Le rapport qui n’en est pas un de la mission de Denis Olivennes devrait être officialisé cette fin de semaine. Déjà les principaux traits sont connus, et l’UFC-Que Choisir dénonce un rapport « très dur, potentiellement liberticide, anti-économique et à contresens de l’histoire numérique ».

Si l’on en croit les rumeurs, c’est cette semaine que le patron de la FNAC Denis Olivennes devrait remettre à Nicolas Sarkozy les conclusions et le texte d’un accord interprofessionnel issu des consultations livrées dans le cadre de sa mission contre le téléchargement illégal. Le texte, selon les Echos, doit prévoir la suspension de l’abonnement internet pendant une période éventuellement provisoire en cas de récidive de téléchargement de contenus piratés. Cette sanction serait pilotée par une autorité publique, très probablement l’Autorité de Régulation des Mesures Techniques, dont ça n’était pourtant pas du tout l’objectif lors de la création par la loi DADVSI. En revanche, il ne serait plus question de mettre en place des amendes pénales ou une riposte graduée automatique.

Ce soir, l’UFC-Que Choisir indique que le rapport :

  • Crée une autorité administrative à compétence juridictionnelle à visée répressive et aux compétences larges ;
  • Crée un  » répertoire des abonnés dont le contrat a été résilié  » ;
  • Prévoit le déploiement à large échelle de mesures de filtrage sous 24 mois ;
  • Prévoit, sous plainte des ayants droit, l’envoi de mail par les FAI et le cas échéant des procédures de suspension ou de résiliation de l’abonnement.

De plus, l’association précise que les dispositions répressives prévues par le rapport ne se substituent pas à d’éventuelles poursuites pénales pour contrefaçon, qui sont passibles de 3 ans d’emprisonnement et 300.000 euros d’amende. L’UFC-Que Choisir dénonce « cette surenchère répressive et rappelle que sur la seule question de la résiliation punitive, cette disposition est, selon l’UFC-Que Choisir, contraire à plusieurs principes constitutionnellement garantis ». Il s’agit notamment du respect de la présomption d’innocence et l’imputabilité des actes de téléchargement à l’abonné. La suspension par une autorité administrative de l’abonnement est aussi contaire aux garanties procédurales prévues au niveau européen par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et notamment le droit à toute personne qui fait l’objet d’une accusation en matière pénale de bénéficier d’un procès équitable, juge l’UFC.

L’association de consommateurs, qui ne sera pas signataire de l’accord, demande au Président de la République Nicolas Sarkozy d’inverser l’ordre des priorités, et de faire de l’amélioration des offres en ligne un préalable à toute réforme à visée répressive. Elle note en effet qu’à part l’alignement de la fenêtre de la VOD (pour le téléchargement et non la location…) sur celle des DVD, à six mois après la sortie en salle, rien n’a été spécifiquement acté dans le rapport pour renforcer l’attractivité des offres légales. En particulier :

  • Presque rien sur les DRM. Une simple recommandation sans mesure concrète et des promesses qui n’engagent que ceux qui les reçoivent, alors que démonstration est faite que ces verrous détruisent l’utilité, c’est-à-dire la valeur économique du fichier et de l’œuvre ;
  • Rien sur les prix de gros et de détail de la musique en ligne alors qu’un oligopole exerce manifestement une position dominante et inflige des prix excessifs ;
  • Rien sur les accords d’exclusivité (Warner/Orange) destinés à se multiplier dans l’avenir qui cloisonnent l’offre culturelle et incitent aux échanges non contrôlés ;
  • Rien sur l’amélioration de l’exploitation et donc de la diffusion des catalogues sur internet ;
  • Rien sur la qualité des fichiers et donc la qualité sonore des œuvres vendues ;
  • Rien sur l’augmentation légitime de la part du prix effectivement reversé aux créateurs.

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