Chaque réseau de transport sous-terrain possède sa propre vie bactérienne. Une étude, menée dans le métro de Hong Kong, révèle que les microbiotes se déplacent même en fonction des itinéraires des voyageurs.

Si vous êtes mysophobe (c’est à dire que vous avez la phobie des germes et des bactéries), cet article n’est peut-être pas le plus adapté pour entamer votre journée.

Vous êtes toujours là ? Alors vous allez apprendre qu’une étude menée à l’intérieur du métro de Hong Kong (en Chine) explique comment les mouvements des usagers contribuent à faire circuler différents organismes vivants microscopiques sur l’ensemble du réseau.

Un vie bactérienne propre à chaque ligne

Publiée le 31 juillet dans la revue scientifique Cell Reports, cette étude dresse le constat que les déplacements des voyageurs à l’intérieur et entre les métros contribuent au développement d’un « microbiome », soit une zone de vie pour des organismes. Les chercheurs ont observé comment changeait cette « communauté de microbiotes » sur les différentes lignes de métro tout au long d’une même journée.

« Pour comprendre comment le microbiome varie dans les transports en commun urbains, et influence le microbiote cutané, nous avons dressé le profil du microbiote de la paume humaine, après un contact avec les rampes des transports en commun de Hong Kong », écrivent les chercheurs dans le résumé de leur étude.

Pour mener cette expérience, Gianni Panagioutou, spécialisé dans la biologie des systèmes et professeur au sein de l’Université de Hong Kong, a demandé à des personnes volontaires d’entrer dans le métro de la ville. Elles avaient au préalable lavé leurs mains.

Les volontaires ont voyagé pendant 30 minutes, en touchant les barres de maintien du métro

Pendant trente minutes, ces volontaires ont du se déplacer dans l’une des huit lignes de métro de Hong Kong, en touchant les barres de maintien, avant de tamponner leurs paumes sur des écouvillons — de petites brosses ressemblant à des cotons-tiges.

L’analyse de ces prélèvements a révélé que la majorité des bactéries embarquées par les voyageurs étaient assez communes, puisqu’on les retrouve régulièrement sur la peau. Quant aux autres organismes non-bactériens, leurs paumes abritaient principalement des levures.

Le protocole expérimental pour identifier les bactéries du métro de Hong Kong. // Source : Cell Reports

Le protocole expérimental pour identifier les bactéries du métro de Hong Kong.

Source : Cell Reports

Le nombre de bactéries évolue dans la journée

« Le matin, chaque ligne a ses propres caractéristiques microbiennes, qui reflètent dans une grande mesure les caractéristiques de la ville qu’elle traverse. Par exemple, la ligne de métro qui longe la côte a été colonisée principalement par des espèces bactériennes aquatiques. Pendant la journée, alors que de plus en plus de gens utilisent le métro, la communauté microbienne commence à devenir plus similaire, dominée par les bactéries commensales de la peau humaine », explique Gianni Panagioutou à Gizmodo.

Les chercheurs notent qu’au petit matin, il y a plus de 140 espèces de bactéries différentes en début de ligne. Parmi elles, 48 espèces continuent à se multiplier au cours de la journée, et gagnent du terrain dans les autres lignes du métro. « Le moment de l’échantillonnage (le matin ou l’après-midi) est l’un des déterminants majeurs des changements et des récurrences dans la composition et la diversité de la communauté », écrivent les auteurs de l’étude.

Des communautés prennent l’ascendant sur d’autres

Les chercheurs citent l’effet Matthieu pour expliquer ce phénomène : en vertu de ce mécanisme, les meilleurs éléments tendent à prendre l’avantage sur les autres. De la même manière, certaines communautés microbiennes présentes dans les lignes de métro deviennent plus abondantes que les autres, à certains moments de la journée.

Lorsque le métro est en circulation, ce sont les bactéries apportées par les humains qui deviennent plus nombreuses. Quant à celles qui ne sont pas liées à la présence humaine, elles ne « recouvrent leur niche écologique » qu’à partir des heures où le trafic est terminé.

Les bactéries les moins abondantes sont en bleues, les plus abondantes en rouge. // Source : Cell Reports

Les bactéries les moins abondantes sont en bleues, les plus abondantes en rouge.

Source : Cell Reports

Les chercheurs ont constaté que certains microbes étaient spécifiques à certaines lignes, en fonction de leur point de départ. Par exemple, les lignes Ma On Shan et East Rail — cette dernière est reliée au reste de la Chine —  contenaient des espèces que l’on observe habituellement par terre.

Des bactéries résistantes aux antibiotiques

Plus inquiétant : les gènes de résistance portés par ces bactéries leur permettaient de lutter contre certains antibiotiques médicaux. D’autres sont capables de résister à la tétracycline, un antibiotique notamment utilisé dans l’alimentation des porcs. Un espèce, trouvée sur les lignes situées au nord de la vile, s’était par exemple dispersée dans l’ensemble des lignes de métro le soir.

Cette étude confirme ainsi qu’une véritable vie microbienne existe dans le métro de Hong Kong, et que la situation est probablement analogue dans d’autres villes du monde. Chaque réseau de transport abriterait ainsi sa propre communauté de bactéries, qui se déplacent au gré de la journée en fonction des trajets des voyageurs.


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