La ministre de la Culture estime qu'il "serait normal" que Google contribue au financement de la presse, tout comme l'ensemble des moteurs de recherche et des plateformes d'agrégation d'articles de presse.

Il y a des idées que l'on croit remises au fond d'un tiroir et qui resurgissent avec une force décuplée. Ce matin, Le Monde rapportait que le Syndicat de la presse quotidienne nationale (SPQN) se lançait dans un lobbying d'ampleur pour obtenir que Google et tous les agrégateurs de flux d'actualités soient obligés de reverser des droits aux journaux indexés. Deux textes ont déjà été soumis aux ministres concernées.

Cet après-midi, dans le même journal, la ministre de la Culture Aurélie Filippetti se montre ouverte à l'idée, si ce n'est de taxer les liens hypertextes ou les résumés d'articles, au moins de créer une nouvelle source de financement en faveur de la presse, payée par les moteurs de recherche. Google en tête. 

"Il y a une vraie interrogation sur le financement de la presse. Les principaux sites tapés sur les moteurs de recherche sont les journaux", fait-elle remarquer (une information sujette à caution). "Il serait normal que ces moteurs de recherche contribuent à financer la vraie valeur ajoutée produite par les journaux. Le travail éditorial est fait par la presse, pas par ces plateformes qui pourtant en tirent un profit commercial évident".

 

Jusqu'à ce qu'il soit prouvé que Google retire de la valeur aux journaux plus qu'il ne leur offre de visibilité (et donc de valeur), l'argument paraîtra difficile à entendre. 

Mais admettons.

Outre tous les problèmes d'identification des payeurs et des bénéficiaires que nous évoquions ce matin, sur quelle base répartir la somme reversée par Google ? Faut-il payer davantage les titres de presse qui sont les plus affichés aux utilisateurs, et donc les plus exploités ? Ou faut-il rémunérer à parts égales tous les journaux, quelle que soit la qualité de leur contenu ou leur mise en avant par Google ? Le premier scénario (si tant est qu'il soit techniquement possible) aurait pour effet pervers de favoriser deux fois les sites gagnants par rapport aux perdants : par le référencement accru, et par la rémunération accessoire. Le deuxième scénario reviendrait à imposer un financement communiste de la presse, qui découragerait l'effort de démarcation des lignes éditoriales. 

L'idée de taxer Google au bénéfice de la presse avait été soutenue Laurent Joffrin en 2009 (vous savez, celui qui s'énerve désormais que des informations puissent circuler par e-mail sans avoir été vérifiées dans la presse traditionnelle).

"Il faut rappeler que si le Net est un magnifique outil de diffusion, il ne produit rien", avait-il écrit pour justifier sa proposition. "Les internautes, pour une grande partie, se contentent de butiner les résumés qu'ils trouvent à portée de clic sur Google (…) Les bénéfices de Google (comme ceux des FAI) sont immenses (…) Il ne s'agit pas de subvention. Il s'agit de demander une part modeste de bénéfices qui resteront en tout état de cause énormes".


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