Suite au succès indéniable que rencontre cette discussion, je continue mon aventure dans le monde merveilleux du compteur grenouille.
Je rappelle les principes : 1/ Connaître sa consommation d’énergie est un pré-supposé pour agir dessus. 2/ On s’amuse avec Arduino & co.
Si vous déshabillez la grenouille (la capot vert n’est pas plombé), vous découvrirez trois bornes identifiées I1 I2 A. Ces bornes dissimulent une fonction au nom pompeux de “Sorties de télé-information client” et 300 pages de documentation à lire.
Le document de référence ENEDIS (ENEDIS c’est ERDF pour faire genre) nous apprend que c’est conforme à NF EN 62056-3-1, qui étend IEC 61142 surnommé EURIDIS (on aime beaucoup l’antiquité grecque chez les électriciens) remplacée par IEC 62056-31 que vous ne lirez pas parce qu’elles sont payantes.
On va simplifier en disant que c’est une liaison série asynchrone 1200 bauds (anciens Linky) ou 9600 (nouveaux), multipoint, modulée en amplitude sur une porteuse à 50 kHz. On y apprend (c’est important car le compteur est souvent éloigné) que ce bus peut s’étendre sur 500 mètres.
Ceci pour la couche physique. Les couches supérieures et leurs protocoles sont nettement plus touffues, mais ce n’est pas un gros problème en suivi de consommation où le compteur vous envoie cycliquement des paquets de données. « It’s only software ».
50kHz AM, ça existe clairement pas en informatique. On est face à un système typique construit par des électroniciens qui programment au fer à souder. On a donc un casse-tête supplémentaire puisqu’il va falloir faire entrer ces données dans un ordinateur. Pour fixer les idées, notre roadmap est la suivante :
Linky -> isolateur/démodulateur -> liaison série -> ordinateur
La liaison étant unidirectionnelle (on ne parle pas à la grenouille), il n’y a pas de modulateur.
Après pas mal d’heures de gougling, je classe les solutions en 3 catégories.
1/ La bidouille
On trouve un peu partout sur le web (1, 2, 3, 4, 5, 6) un schéma isolateur/démodulateur avec un optocoupleur et deux résistances.
Wow! C’est un isolateur, j’en conviens. Mais si un électronicien peut me convaincre que c’est un démodulateur, je veux bien l’écouter.
Cet article n’apporte pas l’illumination et ne fait que confirmer mes craintes. Ça tombe en marche, des fois.
Ce lien-ci nous propose un démodulateur un chouïa plus crédible, avec un NAND pour écrêter (on est des guerriers, on n’a peur de rien) et un monostable pour produire le bit.
Dans tous les cas, on enquille - si je puis me permettre - ce signal dans un adaptateur série-USB comme on en trouve partout (mais attention à la compatibilité software).
2/ Le “mi-modem” prêt à installer
Ce boîtier a l’air populaire. A l’intérieur, on retrouve le fameux optocoupleur (6N138) plus le chip série-USB à gauche. Ce dernier est un FTDI dont les chips sont en général bien supportés par les OS. Il s’agit donc du même circuit que plus haut, plus ou moins.
Existe aussi chez d’autres faiseurs.
Existe sour forme de carte Raspberry.
Existe pour Arduino.
3/ La centrale domotique
On embarque un OS et un serveur web, ça communique via Ethernet et ça donne ceci (150€) ou cela (200€). Le marché de petites boîtes est florissant.
Problème : il n’y a plus rien à programmer et le hacker qui sommeille en nous va s’ennuyer. La solution peut séduire le mi-hackeur.
Si vous flanquez quoi que ce soit d’évolué à côté de votre compteur, sachez que ERDF vous offre généreusement 130 mW (milliwatts) d’alimentation et qu’il faudra à coup sûr prévoir une alimentation séparée. Et il n’y a pas de prise au tableau électrique.
Discussion.
On a en théorie 3 choix pour le transport du compteur à l’informatique:
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Étendre le bus Linky, nous avons vu qu’il supporte 500 mètres.
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Étendre la liaison série. On peut tabler sur 100 à 150 mètres en 9600 bauds avec du Cat 5. Avec les circuits que j’ai vus, je ne donne pas cher de cette solution. La qualité du signal en bande de base (non modulé) risque d’être tellement mauvaise que l’UART n’y retrouvera pas ses billes. Avec un vrai modem, cependant, ça le ferait.
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Étendre le bus USB : 5 mètres. On n’en parle plus.
Je passe sous silence les solutions sans-fil, plus complexes ou à base de yet-another-layer qui faut des machins en plus, Zigbee, Z-wave etc.
Un internaute qui a choisi la première solution affirme avoir tiré 50 mètres de Cat 6 entre le compteur et le boîtier Teleinfo. Juste ce qui me chiffonne est que la ligne n’est pas protégée par l’opto-coupleur (puisque ce dernier est à l’extrêmité). ERDF précise que « en cas de défaut », du 230V peut circuler sur la sortie téléinfo. Je n’ai pas trouvé de module simple isolateur à enficher sur le compteur pour étirer le bus téléinfo en toute tranquilité.
Dans l’épisode suivant de cette saga épique, nous regarderons ce qui sort de Linky, si j’arrive à mettre la main sur une sonde différentielle.
Avertissement standard : n’y touchez pas si vous n’avez pas de solides connaissances en électricité. Cela peut tuer gravement, et même définitivement.