Pour Jon Newton, c’est le procès de la liberté d’expression sur internet. Le fondateur de p2pnet.net, grand défenseur du peer-to-peer et des éditeurs de logiciels face aux majors du disque, est poursuivi en diffamation. Non pas par la RIAA ou une quelconque maison de disques, mais bien par l’éditeur de Kazaa et sa dirigeante.

Jon Newton est connu des internautes anglophones comme l’un des plus grands et des plus acharnés défenseurs du peer-to-peer. D’origine britannique et expatrié depuis plusieurs décennies au Canada, Newton a combattu sur son site p2pnet.net ce qu’il nomme « le cartel du divertissement ». Il y a mis une force hors du commun, publiant depuis 2003 plus de 8000 articles pour la plupart écrits de sa main, sept jours sur sept. Certains ont été publiés sur Ratiatum, partenaire historique de p2pnet.net.

Avec un tel rythme de travail, il est arrivé à Jon Newton de franchir la ligne rouge. C’est peut-être ce qui s’est passé lorsqu’il a publié le 2 mai dernier un article intitulé « Nikki Hemming’s money mansion » (« Le manoir d’argent de Nikki Hemming »). Dans cet article, Newton citait d’abord Associated Press pour évoquer les conditions étranges dans lesquelles la dirigeante de Sharman Networks (Kazaa) a vendu sa maison personnelle à un comptable de la société. Interrogée par la justice australienne, Nikki Hemming a démenti avoir orchestré la vente pour empêcher la saisie de sa villa achetée 1,7 millions de dollars australiens. Newton complétait alors son article en citant les commentaires anonymes laissés par un visiteur sur un précédent article écrit à propos de Hemming. Dans ce commentaire, l’anonyme explique avec forts détails et une conviction troublante que Nikki Hemming n’est qu’une gérante de paille, placée là pour détourner l’attention de deux acteurs originaux de Sharman Networks, Mark Dyne et Kevin Bermeister. Jon a cité en large le commentaire, sans y mettre de conditionnel. « Hemming est une dupe crédule, mais elle a volontairement accepté de servir Dyne, Bermeister et leur argent pour un salaire très confortable et un pourcentage important des parts de la nouvelle structure de la compagnie« , disait ainsi le commentateur, lui-même poursuivi contre X. « Elle peut s’attendre à recevoir plus d’actions en justice, des chefs d’accusations, de faillites et de déshonneur« , concluait Jon Newton toujours sous les guillemets dus à la citation.

Dès le 9 mai Nikki Hemming et Sharman Networks ont porté plainte contre Jon Newton pour diffamation, malgré le retrait des articles et des commentaires litigieux. Pour Newton, c’est maintenant une affaire de principe pour la liberté d’expression sur Internet. « Ca n’est pas l’affaire de Sharman qui porte plainte contre p2pnet. C’est l’affaire d’une entreprise multi-millionnaire qui use de son poids pour essayer d’empêcher un petit site de news de rapporter quelque chose que l’entreprise ne voulait pas voir rapporté« , explique-t-il à ses lecteurs. « Ca a donc des implications très importantes pour la blogosphère, et pour les millions de gens qui ont choisi le Net comme principal moyen de se parler entre eux« .

Kazaa est probablement le seul logiciel de P2P qui a réussi l’exploit de se mettre à dos à la fois l’industrie du disque et les amateurs d’échanges de fichiers musicaux. Cette plainte contre p2pnet servira probablement les intérêts des premiers, et exacerbera la désaffection des internautes pour le logiciel qui fut, en son temps, le plus grand successeur de Napster.

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