Le filtrage automatique des contenus imposé aux grandes plateformes
Les députés ont adopté jeudi un amendement présenté par l'ensemble du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, qui impose un certain nombre de mesures visant à lutter contre les contenus illicites sur internet.
Il s'agit en premier lieu d'institutionnaliser les robocopyrights, ces outils qui utilisent des algorithmes plus ou moins fins pour tenter de reconnaître un contenu diffusé qui serait protégé par le droit d'auteur. Il s'agirait d'une obligation de moyens et de non d'une obligation de résultat. Mais tel qu'il est rédigé, l'amendement demande même la reconnaissance et le retrait de tout contenu illicite de toute nature, ce qui peut ouvrir la porte à la détection de propos haineux, racistes, sexistes, xénophobes, homophobes, etc.
Plutôt que de modifier la loi pour la confiance dans l'économique numérique (LCEN) qui fixe le régime de responsabilité des hébergeurs et des éditeurs, le texte amende le code de la consommation, ce qui est osé.
Du filtrage préventif malgré la directive européenne
Le droit européen transposé par la LCEN interdit d'imposer une obligation générale de surveillance aux hébergeurs, et elle crée même une exonération de responsabilité jusqu'à ce qu'un contenu illégal leur soit signalé. Or avec la loi numérique actuellement en discussion, les opérateurs devront mettre en œuvre des mécanismes de filtrage préventif dès lors que « des contenus illicites sont susceptibles d’être diffusés à grande échelle à destination des consommateurs résidant en France ». Cette précision est quasiment inutile puisque dès lors que l'on utilise une plateforme populaire accessible depuis le territoire, tout contenu est susceptible d'être diffusé à grande échelle en France.
L'amendement ajoute d'autres obligations aux plateformes :
Désigner une personne physique comme leur représentant légal en France ;
Définir des indicateurs permettant d’apprécier le respect des lois et règlements relatifs aux contenus qu’ils mettent à disposition du public ;
Rendre périodiquement publics les résultats de l’évaluation des indicateurs mentionnés.
Théoriquement, les plateformes qui ne se soumettraient pas à cette obligation incluse dans le code de la consommation pourraient être bloquées en France à la demande de la DGCCRF. Ce n'est toutefois que théorique, les plus grands opérateurs qui sont les seuls concernés n'ayant aucun intérêt à ne pas coopérer pour respecter la loi française.