Un étranger en Olondre de Sofia Samatar : quand fantasy rime avec amour des livres
Quand la fantasy rime avec un amour immodéré des livres, sous une plume aussi talentueuse, cela nous offre une merveille littéraire.
Lorsque le jeune Jevick hérite du commerce de son père, riche marchand de poivre, il doit rapidement prendre le large vers une contrée lointaine, en Olondre. La région le faisait rêver depuis sa rencontre, alors enfant, avec un précepteur qui venait justement de ce pays imprégné par littérature. Jevick n'est pas déçu du voyage : dans la cité de Bain, cœur de ce pays, librairies et bibliothèques font partie du paysage.
Mais le plaisir est de courte durée : embarqué dans La Fête des Oiseaux, importante procession religieuse en Olondre, Jevick est visité durant la nuit par un « ange ». Cette rencontre fait basculer le commerçant dans les tensions religieuses de la région -- et dans d'autres strates de la réalité.
La magie des lettres
Un étranger en Olondre est une déclaration d'amour à la littérature. Partout où vous irez en Olondre, les livres ne seront jamais bien loin. On sent l'odeur d'une bibliothèque ou d'une librairie nous envahir par instants -- ces effluves boisés qui émanent des pages. On perçoit la poussière suspendue, qui s'illumine comme de petites lucioles quand un rayon de Soleil traverse les étales d'ouvrages entreposés. La petite nuée de poussière se libère quand on ouvre l'un d'entre eux ; nuée que l'on repousse par un souffle et un revers de main, avant que l'encre ne saisisse nos narines et captive nos yeux.
Le récit n'est pas seulement porté par l'amour des livres : c'est par sa propre écriture que Sofia Samatar nous montre la beauté littéraire. Un étranger en Olondre est écrit avec excellence. La plume de l'écrivaine apporte tout à la fois mouvement et contemplation, en exprimant les subtilités du réel et en suggérant les mystères. Nous devenons explorateurs et exploratrices d'un pays que l'on expérimente par les perceptions.
Un étranger en Olondre n'est autre qu'une longue poésie parée de romance. De véritables poèmes se glissent d'ailleurs dans le récit. L'écriture élégante de Sofia Samatar nous entraîne dans une aventure enchantée, qui est finalement assez peu faite de péripéties, mais de la découverte d'un ailleurs qui ne sera jamais pleinement accessible autrement. La fantasy de Sofia Samatar est celle qui enchante les mots dans le plus poétique écrin.
Et bonne nouvelle : la traduction de Patrick Dechesne retranscrit la merveilleuse plume -- et toutes ses nuances ondulées -- de Sofia Samatar.