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Hardcore Henry : le navet qu'on ne voudrait même pas en jeu vidéo

Faire un film sur le concept d'un jeu de tir à la première personne ? C'est le pari de Hardcore Henry, réalisé par Ilya Naishuller. 

En 2013, Ilya Naishuller, réalisateur et musicien russe, imagine un clip pour son nouveau morceau de musique entièrement réalisé à la première personne. Bad Motherfucker de Biting Elbows est un hit instantané sur le web, la vidéo cumulant un peu moins de 40 millions de vues sur YouTube. Avec des références claires aux FPS, les jeux de tir à la première personne et un montage soigné, Naishuller parvient à séduire à la fois les gamers en mal de sensations fortes et les adeptes du cinéma un brin expérimental qui voient dans ce court-métrage musical une idée radicale et bien exploitée.

https://www.youtube.com/watch?v=Rgox84KE7iY

Et puis vient le drame. Le drame, c'est de croire que ce concept qui passe bien sur un petit écran pendant 5 minutes peut faire un long-métrage d'une heure et trente-quatre minutes : Hardcore Henry.

Derrière cette idée, on trouve le producteur Timur Bekmambetov qui a écouté les spectateurs emballés par le clip et a décidé de mettre l'argent nécessaire à la réalisation d'un véritable film fondé sur ce concept, avec l'aide financière de fans qui ont mis plus de 250 000 dollars dans le projet. Bekmambetov est à la réalisation quelqu'un d'inégal, proposant tour à tour un bon Wanted avec Morgan Freeman et Angelina Jolie et un immonde Abraham Lincoln : Chasseur de Vampires. Quoi qu'il en soit, le Russe passé producteur à Hollywood est responsable de cette catastrophe cinématographique qui aurait pu et dû rester un succès du web pour Naishuller.

Et en acceptant ce deal, le réalisateur devait s'attendre à avoir des soucis. Par exemple, comment créer de l'empathie avec un héros que personne ne voit et qui ne parle pas ? Le problème, comme tous les autres, est passé à la trappe : Hardcore Henry réussit à ne susciter aucune émotion, si ce n'est la nausée. Non, pas celle, métaphysique, d'un Sartre, mais la vraie nausée qui suit les maux de têtes induits par ce long-métrage filmé dans les yeux bioniques d'un cyborg. Choisir un humain augmenté est d'ailleurs, probablement, la ficelle trouvée pour rendre crédible le fait que Henry ne peut pas mourir, quoi qu'il subisse — et ainsi, légitimer l'enchaînement de scènes d'action toutes plus gores les unes que les autres.

Un film sans aucun intérêt

Si vous pensez que le film vaut le coup pour son peps lié à une suite d'ultra-violence, vous vous plantez aussi, malheureusement. Les scènes de combat rapproché sont ridicules et incroyablement molles et brouillonnes : vous ne ressentez pas la douleur, vous ne voyez rien de ce qui se passe si ce n'est des poings et des pieds qui sortent de l'écran et des mouvements de caméra trop rapides. Au mieux serez-vous dégoûté par une éjection d'hémoglobines, le fluide sur lequel repose le film.

Quant au combat impliquant l'usage d'armes lourdes, on enchaîne tous les clichés d'un jeu vidéo d'action : fusil à pompe, AK-47, élimination discrète, grenade dans l'escalier, tanks, hélicoptères, C4, cascades improbables et boss de fin. Ces clins d'œil sont tellement nombreux et lancés les uns après les autres sans aucune maîtrise que, si on se plaît à sourire au premier, on se couvre les yeux de honte au trente-cinquième. « Je voulais rendre un hommage à des jeux comme Half-Life sans pour autant être dans la parodie », affirme le réalisateur. On ne sait pas bien si la déclaration était ironique.

An image from HARDCORE HENRY Courtesy of STX Entertainment

Car voilà, Hardcore Henry parvient à être mauvais même dans sa promesse initiale qui serait grosso-modo de transposer les sensations d'un jeu vidéo à l'écran. En faisant suivre le pire par du encore pire à un rythme effréné, on a l'impression de se retrouver dans un mauvais FPS couloir. Même pas dans une bonne cuvée de Call of' ou un Half-Life, non, le pire des FPS couloir, celui qui vous déclenche une QTE toutes les dix secondes, dont le scénario tient en une ligne et ou le gameplay, mou et linéaire, destine le titre aux bacs promo des grandes surfaces ou des soldes Steam permanentes.

Imaginez combien un tel jeu vidéo puisse vous ennuyer : vous serez à la moitié de l'ennui ressenti quand on le voit se dérouler sur grand écran sans possibilité d'interagir avec le personnage. Et côté effets spéciaux et images de synthèse, on se demande bien à quoi à servi le financement collaboratif censé aider à les finaliser, quand on voit l'allure des flammes de la dernière scène : même un téléfilm du dimanche après-midi les bouderait.

En bref, le 13 avril, profitez de la sortie du film pour organiser une Lan Party entre potes. Si vous voulez vous infliger Hardcore Henry sur petit écran, le Blu-Ray sort le 19 août. C'est encore mieux de vous prendre un petit abo à Netflix d'un mois et de regarder Stranger Things.