Le père du web reçoit un prix ironique, dénonçant sa complaisance vis-à-vis des DRM
Une récompense peut en cacher une autre.
Tim Berners-Lee a beau avoir participer à la création du WWW, du protocole HTTP et s’être battu pour la neutralité du net et sa liberté total, il se trouve aujourd’hui en pleine contradiction. Comment accepter la prise de pouvoir des grands groupes et la généralisation de la gestion des droits numériques quand on a contribué à la construction philosophique de l’espace de liberté qu’est le web ? C’est là le paradoxe visé par la remise de ce prix de l'obéissance, récompense éminemment très critique envers les décisions du président du World Wide Web Consortium (W3C), organisme qui autorise et régule la mise en place de nouveaux protocoles.
Les contradictions de Sir Berners-Lee et du W3C
C'est en 2013 que le W3C accepte la généralisation des DRM, déclenchant une levée de boucliers de la part des internautes qui dénoncent une prise de pouvoir des multinationales. Une inquiétude partagée même par l’UNESCO il y a peu, et qui a donné lieu à de multiples manifestations dans le monde. Car ce sont les entreprises privées, comme Netflix, Microsoft, Google ou encore Apple, qui mènent le combat pour la mise en place de ce système de contrôle, afin de limiter le téléchargement et le détournement des contenus propriétaires.
De ce lobbying, Berners-Lee semble s’en accommoder, passant à côté de la critique quand il s’agit de lister les défis à venir sur internet dans les années à venir. Un silence assez lourd de sens à côté des critiques du chevalier anglais envers les dérives nationalistes et la dénonciation des applications. Une contradiction qui s’accentue encore après l’annonce du prix Turing, et du chèque d’un million d’euros offert par… Google.
L’initiative du groupe militant entend dénoncer un double discours, alors même que les valeurs défendues par le W3C vont à l'encontre de cette influence. Ce prix est donc tout symbolique de ce conflit sur les DRM, faisant également suite à une première récompense critique faite en 2013, l’Oscar du meilleur second rôle dans « Le Saintweb ».