Créer un logiciel de P2P n'est plus interdit au Japon. Et en France ?
Isamu Kaneko, le développeur de Winny, est soulagé.
Contrairement à l'affaire Grokster où les juges américains avaient pu démontrer l'intention de l'éditeur d'inciter les utilisateurs à pirater, l'enquête japonaise n'avait rien démontré des intentions frauduleuses du développeur. C'est l'irrespect d'un certain "principe de précaution" qui avait donc été sanctionné, au grand émoi des professionnels. "Le jugement va stopper le développement des technologies de l'information au Japon. Les programmeurs ne voudront plus développer de nouvelles technologies", avait ainsi prévenu la Ligue japonaise des Ingénieurs en Logiciels.
Le président de la Haute Cour d'Osaka a finalement suivi les arguments de Kaneko en notant que s'il avait bien été au courant de la possibilité pour les utilisateurs de se servir de Winny pour pirater, le logiciel n'avait jamais été promu dans cet objectif. Jamais le développeur n'a en effet incité les utilisateurs à échanger des fichiers protégés par le droit d'auteur.
Chercheur à l'université de Tokyo, Isamu Kaneko avait été arrêté en mai 2004, et a toujours plaidé non coupable. Son arrestation et sa condamnation n'ont pas freiné la progression du P2P au Japon, bien au contraire.
En prenant comme critère l'incitation explicite à la violation des droits d'auteur, l'arrêt de la Haute Cour japonaise rejoint les mêmes critères que la Cour Suprême américaine, qui avaient été défavorables à Napster et Grokster. C'est également sur la même base qu'un tribunal australien avait condamné Kazaa. La jurisprudence tend donc à s'uniformiser au niveau international.
En France, plusieurs jugements sont attendus notamment contre LimeWire, Shareaza et Vuze (anciennement Azureus). Depuis la loi DADVSI, il est interdit "d'éditer, de mettre à la disposition du public ou de communiquer au public, sciemment et sous quelque forme que ce soit, un logiciel manifestement destiné à la mise à disposition du public non autorisée d'œuvres ou d'objets protégés".
Mais pour le moment, aucun tribunal n'a défini ce qu'était un logiciel "manifestement destiné" au piratage. Les juges devront probablement s'inspirer des mêmes critères d'appréciation de l'incitation au piratage que ceux choisis aux USA, en Australie et au Japon.