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J'aime les jeux vidéo comme une fille

Le jeu vidéo est un passe-temps aussi commun pour les femmes que pour les hommes. Dire que l'on « joue comme une femme » est pourtant connoté négativement. La newsletter #Règle30 de Numerama de cette semaine explore ce paradoxe.

J'ai encore du mal à me qualifier de gameuse. Pourtant, je joue régulièrement aux jeux vidéo. Mais je me dis que je ne joue pas aux bons jeux, pas de la bonne manière, pas avec le bon matériel, etc. Je me suis persuadée que mes pratiques n'étaient pas dans la norme, alors qu'en fait, elles sont très typiques : 47 % des joueurs réguliers de jeux vidéo en France sont des joueuses, avec une moyenne d'âge de 39 ans et un intérêt pour les jeux dits casual.

Ce paradoxe est depuis longtemps étudié par des chercheurs et des chercheuses. Pourquoi le jeu vidéo, qui est un passe-temps commun aux deux genres, fait partie de l'identité de nombreux hommes, mais beaucoup moins chez les femmes ? Parce que les pratiques féminines sont jugées comme moins importantes, voire méprisables. « Quand on dit à quelqu’un qu’il joue comme une fille, c’est une insulte, on l’accuse d’être mauvais et de ne pas être marrant », notait Shira Chess, chercheuse américaine à l’Université de Géorgie, dans un essai sorti en 2020, justement intitulé Play like a Feminist (Joue comme un·e féministe).

Parce que la tech appartient à tout le monde

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J'ai déjà écrit à plusieurs reprises sur mon amour des fangirls ou des communautés à dominance féminine, des sites de tricot en passant par les fandoms dédiées à des groupes de k-pop. J'ai aussi une certaine affection et un intérêt pour les pratiques en ligne vues comme féminines, mais qui s'imposent dans des milieux très masculins. Le média américain The Cut m'en a offert un très bel exemple la semaine dernière, avec cet article qui traite de la « fangirlisation » de la Formule 1. On y apprend que de nombreuses jeunes femmes se sont passionnées pour les courses ces dernières années, grâce à une téléréalité produite par Netflix (Formula 1 : Pilotes de leur destin, réalisée en partenariat avec la société Liberty Media, qui contrôle le milieu de F1). Cette diversification de l'audience, jusqu'ici très masculine et vieillissante, a donné naissance à de nouvelles pratiques de fans : comptes Instagram de mèmes sur les courses, fancams en l'honneur des pilotes, fanfictions diverses et variées, podcasts, etc.

Les autrices du podcast Two Girls 1 Formula proposent des recettes pour organiser des brunchs entre ami·es lors des courses de F1.

Être ou ne pas être une fangirl

Ces pratiques sont d'ailleurs aussi appréciées par les hommes, car elles participent à la démocratisation d'un sport vu comme élitiste. Mais l'article note que dans les cas des jeunes femmes, il y a un vrai enjeu identitaire. Sont-elles des fans de F1 comme les autres, ou des fangirls ? Certaines rejettent le terme (et elles en ont le droit : ce n'est pas parce qu'on est une femme qu'on apprécie les pratiques souvent associées aux femmes ou qu'on veut être réduite à son genre). D'autres le revendiquent sans honte. « Il n'y a pas une seule manière d'être fan de quelque chose », conclut Kate Lizotte, l'une des autrices du podcast Two Girls One Formula.

Tout ceci peut paraître futile. Pour reprendre les mots de la journaliste américaine Simone de Rochefort (spécialisée dans les jeux vidéo et fan de F1, donc doublement concernée par ces histoires) : « c'est stupide!!! mais c'est réel!!! mais c'est crétin!!! mais c'est tellement important pour moi!!! » Personnellement, je crois qu'il y a un intérêt à réfléchir à nos identités en ligne, celles qu'on nous impose et celles que l'on revendique, parce qu'elles sont le reflet plus général de ce que la société nous permet de faire et d'aimer.

Je vous donne un dernier exemple grâce à ce génial article publié chez BFMTV sur les fans de Tintin qui l'imaginent en couple avec le capitaine HaddockOn pourrait réduire ces efforts à un délire typique des fangirls (ou plus généralement de fans queers), de créer des couples imaginaires entre des personnages de fiction. Pourtant, l'article insiste sur le fait que l'homosexualité supposée de Tintin et Haddock a toujours été un sujet à débat, y compris pour les spécialistes de l'œuvre de Hergé. Rejeter d'un bloc la possibilité d'une romance entre les deux héros, ne serait-ce pas là le comportement d'un·e mauvais fan, plutôt que le contraire ?

En d'autres termes, je peux être une gameuse en jouant à l'application officielle du Scrabble sur smartphone (exemple complètement fictif), fan de F1 en publiant des fancams dédiées à Lewis Hamilton, sincèrement intéressée par la BD franco-belge en imaginant Spirou et Fantasio se rouler des pelles. Ce ne sont pas les seules manières d'exprimer sa passion, mais elles ne sont pas moins valables que les autres. Est-ce qu'on nous demande d'aimer quelque chose normalement, ou est-ce qu'on nous demande de les aimer comme des hommes ?