Le seul vrai jeu du line-up de lancement de la Nintendo Switch se nomme The Legend of Zelda: Breath of the Wild. Une arlésienne pleine de promesse. Une bénédiction à l’arrivée ?

La dernière fois que Nintendo a lancé une console avec un Zelda, il s’en est vendu plus de 100 millions. C’était la Wii et le Zelda en question était le chapitre Twilight Princess, qui signait également le baroud d’honneur de la GameCube. C’est finalement un peu la même situation qui se produit avec The Legend of Zelda: Breath of the Wild, annoncé à l’origine sur Wii U. Nintendo y voit peut-être là un moyen de conjurer le sort, de répéter l’exploit et, surtout, de se remettre de son échec actuel sur le segment salon.

Porte-étendard du line-up de la Nintendo Switch, la nouvelle aventure de Link sacralise toutes les attentes des fans autant qu’il s’avance avec une épée de Damoclés : c’est lui, et lui seul, qui fera vendre des Switch dans un premier temps. Pas le plombier moustachu.

Cela en fait peut-être beaucoup pour un seul jeu, mais ce serait oublier la puissance de la marque Zelda, qui résonne dans le cœur de nombreux joueurs d’hier et d’aujourd’hui. Et de demain aussi. Autant l’affirmer tout de suite, The Legend of Zelda: Breath of the Wild est plus que l’événement marketing et vidéoludique auquel il doit se soumettre. Il est une aventure avec un grand A, à la fois semée d’embûches pour le héros comme pour le joueur. Une expérience grandiose par sa proposition reposant sur une formule à la fois fidèle et dépoussiérée.

Un Zelda plus universel, plus hardcore, plus mature.

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Monstre à deux têtes

Avant toute chose, il convient de désamorcer le sujet qui fâche, ce qui saute aux yeux et rappeler la difficile condition de la Nintendo Switch : oui et, hélas, techniquement, The Legend of Zelda: Breath of the Wild est loin d’être une réussite. Mais il convient de relativiser ce constat d’échec par les deux expériences permises par la console hybride. Le titre de Nintendo affiche bel et bien deux visages. Sur l’écran de la tablette, nous n’aurions pas peur de dire qu’il s’agit de l’une des plus belles productions disponibles sur un tel support (surtout en mettant en perspective son statut de monde ouvert). Sur un téléviseur, c’est plutôt la soupe à la grimace et un cocktail de défauts pouvant piquer les yeux : de l’aliasing à cause de la résolution 900p (surtout sur de l’UHD), des chutes de framerate (quasiment imperceptibles en mode portable), des textures datées, une profondeur de champ risible,…

Mais, bizarrement, et c’est la force de la direction artistique, la magie opère quand même et on se surprend finalement, et très vite, à fermer les yeux sur les griefs visuels, comme s’il faisait partie du difficile apprentissage de cette tranche de vie à Hyrule. On peut donc être à la fois charmé et déçu par les graphismes de The Legend of Zelda: Breath of the Wild et on rêverait tous d’un Zelda avec un rendu proche de celui d’Horizon: Zero Dawn, dernière claque en date. Il faudra se contenter ce que Nintendo peut nous offrir, sachant qu’il n’hésite pas à multiplier les particules dans l’air et à pousser son moteur physique pour appuyer l’ambiance et lui donner du corps.

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Link, ce héros

On appréciera par ailleurs la maturité de l’univers, centré sur un Link devant prendre ses responsabilités pour réaliser une vieille prophétie à son réveil. Amnésique, guidé par une voix familière et croisant des fantômes du passé, le blondinet devra réapprendre à être un héros pour sauver Hyrule des forces du mal. Sans trop en dévoiler, l’intrigue, portée par des cinématiques très jolies et parlées, revendique sa part de beaux moments, naviguant sans cesse entre le touchant et l’épique. Dans son ascension émotionnelle l’érigeant au rôle qui était le sien, Link emmène le joueur avec lui.

