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Quand les Panama Papers illustrent le paradoxe du chiffrement

La plus grosse affaire d'évasion fiscale et de dissimulation de capitaux est diffusée en ce moment par une centaine de médias internationaux. Des révélations qui auraient été impossibles sans chiffrement… mais aussi impossibles avec.

Panama Papers : deux mots qui résonnent depuis dimanche soir comme une menace pour l'évasion fiscale à l'international. Une centaine de médias d'investigations du monde entier ont participé à l'analyse de 2,6 To de données du cabinet Mossack Fonseca, un cabinet panaméen qui s'occupe de gérer des compagnies offshore pour ses clients. Pour simplifier au maximum ces mécaniques économiques complexes, disons pour comprendre les enjeux de l'affaire que Mossack Fonseca se charge de faire sortir des sommes d'argent importantes du système financier international.

Bien entendu, les clients du cabinet ne sont pas des inconnus et on peut citer au hasard Vladimir Poutine, le Roi d'Arabie Saoudite, le premier ministre islandais ou encore, Lionel Messi et Michel Platini. Une liste complète des personnalités impliquées est mise à jour en permanence sur Wikipédia à mesure que les articles tombent. Et ce que l'on présente comme la plus grosse base de données sur la pratique des sociétés offshore a été dévoilée par un unique lanceur d'alerte : un employé de la firme dont l'identité a été protégée par les journalistes.

Or comme le raconte le Süddeutsche Zeitung, qui fut le média allemand choisi par cette source anonyme, tout a été fait par correspondance grâce à une messagerie chiffrée. « Je n'ai jamais vu notre source en personne. Nous avons communiqué via un logiciel de messagerie instantanée chiffré », raconte Bastian Obermayer, l'un des journalistes du journal d'outre-Rhin.

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Comme le souligne la vidéo introductive réalisée par le Süddeutsche Zeitung, la source de ce leak craignait pour sa vie et a estimé qu'une correspondance virtuelle et chiffrée était le seul moyen qu'elle avait de se protéger. Et on comprend la gravité de la situation : en tout, 240 000 compagnies pourraient être impliquées dans cette affaire à divers degrés. En plein débat sur la nécessité du chiffrement des communications et des données, notamment dans la bataille juridique qui oppose Apple et le FBI, les Panama Papers montrent, s'il était encore besoin de le faire, à quel point le chiffrement des données et des communications est une nécessité -- sinon un droit numérique fondamental -- pour tous les citoyens.

Mais il y a un paradoxe. Car du côté de ceux qui cherchent à cacher des documents qui mettent en évidence des actes illégaux, une affaire comme celle-ci entraînera également un passage massif à des techniques de chiffrement pour mieux sécuriser des données qui n'auraient jamais dû fuiter -- du point de vue des entreprises et administrations concernées.

Selon le Süddeutsche Zeitung, tous ces documents qui sont autant de preuves certifiant que telle société ou telle personnalité est impliquée dans cette entreprise d'évasion fiscale internationale avaient été transmis entre les intéressés sans grande précaution. « Les contrats sont envoyés par mail en .pdf ou dans des documents Word », raconte le journal. Or cette pratique très peu sécurisée pourrait être progressivement bannie dans les organisations. Le chiffrement, pour elles, permettrait de s'assurer que seules les personnes autorisées pourront lire le contenu. Les risques de fuites massives seraient alors fortement réduits.

Si l'administration technique d'un cabinet comme Mossack Fonseca est compétente, elle saura chiffrer massivement ses documents et confier les clefs qui permettent de les déchiffrer à des personnes de confiance qui seront, a priori, en nombre de plus en plus réduit. On retrouve donc, à travers cette affaire, le paradoxe du chiffrement, qui facilite à la fois la transparence, garantissant l'existence des lanceurs d'alertes, et l'opacité. Car ni la transparence totale, ni l'opacité totale, ne sont souhaitables en démocratie. Comment assurer l'équilibre entre les deux, si c'est  seulement possible ? Personne, pour le moment, n'a trouvé la réponse.