pour nos tests sur un smartphone Android nous prouve à chaque fois le contraire — malgré toutes les qualités du système d’exploitation de Google.

Tout le monde trouvera également son compte sur des applications comme FaceTime (sublimé par la nouvelle caméra avant) ou Messages, qui possède son propre App Store et les seuls « Animojis » et « Memojis » qui ne tombent pas dans la vallée de l’étrange.

Une capture d’écran vidéo se fait en une seconde, de manière native

D’autant plus qu’Apple a mis la sécurité de ses utilisateurs, professionnels ou non, au cœur de toutes les interactions. Les messages envoyés par iMessage sont chiffrés de bout en bout par défaut, le déverrouillage biométrique, plus rapide et permettant de nouveaux angles de vue (posé sur un bureau, Face ID nous reconnaît depuis notre chaise), est contenu dans une puce chiffrée dédiée et, cette année, Apple a mis des bâtons dans les roues à toutes les apps demandant des permissions indues sur votre géolocalisation. Certes, iOS 13 est un système d’exploitation où vous entrez souvent votre mot de passe et où l’on vous demande souvent un consentement, mais c’est le juste prix à payer pour naviguer sur un web sain.

Avec Apple TV+ et Apple Arcade sur la fin d’année 2019, l’offre Apple en services multimédias est en plus en expansion et les services déjà testés nagent au-dessus de la concurrence. Bref : ne goûtez pas à iOS 13 trop longtemps si vous ne souhaitez pas y rester, le retour sur d’autres plateformes risque d’être douloureux. Et cet écosystème à lui seul justifierait le choix d’un iPhone.

L’iPhone 11 Pro est disponible à partir de 1 159 €.

Le verdict

En 2019, Apple ne déçoit que celles et ceux qui ne comprennent pas l’iPhone. Avec des innovations, menues (le revêtement, la caméra TrueDepth) ou radicales (l’appareil photo, l’écran, la puce U1 encore non utilisée…), l’iPhone 11 Pro comble en réalité deux besoins : servir de réceptacle très haut de gamme à un iOS 13 difficilement égalé et agir comme le centre mobile de l’écosystème Apple. De la domotique aux services, en passant par les apps, configurations et politiques liées à la sécurité des utilisatrices et utilisateurs.

Dans ces conditions, retrouver le leadership sur la photo n’est qu’une cerise sur le gâteau et en attendant un mode nuit plus efficace et plus précis, l’iPhone 11 Pro est un régal de tous les instants. Rares sont les conditions qui le prendront en défaut — même si, contrairement au Pixel 3, il place le réalisme avant la cinématographie. Pour faire mieux cette année, la concurrence a du pain sur la planche.

Source : Numerama

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