Chaque week-end, c’est la compilation de l’actualité de la propriété intellectuelle et de ses dérives, concoctée par Lionel Maurel et Thomas Fourmeux.

Cette semaine, le Copyright Madness revient sur quelques bonnes dérives comme le CIO qui ouvre les hostilités pour les JO 2024 en s’arc-boutant sur sa propriété intellectuelle, un troll de brevets qui a tenté de nuire à l’organisation américaine EFF ou encore une dérive qui ne manque pas de chien avec un des rappeurs du Wu-Tang Clan. Bonne lecture et à la semaine prochaine !

Copyright Madness

Marchand de tapis. C’est une affaire qui dure depuis quelques temps et qui oppose Jamendo, une plateforme de musique sous licence Creative Commons, à la Sacem et la SPRE. Pour faire vite, la Sacem est chargée de collecter des sommes pour le compte de la SPRE. Cette collecte est prévue par la loi et doit permettre de rémunérer les artistes en contrepartie de la communication au public de la musique (telle que la diffusion dans les lieux sonorisés).. Jamendo fournit un service de diffusion musicale notamment pour les enseignes commerciales et la société Saint-Maclou avait souscrit une offre pour sonoriser ses magasins auprès de la société MusicMatic France qui appartient au même groupe que Jamendo. Sauf que la Sacem a mené son enquête et estimé que le magasin ne s’était pas acquitté de sa dîme. Jamendo se défend en expliquant que les clients qui diffusent dans leurs lieux sonorisés la musique de son catalogue n’ont pas à verser cette rémunération à la SPRE car les artistes en question ne sont pas affiliés à une société de perception et de répartition des droits. L’an dernier, le tribunal de grande instance de Paris avait tranché en faveur de la Sacem et de la SPRE. Maintenant, Jamendo fait appel pour essayer d’obtenir gain de cause. La musique adoucit les mœurs paraît-il…

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Un instrument de musique.

Source : Derek Gavey

Compil. Malgré de multiples protestations de la société civile, la prochaine directive européenne sur le droit d’auteur pourrait toujours comporter une obligation de filtrage automatique des contenus imposée à toutes les plateformes. Pour dénoncer ce projet, l’eurodéputée pirate Julia Reda a réalisé sur son site une petite compilation des pires dérives provoquées par les algorithmes de reconnaissance déjà en place, notamment sur YouTube. Et le résultat est éloquent : retrait de vidéos d’ONG dénonçant des atrocités en Syrie, neutralisation d’une vidéo de la Nasa montrant l’atterrissage d’un engin sur Mars, désactivation des musiques d’un artiste sur sa propre chaîne et même sanction sur une vidéo d’un petit chat ronronnant pendant 12 secondes. On aimerait bien savoir avec quel artiste le robocopyright de YouTube a confondu les ronrons de ce félin !

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CC Stephen Shellard

Under Pressure. Le service de messagerie crypté Telegram a reçu un gros coup de pression cette semaine l’obligeant à fermer un canal de discussion public qui diffusait des liens pour télécharger le dernier album de Taylor Swift. En soi, il pourrait s’agir d’une affaire assez banale, mais Telegram n’a pas pris cette décision à la suite d’une plainte des ayants droit. Ce sont directement Apple et Google, qui distribuent l’application Telegram sur leurs boutiques respectives, qui sont intervenus auprès de la société pour lui demander de faire le ménage. Un bel exemple de la manière dont ces plateformes se transforment peu à peu en police privée du droit d’auteur.

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CC GabboT

Trademark Madness

Le seigneur des anneaux. Nous n’y sommes pas encore mais les Jeux olympiques de 2024 risquent d’être le théâtre de sacrées dérives de la propriété intellectuelle. Le Comité International Olympique (CIO) commence d’ailleurs à frapper. Pour le concours Miss Univers, Alicia Aylies a dévoilé la tenue qu’elle allait porter. Pour rendre hommage à Paris qui organise les Jeux, sa robe porte des références explicites, comme les anneaux olympiques ainsi qu’un masque et un fleuret d’escrime. Le CIO a rappelé à l’ordre la société Miss France pour qu’il interdise à la candidate de porter des éléments protégés par le CIO sans son autorisation. C’est beau cet esprit de compétition !

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CC Dag Oliver

Avoir du chien. On poursuit la catégorie des dérives liées au droit des marques avec le rappeur RZA, du groupe Wu-Tang Clan. L’intéressé, propriétaire de la marque du groupe, s’est opposé à une entreprise spécialisée dans les canidés. Le 8 juin, le patron de cette société a voulu faire enregistrer la marque Woof-Tan Clan en référence en groupe de rap dont il est fan. Cela n’a pas été du goût de RZA qui a demandé l’annulation de l’enregistrement. D’après lui, cela risque de prêter à confusion. C’est évident : vous voulez écouter un morceau de musique et vous retrouvez à promener des chiens. Le risque de confusion est énorme…

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CC Tara Spalty

Ton sur ton. Régulièrement, des compagnies essaient de s’approprier des couleurs en utilisant le droit des marques. Une affaire de ce genre a opposé pendant des années Cadbury et Nestlé à propos de la couleur violette. Red Bull, de son côté, tente ce genre de manœuvre depuis 2011 : le fabriquant de boissons énergétiques voudrait faire reconnaître comme marque la simple juxtaposition d’un rectangle bleu et d’un rectangle argenté que l’on voit sur ses canettes. Plusieurs décisions de justice ont estimé que ce signe était trop vague pour mériter une protection. C’est bientôt la à Cour de Justice de l’Union Européenne de devoir trancher.

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CC Reyner Media

Patent Madness

Mauvais joueur. Pour trouver des exemples de dérives dans les brevets, nous allons souvent piocher dans le « Brevet Stupide du Mois » décerné par l’association américaine EFF. Mais tout le monde n’apprécie pas d’être ainsi brocardé ni d’être traité de troll des brevets. C’est le cas de la société australienne GEMSA pour une histoire de brevet fumeux sur une méthode de classement de fichiers sur PC. Elle a déposé plainte en demandant le retrait de l’article et un dédommagement de 750 000 dollars. Mais l’EFF ne s’est pas laissée faire et a contre-attaqué pour atteinte à la liberté d’expression. Un juge lui a donné raison et on doit vous avouer que ça nous rassure un peu pour le Copyright Madness ;-) !

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CC John Morton

Le Copyright Madness vous est offert par :

Lionel Maurel

Thomas Fourmeux

Merci à tous ceux qui nous aident à réaliser cette chronique, publiée sous licence Creative Commons Zéro, notamment en nous signalant des cas de dérives sur Twitter avec le hashtag #CopyrightMadness !

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