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Charges sociales sur les royalties : le gouvernement cède, les artistes paieront

Finalement, les maisons de disques seront exemptées de payer un forfait social en plus des redevances qu'elles versent aux artistes-interprètes. Alors qu'il s'était opposé à cette exonération à l'Assemblée Nationale, le gouvernement a accepté au Sénat de supprimer la mesure qu'il avait inséré dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce sont les artistes qui pourraient eux-mêmes payer les cotisations au titre de leurs revenus patrimoniaux.

Incroyable et pourtant vrai. Le mois dernier, nous nous étions félicités de voir échouer le député et ancien rapporteur de la loi Hadopi Frank Riester (UMP), qui avait souhaité exonérer les maisons de disques du paiement de charges sociales sur les redevances qu'elles versent chaque année aux artistes-interprètes pour l'exploitation de leurs œuvres. Dans son projet de loi de financement de la sécurité sociale, le gouvernement avait en effet décidé de soumettre les royalties à un "forfait social" de 6 %, payé par les labels. La mesure aurait coûté 2,5 millions d'euros par an aux maisons de disques, qui versent environ 42 millions d'euros de droits par an aux artistes-interprètes, pour un chiffre d'affaires de plus d'un demi-milliard d'euros. Une mesure "désastreuse pour l'industrie phonographique", avait plaidé Frank Riester.

A l'Assemblée Nationale, le gouvernement n'avait pas écouté l'actuel membre du collège de l'Hadopi, et avait demandé et obtenu le rejet de l'amendement présenté par Frank Riester. On pensait alors le dossier clos.

Mais non.

Au Sénat, c'est l'élue centriste Catherine Morin-Desailly qui a défendu un amendement similaire à celui du député, et provoqué un débat beaucoup plus âpre qu'au Palais Bourbon. La sénatrice a estimé que les royalties ne pouvaient pas être soumises au forfait social, car "leur nature même implique qu'elles ne sont jamais versées en contrepartie ou à l'occasion d'un travail", mais "s'analysent toujours comme la contrepartie de l'exercice d'un droit de propriété intellectuelle". Elle a elle aussi plaidé la cause des maisons de disques dévastées, rappelant que "le chiffre d'affaires du secteur phonographique a chuté de moitié, passant de 1,3 milliard d'euros en 2002 à 600 millions d'euros en 2009, en raison notamment du phénomène du piratage, qui remet en cause le droit d'auteur".

Malgré l'opposition de la Commission des affaires sociales, qui "rappelle que ce forfait vise à soumettre à une faible cotisation des revenus ceux qui en sont exemptés", le Gouvernement a cédé. Il a invité les sénateurs à voter l'amendement, par un argumentaire qui frise l'indécence.

"Soit ces sommes sont soumises à la CSG sur les revenus d'activité et, par conséquent, au forfait social, soit elles relèvent des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. Au final, il faut l'avouer, les différences de prélèvements ne sont pas considérables", a ainsi fait remarquer la ministre Roselyne BachelotSans jamais préciser cependant que dans le premier cas le forfait social est payé par la maison de disques en plus des royalties, alors que dans le second cas les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine seraient prélevés directement sur les royalties, et amputeraient donc les revenus des artistes. "Nous sommes en discussion avec les différents acteurs de ce secteur pour savoir comment les choses devront concrètement se passer", a simplement prévenu la désormais ministre du Travail.

L'amendement a été adopté vendredi, non sans provoquer la colère de plusieurs sénateurs, qui ont contesté le drame que le forfait social serait pour les maisons de disques. "Bien que je ne possède pas les éléments suffisants pour déterminer si l'industrie phonographique connaît ou non des difficultés, j'imagine toutefois que de nombreux autres secteurs de notre industrie rencontrent effectivement des problèmes", a ainsi opposé le sénateur François Autain (CRC). "Dans ce cas, pourquoi ces secteurs ne pourraient-ils bénéficier d'une mesure identique à celle qui est présentée par ces amendements pour l'industrie phonographique ? Selon moi, le système que vous proposez n'est pas approprié pour apporter une aide à une industrie, quelle qu'elle soit".

"Si cette profession rencontre des difficultés majeures, celles-ci sont, me semble-t-il, de nature économique. Par conséquent, la réponse doit être d'ordre économique et non pas social", avait aussi protesté le rapporteur général de la commission des affaires sociales, Alain Vasselle (UMP).

Le sujet devrait être tranché en Commission mixte paritaire, mais le changement d'avis du Gouvernement laisse planer peu de suspense sur l'issue du dossier. Les maisons de disques ont gagné.