Le 3 février 2017, Netflix dévoile la première saison d’un de ses derniers projets secrets développés avec Victor Fresco et Drew Barrymore. Il s’agit d’une comédie nommée Santa Clarita Diet, qui malgré son nom ne parle pas tellement de régime mais de zombies.

Une banlieue pavillonnaire californienne, des sourires étincelants, des couples radieux très upper middle class, des jardins fleuris et des brushing parfaits, le tout contenu dans des épisodes de moins de 30 minutes rythmés par quelques blagues aussi idiotes qu’efficaces. Santa Clarita Diet ressemble à un produit de la télévision américaine qui se regarde en faisant le ménage. Une série que l’on aurait pu voir en début de soirée sur ABC ou d’autres chaînes familiales, où le soap humoristique le plus conventionnel a encore sa place.

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Et pourtant, Santa Clarita Diet n’est pas la dernière production d’une chaîne à grosse audience, mais celle de Netflix qui parie sur le succès de cette comédie peu inspirée mais efficace pour donner des couleurs à notre mois de février.

Un pur soap faussement glauque

Elle s’appelle Sheila, elle est une adorable et charismatique mère de famille aussi pimpante que charmante. Lui, il s’appelle Joel, est un époux et père de famille pas moins adorable, à la lisseur manifeste. Ils se sont rencontrés au lycée, nous dit-on. Lui était le roi de la promo et elle la reine. Plus tard, ils ont eu un enfant, un crédit, et un emploi pour subvenir aux besoins de leur joyeuse et naissante famille.

Le cadre du soap des familles est donc posé dans un univers aussi caricatural que simpliste qui à bien des égards nous questionne sur le projet derrière Santa Clarita. Est-on en face d’un pastiche délibérément stéréotypé ? Il y a-t-il eu un raté industriel chez Netflix ?

Nous sommes tentés, après le visionnage des dix épisodes de la première saison de Santa Clarita Diet, de répondre ni l’un, ni l’autre. Si Netflix n’a jamais réussi à exceller dans le soap comique — sa plus grande réussite est indéniablement Kimmy Schmidt — il faut noter que le géant de la SVoD ne s’est pas non plus beaucoup engagé de ce côté-là du spectre des séries. Là, avec Santa, Netflix parie sur un duo : celui de Victor Fresco (Better Off Ted) et Drew Barrymore (la présente-t-on encore ?) qui ont assuré la production et la création de cette nouvelle série comique.

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Et rapidement, dès le pilote, on comprend que Santa Clarita Diet ne sera pas seulement une joyeuse et naïve comédie de banlieusards comme nous avons déjà pu en voir des centaines depuis les débuts de la télévision, mais un mélange aussi étonnant que rarement convaincant. Notre couple lambda se retrouve confronté au fait que Sheila, l’adorable mère de famille, va mourir et devenir un zombie.

L’adorable mère de famille va devenir un zombie

Ne posez pas plus de questions : ce twist saugrenu s’impose à la série en moins de dix minutes, sans service après vente ni explication. La guillerette petite comédie s’offre alors  un décalage de style en introduisant à son intrigue un peu de zombie et de cannibalisme mais cela ne change en rien le ton et le rythme propre au soap.

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Ici, pas de maladies dévorantes et glauques qui effraient les téléspectateurs façon The Strain, encore moins des hécatombes à chaque épisode à la manière de The Walking Dead : dans Santa Clarita, on assaisonne seulement un mauvais concept d’un improbable et épuisé thème d’horreur.

le show de Fresco reste un bon vieux soap dont les ressorts sont légèrement relevés grâce à des meurtres

Et c’est là toute l’originalité, mais également la fragilité, de Santa Clarita. Plutôt que de se transformer en série comique zombifiée, le show de Fresco reste un bon vieux soap dont les ressorts sont légèrement relevés grâce à des meurtres, des scènes de cannibalisme et un humour glauquo-potache qui flirte avec des Død snø.

https://youtu.be/xjRnbOgoAUQ

Et ce compromis est plus difficile à tenir sur la longueur qu’il ne pourrait paraître. Car le show a bien du mal à trouver son ton, et semble souvent tomber dans la caricature involontaire.

Un comique de la fuite en avant scénaristique

La structure comique et dramatique manque clairement de subtilité. Le couple Sheila-Joel s’en sort très bien à tenir son premier rôle : lui est un gentil idiot qui aide sa femme à tuer des gens pour se nourrir, sans jamais être traversé par des grandes interrogations morales, et elle passe de la charmante épouse à une incontrôlable et pas moins délicieuse excentrique qui raffole de testicules humaines. La principale valeur de ces deux personnages est l’amour, toujours mis à l’épreuve par la bizarrerie de Sheila, devenue zombie.

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Il ne faudra pas attendre plus de subtilités, ni d’autres thèmes : Santa Clarita n’est pas une œuvre sophistiquée, et c’est donc clairement à prendre ou à laisser. En somme, le côté rythmé, jovial et divertissant d’un programme de 30 minutes où l’on découpe des gens et insulte des voisins peut tout à fait suffire à faire de Santa un show correct, sans envolées ni fulgurances.

Toutefois, lorsque l’on sort du duo Drew Barrymore/Timothy Olyphant qui excellent dans leur couple de meurtriers ingénus, le vide est au rendez-vous. Alors que la tension dramatique devrait se construire grâce aux personnages secondaires, aucun ne semble répondre à l’appel et de fait, le petit monde de Santa Clarita Diet manque de concret, de cohérence et de direction. Chacun des personnages secondaires, qui devraient pourtant être les piliers d’un bon show comique, ne fait que de brèves figurations au milieu d’une série qui se concentre trop sur son couple star.

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De fait, ce couple intéressant semble toujours léviter au-dessus des intrigues du show, qui ne prennent pas, et s’enfermer dans une dynamique aussi répétitive que difficilement tenable toute une saison. Mais de meurtres en meurtres, Santa Clarita ne perd pas de sa cadence et malgré tous ses défauts, le rythme délirant du soap laisse peu de temps aux déceptions : certes, c’est très moyen, pas très malin et particulièrement facile, mais ça tient quasiment debout.

Disponible sur Netflix le 3 février.

Le verdict

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6/10

Santa Clarita Diet

Rythmé, tordu et excentrique, nous ne doutons pas que Santa Clarita Diet nous fasse oublier que la série est une permanente fuite en avant. Sans thème ni intensité, tout dans ce show semble s'approcher d'un genre nouveau le feel good gore à digérer rapidement.

Mais derrière la bonne surprise de voir Barrymore manger des humains, et les bonnes blagues qui jonchent son quotidien de meurtrière/mère de famille, on finit par se rendre compte que si l'on ne s'ennuie pas devant Santa, nous ne sommes pas non plus mis en appétit.  Ce n'est toujours pas la série comique Netflix qui prouvera que le leader du streaming est en mesure de nous faire autant rire que HBO.  

 

Ailleurs dans la presse

  • The Hollywood Reporter : «  like zombies themselves, the show is relentless »
  • The Guardian : « It’s unclear if the whole zombie thing is a metaphor – for the pressure that society puts on women to be perfect, how there’s something dark happening behind every picket fence – or it’s just to prove that Drew Barrymore can chew on a human foot and still look adorable. »
  • Variety : « It’s hard to imagine “Santa Clarita Diet” will work for everyone. The show is deliberately stylized and devoid of most, if not all, moral consequences. But in the specific juggling act it is attempting, it nails it. »
Source : Montage Numerama

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