Au sujet de la quête de Link devenant celle du joueur, force est de reconnaître que l’expérience ne sera pas de tout repos. Plutôt que d’opter pour une construction allant crescendo dans l’accumulation des compétences spéciales, le jeu donne presque tout d’entrée et laisse aux courageux le soin de se débrouiller, de découvrir par eux-mêmes et, surtout, d’explorer. Le Royaume d’Hyrule de The Legend of Zelda: Breath of the Wild est un vaste terrain à arpenter et à révéler. Des balades facilitées par les aptitudes physiques de Link, qui peut grimper, sauter et planer au moyen d’une jauge d’endurance à gérer (elle se vide vite mais peut être améliorée). C’est un véritable voyage vers l’inconnu, nourri par des environnements variés et racontant chacun leur histoire quand on les arpente. On pense à Skyrim.

On pense aussi beaucoup à Dark Souls. Oui, oui, à Dark Souls. Nintendo a décidé d’impliquer le joueur en lui faisant mériter ce qu’il accomplit. Cela accouche de combats loin d’être évidents, que certains penseront, à juste titre, déséquilibrés. Un constat renforcé par la fragilité des armes, qui se brisent beaucoup trop rapidement, et compensé par une progression intelligente. Comme les précédents Zelda, elle se passe volontiers d’expérience à accumuler pour gagner des niveaux en misant sur une garde-robe garantissant sa survie face aux conditions parfois extrêmes (le froid et le chaud) et, bien sûr, au loot à ramasser.

La cuisine a aussi son importance dans les prouesses qui pointent à l’horizon : elle permet d’obtenir des potions et des remèdes. Autant dire qu’il y a une forme d’apprentissage de la vie et une courbe de progression davantage liée à un joueur de plus en plus à l’aise et à sa place à Hyrule qu’un héros qui devient plus fort au fil du temps. Une exigence sur laquelle personne n’aurait misée.

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Un grand merci

Il faut comprendre par ces choix forts que Nintendo a voulu donner un nouveau souffle à sa franchise, comme le laisse supposer le titre The Legend of Zelda: Breath of the Wild. Autre témoins de cette rupture, les grands donjons d’époque sont remplacés par des Sanctuaires plus petits mais ne manquant pas d’ingéniosité dans leur conception et leur propension à faire réfléchir l’aventurier.

Ils sont indispensables car ils permettent de gagner des Emblèmes octroyant soit un coeur supplémentaire, soit un peu d’endurance (un côté sacrifice puisque choisir, c’est renoncer). Ce qui ne sera pas de trop pour faire face aux boss qui cognent fort et requièrent d’apprendre leurs patterns pour les battre.

Bien sûr, Nintendo a enrichi son monde ouvert avec une tonne de choses à accomplir, à commencer par des missions principales, certaines optionnelles mais conseillées, réclamant une bonne vingtaine d’heures pour en voir le bout — et quelques game over au vu du défi proposé. À cela s’ajoute une palanquée de tâches annexes récompensant l’exploration et la rencontre de personnages conférant de la vie à Hyrule, quand bien même le Royaume tout entier est en danger.

À l’arrivée, c’est une vaste épopée qui se crée au fil des pièces de puzzle que le joueur choisit d’assembler à sa convenance. Certains voudront tout faire, d’autres préféreront aller à l’essentiel. Mais ils seront tous animés par le même sentiment d’être en train de vivre, ou d’avoir vécu, un voyage coloré et grandiose. Tout simplement.

Le verdict

Source : nintendo
10/10

The Legend of Zelda: Breath of the Wild

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Quand un titre appartenant à une franchise hypée est gracié par une immunité agaçante, quand une arlésienne est portée par d’autant d’attente et d’espoir, quand un jeu fait faux bond à la console sur laquelle il était prévu, les peurs, celles les plus compréhensibles, commencent à poindre. Mais The Legend of Zelda: Breath of the Wild les balaie d’un revers de la main pour installer son monde ouvert cohérent et mature dans les sacs de tout le monde.

En s’adressant autant aux fans qui se régaleront au devant de certaines habitudes et autres références bien senties qu’aux réfractaires qui seront touchés par certains choix forts piochant dans ce qui s’est fait ces dernières années, The Legend of Zelda: Breath of the Wild se transforme en une épopée universelle qui se mérite. Le propre des aventures avec un grand A, celle se vivant à la sueur de son front, des étoiles plein les yeux à la moindre découverte participant à la construction d’un canevas dont nous sommes le héros.

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