Composée de 34 producteurs français, la société Le Meilleur du Cinéma Français vient de lancer la version bêta de sa plate-forme de VOD Universcine.com. L’accent est mis sur la qualité éditoriale et l’autonomie vis à vis des distributeurs de cinéma. Une façon de s’affirmer grâce aux atouts du numérique.

C’est à l’occasion des rencontres cinématographiques de Dijon que la société Le Meilleur du Cinéma Français (LMCF) a lancé son site de VOD Universcine.com. Le site fédère 34 producteurs de cinéma indépendants français, et ambitionne de devenir un modèle ou même le moteur d’une VOD fédérative à l’échelle européenne voire internationale. Créée en 2001, LMCF veut « proposer au grand public une offre de films à la fois large et éditorialisée avec une passion cinéphile« .

Les producteurs associés au sein de la société veulent proposer une alternative indépendante aux rouages habituels des intermédiaires dont ils semblent se méfier. Ils n’ont pas confiance non plus dans les nouveaux acteurs de la chaîne culturelle que sont les opérateurs de télécoms et autres géants de l’informatique. « Pour certains d’entre eux, leurs stratégies globales ou leurs modèles économiques sont basés sur la gratuité du contenu financé par la publicité« , remarque LMCF. Or, ajoutent-ils, « on peut s’inquiéter pour l’exposition au public des œuvres qui n’auraient pas un potentiel commercial immédiat« . Le constat pour les intermédiaires traditionnels n’est guère plus flatteur. Pour des raisons multiples, expliquent-ils, « la distribution du cinéma en DVD n’a jamais pu parfaitement remplir son rôle de diffusion de la culture et garantir une juste rémunération des créateurs et producteurs« . Et de citer comme raisons majeurs les barrières de la distribution physique, un marché focalisé sur la rotation des produits les plus commerciaux, la rémunération importante d’intermédiaires, ou l’opacité de la chaîne de valeur notamment du secteur locatif.

En clair, la démarche de LMCF autour du site Universcine.com se résume en une phrase : « on n’est jamais mieux servi que par soi-même« .

L’union fait la force des indépendants

Le site, qui se veut « ouvert à tous les détenteurs de droits partageant les mêmes objectifs« , sera lancé commercialement en janvier 2007. Mais déjà une centaine de films est accessible sur la version bêta lancée fin octobre. Pour se distinguer, Universcine.com veut « re-cinéphiliser » le spectateur, notamment par un « environnement fortement éditorialisé« . Chaque film est accompagné d’une fiche éditoriale complète, avec le générique, les crédits techniques, les critiques de presse, et le synopsis. Inspiré par le « web 2.0 », Universcine.com fait aussi la part belle aux tags et aux commentaires des cinéphiles.

D’ici 2 ans, LMCF espère réunir au minimum 2000 films, dont une partie sera exclusivement disponible sur le site. Une exclusivité qui, pourtant, entre en conflit avec l’objectif annoncé d’exposition au public des œuvres. Une œuvre n’est en effet jamais moins bien exposée que lorsqu’elle est enfermée dans les murs d’un seul et unique marchand.

Achat contre vidéo locative

Et c’est déjà ici que l’on perçoit qu’être indépendant n’implique pas nécessairement d’être plus ouvert. Le site reprend les recettes des acteurs majeurs de la VOD. Les fichiers sont protégés au format Windows Media avec un DRM qui empêche sa lecture au delà de 48 H (ce qui n’est d’ailleurs pas marqué, mais cet oubli sera sans doute corrigé pour la version de janvier). Le but, bien sûr, est de reproduire le shéma de la vidéo locative des distributeurs physiques. Et aujourd’hui aucun acteur de la production cinématographique, même indépendant, ne semble vouloir se demander si le shéma locatif a réellement un sens sur Internet, où les questions de « turn over » du stock de cassettes ou de DVD sont pourtant hors de propos.

La dualité des prix, entre un coût au rabais pour une location et un tarif plein pour l’achat, veut être sauvegardé dans l’univers numérique alors qu’il a comme origine une contrainte technique dans le monde marchand physique. Et sauf installation complexe, ce DRM que l’on cherche à imposer pour créer des barrières physiques dans un marché qui n’en a pas, empêche les clients potentiels de regarder dans leur salon un film acheté dans leur bureau. Comme toujours lorsque l’on parle de DRM, ceux-ci n’incitent jamais à l’achat mais au contraire découragent ceux qui auraient aimé acheter.

Le monde de la musique commence à le comprendre, sous l’impulsion des indépendants. Le monde du cinéma sera peut-être bien plus long à prendre cette donnée en compte tant leur shéma de pensée reste dominé par la division historique entre le locatif et l’achat.


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