Si l’on en croit l’explication officielle du Gouvernement, c’est parce qu’il est très difficile de trouver des personnalités à la fois compétentes et indépendantes qu’il lui a fallu quelques six mois pour redonner à l’Hadopi une composition conforme à la loi.

Soit c’est une excuse inventée de toutes pièces pour faire oublier les manoeuvres qui ont permis d’annuler au dernier moment la nomination du président de Wikimedia France, soit c’est un aveu révélateur des relations de proximité très forte entre le pouvoir politique et les lobbys culturels. Interrogé sur les raisons pour lesquelles le Gouvernement a mis plus de 6 mois à nommer de nouveaux membres de l’Hadopi, obligeant l’institution à aller jusqu’à menacer de porter plainte contre l’Etat en raison de son défaut d’action, le Gouvernement a eu cette réponse sibylline dans le Journal Officiel :

Par décret en date du 1er juillet 2014, Madame Dominique Chelle et Messieurs Denis Rapone, Bernard Tranchand et Alain Lequeux ont été nommés membres du collège de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) pour une durée de six ans. Il a ainsi été pourvu au remplacement de Mesdames Marie Picard, Martine Jodeau, Chantal Jannet et Monsieur Jacques Toubon, dont les mandats sont arrivés à échéance le 23 décembre 2013. Le délai nécessaire à ce remplacement s’explique par les consultations et les recherches qui ont été indispensables pour répondre aux fortes contraintes posées par les dispositions législatives qui encadrent ces nominations.

Selon l’article L331-18 du code de la propriété intellectuelle, les « fortes contraintes » sont que les membres de la Hadopi ne doivent pas avoir exercé depuis trois ans de :

  • Fonctions de dirigeant, de salarié ou de conseiller d’une société (de gestion collective de droits) ;
  • Fonctions de dirigeant, de salarié ou de conseiller d’une entreprise exerçant une activité de production de phonogrammes ou de vidéogrammes ou d’édition d’œuvres protégées par un droit d’auteur ou des droits voisins ;
  • Fonctions de dirigeant, de salarié ou de conseiller d’une entreprise de communication audiovisuelle ;
  • Fonctions de dirigeant, de salarié ou de conseiller d’une entreprise offrant des services de mise à disposition d’œuvres ou d’objets protégés par un droit d’auteur ou des droits voisins ;
  • Fonctions de dirigeant, de salarié ou de conseiller d’une entreprise dont l’activité est d’offrir un accès à des services de communication au public en ligne.

De plus, les membres de l’Hadopi ne peuvent « directement ou indirectement, détenir d’intérêts » dans l’une des sociétés ou entreprises mentionnées, ni « participer à une délibération concernant une entreprise ou une société contrôlée (…) par une entreprise dans laquelle il a, au cours des trois années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat« .

Il aurait donc fallu plus de six mois pour trouver trois personnes répondant à ces critères d’indépendance.


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