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Loi Renseignement : Urvoas a fourni une réponse-type aux députés PS

C'est une pratique courant,e, mais il est rare de la voir mise à nue. La réponse-type envoyée par de nombreux élus PS aux interrogations des électeurs sur le projet de loi sur le renseignement a été rédigée par le rapporteur de la loi, le député socialiste Jean-Jacques Urvoas.

"Dis, je reçois plein de courriels d'électeurs inquiets par votre projet de loi sur le renseignement, qu'est-ce que je suis censé répondre ?". C'est sans doute parce qu'il a beaucoup entendu cette question de la part de ses confrères que le député socialiste Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois à l'Assemblée nationale, rapporteur du projet de loi sur le renseignement et membre de la future ex-Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), a réalisé une réponse type que nombre d'internautes ont reçu de leurs députés.

La Quadrature du Net avait reproduit le texte de la réponse copié-collée envoyée par les députés sollicités par leurs électeurs. En général, le texte est envoyé dans le coeur du mail. Mais l'internaute Samuel Verschelde l'a reçu de sa députée sous la forme d'une pièce jointe. Un fichier Word intitulé LettreTypePL-Rens.doc, que nous nous sommes procurés. 

Si l'on en croit les métadonnées présentes dans le document, celui-ci aurait été écrit par Jean-Jacques Urvoas depuis un ordinateur de l'Assemblée nationale début avril 2015, au moment de l'entrée en discussion du projet de loi :

Voici ce que dit cette lettre type :

Madame, Monsieur,

Vous attirez mon attention sur le projet de loi sur le renseignement. Parce que j’ai lu vos inquiétudes, je veux vous rassurer : ce texte n’est pas une loi de circonstance écrite dans la précipitation après les attentats de janvier dernier. Il procède en effet d’une longue réflexion, d’abord parlementaire puis gouvernementale sur l’ensemble des activités de nos services de renseignement. Sa présentation a été annoncée par le Président de la République dès juillet 2014 et confirmée par le Premier ministre en décembre dernier lors d’un colloque organisé par la CNIL.

Bâtir un cadre juridique pour l’activité des services de renseignement est non seulement une nécessité mais un progrès de l’Etat de droit auquel nous sommes tous profondément attachés. Ne pas légiférer reviendrait à accepter la permanence de « zones grises » et l’absence de contrôle sur celles-ci. Il n’est vraiment plus acceptable que la France demeure l’une des dernières démocraties à ne pas bénéficier d’un cadre juridique, s’exposant ainsi à une condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme. 

Le texte vise donc à encadrer strictement encadrer les activités des services en précisant leurs missions, les techniques qu’ils pourront utiliser et le contrôle dont ils feront l’objet, suivant nos principes constitutionnels et européens. 

Il n’est pas suffisamment su que jusqu’à aujourd’hui, les six services de renseignement qui protègent la sécurité de nos concitoyens sur le territoire national et hors de nos frontières, ne pouvaient légalement recourir qu’à des interceptions de sécurité (avec quota maximum de 2190 écoutes téléphoniques) et recueillir des données techniques de connexion grâce à une loi de juillet 1991. Les compétences des services étaient éparpillées dans différents décrets les dotant de moyens juridiques morcelés. La loi vient instaurer un cadre général. Pour autant, tous les services ne pourront pas se prévaloir de toutes les finalités établies par la loi. Chacun d’entre eux ne sera autorisé à recourir qu’à certaines techniques en fonction de ses propres missions. 

Les  finalités des services ont été précisées par les députés et les notions vagues ont été remplacées par des concepts juridiques et constitutionnels préexistants afin de désigner sans ambiguïté les facteurs de menace pour notre pays (terrorisme, espionnage, criminalité organisée, armes de destructions massives, violences collectives les plus graves).

Le cœur du projet de loi, renforcé par les 173 amendements adoptés par la commission des Lois de l’Assemblée nationale à l’issue des 37 auditions (d’associations, autorités administratives indépendantes, syndicats, institutions), repose sur la création d’une autorité administrative indépendante, la Commission nationale du contrôle des techniques du renseignement (CNCTR). Cette « CNIL du renseignement » sera chargée d’effectuer un contrôle soutenu sur les demandes d’utilisation de toutes les techniques de renseignement présentées par les ministères compétents afin de s’assurer de la légalité et de la proportionnalité de cette mise en œuvre, de la pertinence des renseignements collectés et de la surveillance des seuls individus constituant une menace avérée. La commission des lois a également prévu un accès permanent aux locaux des services de renseignement ainsi qu’aux différents registres des renseignements collectés pour la commission puisse exercer constamment son contrôle.

Innovation majeure, en cas de désaccord entre cette commission indépendante, composée de magistrats et de parlementaires, et le Gouvernement, celle-ci pourra saisir le Conseil d’Etat afin de trancher le litige. Le juge administratif, constitutionnellement compétent lorsque les services agissent pour détecter et prévenir une infraction, est ainsi au cœur du dispositif du contrôle.

De plus, le Conseil d’Etat pourra être également saisi par un citoyen, une personne morale ou une juridiction de l’ordre judiciaire à titre préjudiciel. Si elle estime que la loi n’a pas été respectée, cette juridiction suprême pourra interrompre la technique, faire procéder à la destruction des renseignements collectés, condamner l’Etat et dédommager les victimes. Et pour la première fois dans l’histoire de notre Justice, le secret de la défense nationale ne sera pas un obstacle au travail de magistrats habilités.

Face au développement du numérique mais aussi à l’émergence de menaces plus complexes et technicisées, il est devenu indispensable de doter nos services de moyens adaptés tout en préservant les droits et libertés des citoyens.

D’aucuns évoquent une surveillance généralisée qui verrait ainsi le jour. Pourtant, la loi prévoit au contraire que la collecte du renseignement ne peut être qu’individuelle, proportionnée à la menace et temporaire. L’algorithme dont l’usage est institué par un article ne concernera ainsi que les seules données de connexion pour le strict cadre de la lutte antiterroriste. Dans tous les cas, la CNCTR s’assurera du respect de toutes ces dispositions législatives. 

Contrairement aux Etats-Unis qui disposent d’un système d’espionnage massif et indifférencié, nous préférons concentrer nos efforts sur une surveillance limitée à quelques individus et basée sur les principes d’efficacité et de proportionnalité : la fin ne justifie pas tous les moyens.

Notre pays s’apprête à rejoindre le cercle des démocraties adultes qui ont une culture du renseignement et qui ont légiféré sur ces domaines stratégiques et sensibles. La définition de principes législatifs, dépassant les évolutions techniques, est nécessaire et souhaitable car elle permettra d’assurer la sécurité de nos concitoyens mais aussi de préserver les libertés individuelles qui n’ont pas vocation à s’effacer au gré des circonstances.

Espérant avoir répondu à vos interrogations, 

Je vous prie de croire Madame, Monsieur, l’expression de mes sincères salutations. 

[signature]