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Le pouvoir de sanction de l'Arcep menacé par une QPC de Numericable

A la demande de Numericable, et alors que l'article de loi concerné avait été validé il y a 17 ans par le Conseil Constitutionnel, le Conseil d'Etat a accepté lundi de renvoyer devant les sages la question de la légalité du pouvoir de sanction de l'Autorité de régulation des télécoms. L'opérateur estime que le principe de la séparation des pouvoirs n'est pas respecté.

Le 20 décembre 2011, l'Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes (ARCEP) avait décidé d'infliger une amende de 5 millions d'euros à Numericable, pour ne pas avoir respecté une décision de l'Arcep de 2010, qui l'obligeait à proposer aux concurrents un accès aux fourreaux, pour y déployer leur fibre optique.

Le câblo-opérateur n'a bien sûr pas apprécié la décision, et a décidé de l'attaquer en nullité devant le Conseil d'Etat. Ils reprochent notamment à l'Arcep de s'être appuyée sur des textes qui, selon Numericable, ne seraient pas conformes aux droits et libertés garantis par la constitution. Or lundi, le Conseil d'Etat a accepté de renvoyer cette question prioritaire de constitutionnalité (QPC) devant le Conseil Constitutionnel, qui aura donc l'obligation de l'examiner. Avec le risque de faire perdre à l'Arcep son pouvoir de sanction.

En effet, Numericable estime que l'autorité administrative ne peut pas disposer dans les mêmes mains de tous les pouvoirs, à la fois de règlement des différents, d'instruction des dossiers, et de prononcé des sanctions contre ceux qui ne respecteraient pas ses décisions. Selon Numericable, dont les arguments ont été jugés par le Conseil d'Etat suffisamment sérieux pour mériter un examen par la cour constitutionnelle, il aurait fallu que le législateur prévoit une "stricte séparation, d'une part, entre les fonctions de poursuite, d'instruction et de jugement, et, d'autre part, entre les attributions de l'autorité en matière de règlement des différends et la compétence qu'elle détient pour prononcer une sanction à l'encontre d'un exploitant de réseau ou fournisseur de services qui ne se serait pas conformé, dans les délais fixés, à une décision de règlement d'un différend".

L'Arcep juge et flic

Le FAI estime que la loi méconnaît "les principes d'indépendance et d'impartialité résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen".

Dans son ordonnance de renvoi devant le Conseil constitutionnel, le Conseil d'Etat laisse de côté l'article L.36-8 du code des postes et communications électroniques, qui définit la procédure de règlement des différends, mais demande aux juges du Palais Royal d'examiner la conformité de l'article L.36-11, qui fixe la procédure de sanction. Il autorise l'Arcep à sanctionner soit d'office, soit à la demande du gouvernement ou d'un tiers. C'est au titre de cet article que l'Arcep a pu condamner Numericable à payer plusieurs millions d'euros d'amende.

La décision du Conseil d'Etat est d'autant plus intéressante d'un point de vue juridique que le Conseil constitutionnalité avait validé cet article lors de son examen de la loi de 1996 sur la réglementation des télécommunications. A l'époque, les sages avaient estimé que "la loi peut sans qu'il soit porté atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, doter une autorité administrative indépendante de pouvoirs de sanction dans la limite nécessaire à l'accomplissement de sa mission", en se contentant de fixer quelques bornes. En principe, la chose étant jugée, il n'y a pas à revenir dessus (non bis in idem).

Mais le Conseil d'Etat estime que la jurisprudence du Conseil Constitutionnel a évolué depuis 1996 "en ce qui concerne les principes d'indépendance et d'impartialité", en particulier depuis deux décisions de 2011 et 2012, et qu'il y a donc une "circonstance de droit nouvelle de nature à justifier" une QPC.