À Hong Kong, des manifestants utilisent de plus en plus l'application mobile FireChat qui leur permet d'échapper à la censure des autorités chinoises et de continuer à s'organiser malgré la neutralisation du réseau cellulaire. L'outil, qui permet de créer un réseau maillé directement entre des terminaux, souffre toutefois de certaines limites.

À Hong Kong, des manifestations ont éclaté ces jours-ci pour rejeter l'ingérence de Pékin dans les affaires de la ville. L'ancienne colonie est très attachée à ses acquis politiques, notamment l'élection du chef de l'exécutif au suffrage universel. Or, le pouvoir central souhaite encadrer le scrutin de façon à obtenir la loyauté du prochain chef de l'exécutif, quel que soit le candidat qui sera choisi par les habitants.

Les Hongkongais n'ont évidemment pas apprécié l'immixtion du Parti communiste chinois. Nombreux sont ceux à être descendus dans la rue pour forcer le gouvernement à reculer, tandis que la protestation s'est répandue sur les réseaux sociaux. De nombreuses photographies des cortèges et des sit-ins ont notamment circulé via Instagram, illustrant l'ampleur du mouvement en faveur de la démocratie.

Sans surprise, les autorités n'ont pas tardé à bloquer à l'accès à certains services, dont Instagram, pour éviter toute propagation de la révolte à la Chine continentale. Le réseau cellulaire a aussi été coupé dans certains quartiers de la ville, afin que les manifestants aient plus de mal à s'organiser. Mais des solutions pour échapper à la censure existent, comme FireChat.

Des avantages…

FireChat est une application pour iOS et Android. Il s'agit d'un outil de messagerie instantanée qui fonctionne sans Internet, directement d'appareils à appareils, en créant un réseau maillé ("mesh") qui s'avère être très résilient, sauf à neutraliser chaque point d'accès. Il a été développé par Open Garden, une start-up californienne spécialisée dans la connectivité des appareils mobiles.

Et visiblement, les Hongkongais s'en emparent massivement Ces dernières 24 heures, l'application a été téléchargée plus de 100 000 fois, selon la journaliste Liz Claman. Il faut dire que la perspective d'un véritable réseau local parallèle à Internet, utilisant des connexions directes entre appareils sans avoir à passer par à un FAI ou un opérateur de téléphonie mobile et libre de toute censure, a de quoi séduire.

…et des limites

Très pratique, l'outil comporte toutefois certaines limites. Par exemple, Open Garden a rappelé sur Twitter que les messages échangés ne sont pas (encore) chiffrés. La start-up recommande donc de ne pas utiliser sa véritable identité sur FireChat, dans la mesure où la confidentialité des discussions n'est pas garantie. Et il tout à fait concevable que la police essaie de surveiller ce qui s'y passe.

De plus, les usagers ne doivent pas être trop éloignés les uns des autres (9 à 30 mètres) s'ils veulent se connecter entre eux via FireChat. Dans le cas de Hong Kong, ce n'est pas un problème : la densité de la population y est très élevée, tout comme le nombre de protestants dans la rue. Et chacun ou presque dispose de son propre mobile. Cela peut l'être en revanche dans des zones rurales.

Outre l'absence de chiffrement, FireChat n'est pas encore en mesure de vérifier l'authenticité des messages qui circulent via son service, comme le relève le chercheur en sécurité informatique Frederic Jacobs sur son blog. Concrètement des tentatives d'usurpation d'identité peuvent survenir. Un régime autoritaire pourrait chercher par exemple à piéger des manifestants pour les arrêter ensuite.

Enfin, les adresses MAC peuvent être captées par les forces de l'ordre en vue de pister ceux qui se servent de l'application mobile. Firechat est donc à manier avec beaucoup de prudence, surtout dans les pays dirigés par des régimes autoritaires. FireChat constitue en tout cas une arme anti-censure tout à fait prometteuse, mais qui doit être améliorée pour renforcer la sécurité de ses usagers.


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